Après le vote du projet de loi sur l’opposition par la chambre basse du parlement, la société civile et les professionnels des médias gardent espoir que les lois les régissant seront analysées et votées avec la plus grande attention.
<doc5633|right>Au cours de la session parlementaire d’octobre, des projets de loi, entre autres celui régissant l’opposition, l’organisation et fonctionnement de la société civile, la tenue des réunions et manifestations ainsi que celui sur la presse, figurent sur l’agenda des députés. La loi sur l’opposition, qui était très attendue dans les milieux politiques, vient d’être adoptée ce 10 octobre 2012. Pourtant, pour l’ADC-Ikibiri, force est de constater que la loi a été taillée sur mesure pour le Cndd-Fdd du fait qu’elle ne prend pas en compte les considérations qu’elle avait proposées. En outre, elle accuse le pouvoir de l’avoir écartée au moment de sa confection alors qu’elle était la plus concernée. Les professionnels des médias et la société civile sont inquiets, mais restent confiants.
« Sans liberté, il n’y a pas de développement »
Pacifique Nininahazwe, délégué général du Forsc, regrette cette absence de concertations : « Des lamentations qui fusent de la classe politique, des professionnels des médias et de nous-mêmes n’arrangent en rien le pouvoir. » Pour lui, la liberté d’expression ou de la presse, celle d’association et de manifestation et celle de réunion, sont les plus fondamentales en démocratie.
Il estime qu’il y a une spéculation autour de la notion d’ordre public : « Beaucoup de sanctions ou de limitations tournent autour de la notion d’ordre public, alors que c’est une notion qui n’est pas du tout définie et qui peut conduire à toute sorte d’arbitraire. »
Néanmoins, l’espoir de Pacifique Nininahazwe est fondé sur le fait qu’il y a d’autres textes qui ont été bien élaborés dans le passé. Il s’agit de la loi portant mise en place de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme : « Le gouvernement avait proposé un très mauvais texte, mais les parlementaires avaient joué leur rôle et nous avaient donné un texte acceptable. »
A travers les contacts et le plaidoyer que nous allons faire auprès des élus, assure-t-il, ils vont nous écouter et essaieront de décider dans l’intérêt du pays et du peuple. « Au cas contraire, ça sera un recul de la démocratie et le ternissement de l’image du Burundi sur la scène internationale », lâche le délégué général du Forsc. Au moment où le Burundi, remarque-t-il, a besoin d’une grande solidarité internationale, les dirigeants devraient être prudents.
<doc5631|right>{« Si nos considérations ne sont pas prises en compte, notre travail sera terminé »}
Philbert Musobozi, vice-président du Centre burundais pour la liberté de la presse (CBLP), estime que le monde des journalistes a besoin d’une loi adaptée au 21ème siècle. Or, dit-il, celle qui est devant l’Assemblée nationale est une loi scélérate, car une fois adoptée, le travail des médias sera terminé. » Et d’ajouter : « La lutte sera dure. Nous allons dire non et le manifester puisque la République du Burundi sera devenue un régime dictatorial et aura décrété l’état d’urgence. »
Dans l’intérêt de la bonne marche des institutions, signale-t-il, le minimum c’est d’assainir une telle loi. Néanmoins, Philbert Musobozi estime que les débats qui ont eu lieu guideront les élus du peuple à moins qu’ils décident de plonger le pays dans le gouffre.
« Nos élus ne peuvent pas décider pour nous sans nous »
Jérôme Niyonzima, vice-président de l’Union Burundaise des Journalistes (UBJ), ne doute pas que les élus du peuple analyseront avec minutie la loi régissant la presse. Surtout, explique-t-il, que l’UBJ a eu l’occasion d’échanger suffisamment avec les députés de la commission en charge de ce projet.
Sinon, Jérôme Niyonzima dégage comme conséquence l’absence du 4ème pouvoir, ce qui constitue la perte de l’un des piliers de la démocratie. Le vice-président de l’UBJ craint aussi que sur le plan diplomatique, les sources de financements risquent de tarir pour non respect du gouvernement burundais des droits de l’homme et violation des principes démocratiques.