Vendredi 22 novembre 2024

Économie

Mairie de Bujumbura : une mesure qui crée une polémique

Depuis le 1er novembre 2016, les véhicules assurant le transport rémunéré et non énuméré, les tuk-tuk, les motards et les taxi-vélos doivent s’acquitter de droits de stationnement.

Même les taxi-vélos vont désormais payer 2000 Fbu comme droits de stationnement
Même les taxi-vélos vont désormais payer 2000 Fbu comme droits de stationnement

« Les emplacements de stationnement payant sont délimités par des bandes tracées sur le sol des Chaussées et des points de stationnement concernés », lit-on dans cette décision du maire de la ville Freddy Mbonimpa. Ils sont signalés par une matérialisation au sol indiquant que le stationnement est payant. Cette décision précise que la gestion est confiée à une personne morale en vertu d’une convention. Et le recouvrement est assuré au moyen d’un ‘’ticket de stationnement’’ payable selon le barème suivante : « Pour chaque stationnement ne dépassant pas une heure, le ticket est fixé à 300Fbu. Et pour chaque heure supplémentaire, on paie 300Fbu » Quant aux stationnements d’une durée maximale de 12 heures, les frais sont fixés à 2000Fbu. Et le ticket est valable pour une seule journée, précise cette décision.

Elle ajoute que pour les transports rémunérés, le payement se fait par un versement bancaire au compte ouvert au nom de la mairie de Bujumbura. Et cela, au plus tard le 5ème jour de chaque mois. Et d’avertir : « Une pénalité de retard de 10% par mois de retard est appliquée. Et après trois mois de non-paiement, des mécanismes de recouvrement forcé seront mis en œuvre.»


>>Réactions

« Une mesure contraire à la loi »

michel-masaboLe spécialiste en droit fiscal et professeur à l’Université du Burundi, Michel Masabo, affirme que cette mesure est contraire à la Constitution et à la nouvelle loi communale. Selon les articles 159, alinéa 5 de la constitution et l’article 78 de la loi communale, ‘’toute décision sur les impôts et taxes relèvent du domaine de la loi’’. Autrement dit, il faut une loi pour instaurer ce genre de mesure. Et de trancher : « Donc, le maire de la ville n’a pas la prérogative de prendre une mesure fiscale. » Pour lui, il fallait qu’il y ait un projet de loi qui prévoit la mise en place de cette mesure pour être une loi après avoir été adoptée et promulguée.

« Une mesure qui peut-être productive, surtout si elle s’opère dans la transparence totale »

faustin-ndikumanaC’est la réaction de Faustin Ndikumana, président de la Parcem qui explique que la décision n’est pas en soit mauvaise, plutôt l’opacité dans l’affectation de cet argent. « Que les habitants de la ville contribuent pour entretenir la propreté ou assurer la sécurité de leur ville n’est pas le véritable problème, d’ailleurs ça relève de leurs devoirs de citoyens. Mais, c’est l’allocation de cet argent collecté qui posent pas mal de questions. »

Taxée d’être opaque dans la gestion de ses services municipaux et l’élaboration de certains de ses projets, à l’exemple de celui de « l’Hôtel de Ville » (presque tombé à l’eau), la mairie doit s’ouvrir à la transparence. Et de s’interroger : « Si ladite collecte vient pour améliorer les conditions du citadin, pourquoi rechigne-t-elle à rendre transparente la gestion de cet argent ? » Au cas échéant, M. Ndikumana dit que la mairie doit publier sa situation financière sur internet afin que tout le monde sache comment cet argent sera utilisé.

Aussi, il estime que dans un contexte de démocratie naissante, le minimum de débat importe surtout quand il s’agit de prendre une décision engageant la population. « Tout au moins, la mairie aurait commencé par expliquer le bien-fondé de la décision, sa valeur ajoutée. C’est de cette manière que la population s’en approprie vite ».

bosco-minaniBosco Minani, président de l’Atrabu (association des transporteurs du Burundi), indique qu’ils ne sont pas contents de cette mesure du maire car ils n’ont pas été consultés. Bien plus, il se demande si les transporteurs des véhicules œuvrant à l’intérieur du pays qui descendent sur Bujumbura une fois les trois mois pour payer les impôts devront payer cette taxe.

L’autre inquiétude soulevée par M. Minani est de savoir si les gouverneurs des provinces ne vont pas emboiter le pas au maire pour prendre à leur tour la même mesure.

