Vendredi 22 novembre 2024

Editorial

L’interdiction de Sapor fait débat

19/07/2024 7

Le chef est une figure singulière dans notre société. Son autorité est principalement exercée par la parole – Ijambo. Dans notre tradition, la parole est respectée, et celle du chef, en particulier celle du Chef de l’Etat, est presque sacrée. Elle incarne le pouvoir, l’autorité et le commandement.

Sapor wine, une boisson à forte teneur en alcool, a rapidement gagné en popularité, malgré ses effets néfastes. Produit vendu à seulement 2 000 francs, il séduit toutes les couches sociales et se consomme sans modération. Les parents, les confessions religieuses, les médias et la société civile ont exprimé leurs préoccupations quant à ses répercussions sur la santé publique. Pourtant, l’administration semblait avoir d’autres priorités.

Par Léandre Sikuyavuga
Directeur du groupe de presse Iwacu

Lors de la tournée de la caravane « Inkebuzo » à Kayanza, le Chef de l’Etat a fermement exhorté les gouverneurs à s’attaquer à ce « poison qui constitue un frein pour atteindre la vision 2040 ». Les réactions furent immédiates et les gouverneurs de Kirundo, Makamba, Mwaro ainsi que le maire de Bujumbura ont publié des communiqués annonçant la suspension de la vente de Sapor wine. Le Bureau burundais de normalisation a suivi en ordonnant l’arrêt de sa production et commercialisation.

Cependant, plusieurs questions émergent quant à cette interdiction. Le producteur de Sapor wine ne possédait-il pas un permis de production ? Si ce permis existait, c’est qu’il remplissait les exigences nécessaires pour obtenir cette licence. Sinon, ceux qui ont délivré ce permis devraient être tenus responsables. De plus, que faire des commerçants qui avaient des stocks de Sapor dans leurs magasins ou boutiques ? Cette interdiction soudaine soulève également des préoccupations sur le climat des affaires au Burundi. Le pays offre-t-il un environnement propice aux investisseurs ?

Il est indéniable que les boissons alcoolisées causent des ravages tant en milieu urbain qu’en milieu rural, perturbant les familles et la société. Les buveurs aux revenus modestes optent souvent pour des liqueurs bon marché mais nocives. Cependant, les mesures prises contre Sapor sont perçues comme brutales, répressives et sans fondement légal, enfreignant potentiellement les droits des Burundais.

L’Etat, garant de l’ordre public, se doit certes d’intervenir pour protéger la population. Toutefois, cette dernière se sent mise devant le fait accompli. Les citoyens auraient dû être davantage sensibilisés et éduqués sur les dangers de ce produit et les avantages liés à son interdiction. Cette approche inclusive aurait permis de favoriser l’adhésion à la décision.

En outre, d’autres boissons avec des teneurs en alcool plus élevées que Sapor continuent d’inonder le marché. Faudra-t-il attendre une nouvelle intervention du Chef pour que l’administration prenne des mesures similaires contre ces produits ?

Forum des lecteurs d'Iwacu

7 réactions
  1. Hehe

    Demander n’importe qui, quelle est la plus grande société au Burundi ? Tout le monde la connait, par ce qu’elle est la plus importante pour toute la population burundaise. Pourtant les produits qu’elle produits ne sont pas de première nécessité mais dans notre mentalité ils le sont déjà. Ngurira rimwe, ngurira agafanta, ce sont les maîtres mots qu’on répète constamment. Je me demande si les patrons prendraient un jour d’arrêter la production de ces produits, le jour même de l’annonce il y aurait un soulèvement populaire que personne ne serait en mesure d’arrêter.

    Que voulons-nous, dans un pays où le produit de luxe est aimé par tout le monde. Depuis le riche jusqu’au plus pauvre, de plus âgé jusqu’au mineur. Imagine une communauté qui ridiculise quelqu’un parce qu’il ne boit pas d’alcool ?

    Alors croyez-vous qu’un ministre aurait-il le pouvoir de prendre un tel risque si ce n’est le N0.1.

  2. Kurubone Jean

    Il sera difficile d’éradiquer ces boissons alcoolisées. D’abord, qui sont les patrons de ces unités de production? Y a-t-il un citoyen lambda qui peut se hasarder? Où va-t-il trouver le sucre qui se raréfie dans le marchés? C’est du mafia

  3. voltaire kaziri

    Question de fonds: Nous ne sommes pas dans la jumgle. Il doit y avoir des lois au Burundi.
    Il y aune procedure qu on devait suivre pour retirer une autorisation a une entreprise agrée.
    L organe competent devait suspendre la production et le justifier.
    Mais on ne fonctionne pas comme cela au Burundi

  4. Mbariza

    Pitié pour le chef de notre Etat ? Où était le ministre de la santé ? N’était-il pas au courant des ravages pour engager des spots préventifs ?
    Si le chef de l’Etat n’est pas épaulé, il risque de prendre des mesures ne tenant pas compte des environnements économiques…et on dira qu’il a tord. Son excellence M. Le Président, N’y a-t-il pas des gens compétents à nommer ?

    • Jean Pierre Hakizimana

      Il faut une personne compétente pour en connaître une! Un jour les Burundais comprendrons pourquoi mélanger les croyances religieuses & La politique est dangereux pour l’économie!

    • murisho

      Le president a t il convoque les 2 ministres: Commerce et Justice.
      Que leur a t il dit. qu ont ils repondu

      • Jean Pierre Hakizimana

        @Murisho, je pense qu’il faut ajouter le ministre de la Santé à la liste car il parait, je ne sais pas comment, il parait que ce produit est nuisible à la santé.

        Ce weekend j’ai pu discuter avec une personne au Burundi concernant ce produit. Parait-il que personne ne sait ce qui se trouve dans cette boisson car la consommation d’une seule bouteille est capable de mettre à genoux une personne qui a l’habitude de descendre quelques bouteilles du Primus! Si quelqu’un peut nous confirmer ceci svp!

        Incroyable! Rien n’est jamais facile dans le pays de Mwezi Gisabo! J’ai du mal à croire que le fabricant dirait que c’est 16% (Taux d’alcohol) alors qu’il s’agit de ..disons « 40% » car il vendrait à perte, deja qu’il est moins chère (2000FBU) qu’un Coca Cola!

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