Depuis que la campagne « tolérance zéro contre la corruption » a fait tomber quelques têtes dans le corps policier, la prudence est de mise. Ceci pour le plus grand bonheur des usagers de la route. Toutefois, ils déplorent le laxisme qui commence à se manifester.
Fini les intempestifs contrôles routiers et les interpellations en cascade de certains conducteurs. Avec le début de ladite campagne, désormais, tous les faits et gestes des policiers sont scrutés à la loupe. Chacun veille sur son image. Il est 10h. Nous sommes sur le parking de la RN1, à la station dit « des bus d’Ijenda ». Contrairement aux heures de pointe, le parking semble dégagé. Seuls les bus de transport, les motos, les conducteurs de Tuk-Tuk et quelques particuliers font des navettes sur la route.
Un fait inhabituel. Souvent grondeurs contre les rabatteurs, affairés, les chauffeurs affichent un air serein. «Aucune raison de s’en faire. En tout cas, nous n’avons plus à jouer au cache-cache avec les policiers en route », confie Gérard, conducteur de Hiace en partance vers Mwaro.
Il y a quelques semaines, un luxe qu’ils ne se seraient pas permis car ils devaient faire plusieurs allers-retours pour compenser le vide laissé par « les sous mains » qu’ils laissaient en route. « Ce sont les retombées du rappel à l’ordre du ministre Gervais Ndirakobuca », abonde dans le même sens Jean, chauffeur également. Avec cette mise en application, il laisse entendre que petit à petit, un climat de confiance s’installe. «Dorénavant, quand ils trouvent que tes feux de plaque ne fonctionnent pas, ils peuvent te laisser. Ce qui n’était pas le cas, il y a un mois. Facilement, ils pouvaient t’extorquer 5000 BIF ».
Un constat : la mise en application de la tolérance zéro s’observe sur tous les grands axes des routes de la capitale. L’attitude, des fois colérique, de certains policiers cède peu à peu à la compréhension. Si ce n’est pas du relâchement.
Toutefois, certains conducteurs, au risque de causer des dommages collatéraux, ils demandent au ministre de la Sécurité publique d’instaurer de mesures d’accompagnements. Allusion faite à cette fâcheuse tendance de certains policiers de laisser la route aux seuls usagers. « Relâchement ou pas, ils doivent rester à leurs postes d’attache, assurer l’ordre routier. Sinon, ce sont des accidents sans nom qui en découleront ».
Des améliorations à faire
Avec les derniers procès en flagrance des douze de leurs collègues pris les mains dans le sac, les craintes vont crescendo dans les rangs du corps de police. Bien que admiratifs de nouvelles mesures, tous les policiers approchés demandent qu’ils n’y aient pas de demi-mesures. «C’est vrai que cela contribue à redorer l’image de notre profession. Mais, il ne suffit pas seulement que le ministre balaye devant la porte, il faut même entrer dans la maison », insiste un d’entre eux. Pour lui, pour que la campagne ait l’effet escompté, le ministre doit faire de même au niveau de la hiérarchie supérieure. « Sinon, le ver restera toujours dans le fruit.» Avant de lâcher : « Aussi, faudra-t-il qu’il étudie de fond en comble, les raisons qui les poussent à se laisser soudoyer».
Pierre Nkurikiye, porte-parole du ministère de la Sécurité publique, conseille à la population de ne pas se faire justice. « Quand bien même un policier se méconduirait, il ne faut pas que la population se rende justice. Préalablement, ils doivent alerter les autorités compétentes ».
Pour rappel, depuis le début de la tolérance zéro, plus d’une dizaine de policiers ont été appréhendés et jugés dans de procès en flagrance.