Le président de l’Atrabu se demande si les propriétaires des véhicules qui tombent en panne pendant tout un mois, payeront également la totalité de la nouvelle taxe.

Pour toutes ces raisons, indique Bosco Minani, des consultations doivent avoir lieu avec le maire pour qu’il explique clairement sa mesure. Car, les transporteurs payent déjà une taxe municipale tous les trois mois à hauteur de 6 mille Fbu pour un véhicule de 18 places et 12 mille Fbu pour un véhicule de 30 places : « C’est donc une nouvelle taxe qui s’ajoute. »

Et de prévenir que si la mesure est maintenue en l’état, les transporteurs prendront des dispositions pour la respecter mais également pour continuer à travailler sans trop de perte.

Léonidas Ndikumana, un taxi-vélo de Kamenge, n’y va par quatre chemins : « Je suis contre cette mesure car la mairie nous exige de payer 2000 Fbu par mois en plus de 1500 que nous payions, c’est trop. » Pour lui, cette mesure vient empirer la situation surtout que dernièrement, la même mairie leur a exigé de porter des gilets de 13 mille Fbu la pièce. Et de suggérer que la somme de 2000 Fbu soit payée trimestriellement.

Georges Ndikumana, un taxi-moto de Gihosha : « C’est injuste de nous demander de verser 5000 Fbu par mois alors que les motards n’ont aucun parking. Avant nous avions des parkings chez Ndadaye, à l’OTB et près de l’école Michel Archange mais la police nous a chassé.» Bien plus, estime-t-il, si le gouvernement veut de l’argent, qu’il leur permette de circuler partout même au centre-ville.


La mairie s’explique

Freddy Mbonimpa
Freddy Mbonimpa

« Pour le transport rémunéré, il n’y a pas de problèmes parce qu’il y a eu des réunions avec des représentants des associations des transporteurs. La mesure est en application depuis ce 1er novembre », indique Freddy Mbonimpa, maire de la ville de Bujumbura. Concernant le transport non énuméré, la mesure sera mise en application en peu après avec le 1er janvier 2017. Et cela, précise-t-il, si les travaux préparatoires avancent au rythme voulu.
Le maire de la ville de Bujumbura signale que sur 3000 parkings escomptés, 2300 sont déjà identifiés. Et après, un appel d’offre pour des marchés publics sera lancé pour leur aménagement.

Il explique que deux raisons ont essentiellement motivées cette décision : lutte contre le banditisme dans les parkings et l’approvisionnement de la caisse de la mairie de Bujumbura.

Concernant la destination de cet argent, Freddy Mbonimpa dit qu’il y a des taxes et impôts collectés par l’OBR et dirigés dans la caisse de l’Etat tandis que ces frais de stationnement vont servir au fonctionnement des services municipaux. Il promet que des réunions seront organisées par tous les concernés sur la mise en application de cette décision.

Droits de stationnement selon la décision du maire

tableau

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. GACIYUBWENGE

    Bonne mesure si elle bien étudiée. Je suis d’accord avec le précédent commentateur, M Verstehen.

  2. Verstehen

    Pour que les citadins soient fiers de leur ville, ce sacrifice vaut la peine. Mais étant déjà habitué à l’adage de la chèvre qui broute là ou elle est attaché, il faudrait que Monsieur le Maire change l’appellation de sa taxe en un nom qui inclut le projet pour lequel ces fonds seront destinés. Pour moi ,je pense que pour que la ville de Bujumbura cesse d’etre ce grand village anarchique et dangereuse que tout le monde connait ,il faudrait collecter les fonds et financer:
    -La mise en place progressive d’un éclairage public digne
    -L’aménagement des trottoirs pour les piétons(pavé)
    -La réinstallation des feux de signalisation(seuls les reliques vous renseigne de cette tentative)
    -Instaurer des hots spots pour la connexion à l’internet abordable si pas gratuit
    -Payer les services d’entretien de la voirie urbaine(bouchage des nids de poule,balayage,peinture etc)
    -Aménager les airs de loisirs(terrains ,jardins,parcs)
    Mais aussi finaliser l’hôtel de ville(la honte) et commencer à économiser pour lâcher l bride aux communes, car décentralisation exige.

  3. an

    Cela rappelle du temps où la polygamie était punie ou plutôt taxée d’un montant de 500,-Francs l’an tout en permettant au contrevenant de rester avec son second bureau.-

    • nunu

      Que deviedra-t-elle si une personne qui ne sera pas a mesure de payer cette taxe supplementaire??????

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