Des lacunes se manifestent dans les textes qui régissent les Conseils nationaux, au Burundi. C’est le constat de l’Observatoire de l’Action Gouvernementale (OAG) après analyse du fonctionnement de ces conseils. Il a présenté sonrapport ce 28 août, à Bujumbura.
La Constitution de la République du Burundi prévoit la création de cinq Conseils Nationaux, dans son article 268. Il s’agit du Conseil National de la Communication (CNC), du Conseil Economique et Social (CES), du Conseil National de Sécurité (CNS), du Conseil National pour l´Unité Nationale et la Réconciliation et de l´Observatoire National pour la prévention et l´éradication du génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l´humanité. Les deux derniers ne sont pas encore fonctionnels.
Ces conseils sont des organes consultatifs chargés de suivre régulièrement l´état de la situation dans leurs domaines d´intervention respectifs par des réflexions, des conseils, des propositions de politiques, de lois et de programmes et l´élaboration de rapports périodiques.
Le CNC, un cas particulier
Domitile Barancira, une consultante qui a mené l’étude, trouve qu’il y a un élargissement de la nature et des missions constitutionnelles du CNC ; une confusion de ses missions consultatives et décisionnelles ; l´inexistence de dispositions relatives à la mission de sa régulation ; l’absence de dispositions relatives aux règles de procédure, en général, et à celles suivies devant l´instance de régulation, en particulier ; l´absence de dispositions régissant la collaboration entre le CNC, le ministère en charge de la Communication et les organes d´autorégulation des médias ; une organisation très parcellaire qui ne tient pas compte de toutes les missions du Conseil, notamment l´absence de commissions ou de services en charge des missions essentielles ; la coexistence de dispositions affirmant son autonomie et son indépendance et d´autres maintenant une tutelle administrative du ministre en charge de la Communication.
Elle précise que les textes de loi régissant les médias sont lacunaires, inadaptés et non diffusés. « Le statut est ambigu et sa composition est peu crédible auprès du public, des médias et des partenaires », déplore Mme Barancira. Elle a constaté également, au sein du CNC, une faible capacité organisationnelle des membres en matière de régulation ; un équipement obsolète ; un manque de visibilité et l’absence de stratégie de communication sur ses missions et une insuffisance de moyens.
Le Conseil Economique et Social limité
Quant au CES, la consultante indique qu’il est limité à la seule mission d´expertise et non pas à celle de représentation des intérêts des catégories socio professionnelles. « Dans les textes le régissant, nous avons remarqué une absence de dispositions relatives à ses moyens; une absence totale de procédure de saisine des organes ; une substitution inacceptable du Règlement d´ordre intérieur à la loi, particulièrement au niveau du statut et des moyens du Conseil ; des lacunes dans les dispositions relatives au statut des membres », déplore la consultante.
De plus le rapport montre que les textes régissant le CES sont lacunaires, qu´il y a un manque de volonté politique de recourir à son expertise et de garantir au CES les moyens nécessaires à son fonctionnement. « Le CES manque de visibilité et ses membres sont indisponibles et démotivés », regrette-t-elle.
Le Conseil National de Sécurité n’existe que de nom
Bien qu´il soit encore au stade d´organisation, le CNS est en fonction depuis la nomination de ses membres, en novembre 2008. Selon Mme Barancira Domitille, il est difficile de faire le bilan d´un organe dont certaines activités ne peuvent, par leur nature, être rendues publiques. Le rapport constate l´inexistence de dispositions essentielles sur son organisation et son fonctionnement ; l´absence de textes induisant celle de structures et de la mémoire institutionnelle ; l’élargissement des missions constitutionnelles du CNS ; le caractère secret de certaines de ses délibérations le conduit à ne rendre publiques que des informations distillées ; etc.
Pour la consultante, il est difficile de le qualifier d’organe consultatif lorsqu’il est composé de décideurs politiques, du plus haut niveau (le président de la République, les premier et deuxième vice-présidents ; les ministres en charge de la Sécurité Publique, de l´Intérieur, des Relations Extérieures, de la Défense Nationale et de la Justice), dont les avis sont des décisions. Les membres du CNS sont au nombre de 17. Les autres sont choisis en tenant compte des diverses composantes de la population et de leurs qualités morales.
Mme Barancira fait savoir que tous ces conseils sont méconnus du public. Il ne les découvre que par les quelques communiqués laconiques radiodiffusés à l´issue de la tenue des séances du CNS, ou lors de certaines sorties médiatiques du président du CNC annonçant des mesures prises par l´institution à l´endroit d´un médium donné. « C´est une des raisons pour lesquelles le citoyen ordinaire n´a pas beaucoup d’attentes d´un organe dont il ignore l´existence. »
Les Conseils nationaux en place ont une courte expérience. L’analyse de leur fonctionnement révèle des résultats très mitigés par rapport à ceux escomptés.
La consultante recommande au gouvernement d’actualiser les textes régissant les Conseils nationaux pour corriger les lacunes relevées ; de mettre en place les Conseils nationaux encore inexistants ; de les doter de moyens de travail pour les rendre opérationnels et visibles; de rendre publics leurs rapports dans un souci de culture de la transparence et de la redevabilité.