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Ligala : de la futilité à la dépendance

04/12/2014 5

C’est aux temps forts de la crise que les ligalas, ces lieux de rencontre des jeunes désœuvrés dans les quartiers, se généralisent. Peu recommandables parce qu’on y fume, ces endroits finissent par représenter des coins de perdition.

Un des ligalas de la capitale ©Iwacu
Un des ligalas de la capitale ©Iwacu

«Tout le monde sait ce qu’est un ligala ! Comment peut-on discuter dans Buja sans former un ligala ? », s’étonne un adolescent de Kanyosha. « On va surtout y piocher de l’humour, des trucs insolites, les potins du quartier…», raconte un des membres d’un ligala de Ngagara.

Plusieurs sources interrogées s’accordent pour dire que le terme ligala est tiré de la chanson « legalise marijuana » (« légaliser le chanvre ») de Peter Tosh, chanteur jamaïcain de reggae. Cependant, les jeunes citadins ont démocratisé le concept pour en faire un lieu propice à la rencontre et à la discussion futile.

Cette forme de socialisation s’observe à n’importe quelle heure, n’importe où dans la capitale. « Le matin, on se retrouve au centre-ville pour tailler une bavette », lance un jeune homme rencontré à l’endroit communément appelé Bata.

Le soir, dans les quartiers, c’est un ligala qui prendra plusieurs heures de partage de tout et de rien, parfois avec une bonne dose de « mousse » (drogue). Au coin d’une rue, des sujets politiques, sportifs, culturels et surtout sexuels sont au menu.

Des conséquences fâcheuses ne manquent pas. « Certains deviennent accros aux drogues douces par l’influence des autres membres du ligala. On peut même sécher les cours pour aller au ligala », assure un jeune homme de Ngagara. Et d’ajouter que même après l’abandon du ligala, c’est très difficile, pour ces aficionados, de regagner la confiance de leurs parents et proches. « Si je passe une journée sans me rendre au ligala, je ne me sens pas dans mon assiette », confie un autre.

« On y apprend tout sauf …l’essentiel »

« Le ligala était un lieu où les jeunes se rencontraient souvent pour discuter de tout et de rien, et ce dans un contexte social marqué par l’absence des lieux de distraction. Le phénomène a explosé avec la crise, mais aussi avec le dysfonctionnement du système scolaire burundais qui a occasionné la rallonge du temps des vacances », affirme le sociologue Désiré Manirakiza.

Pour lui, le ligala est devenu le symbole d’une jeunesse en panne d’inspiration, le lieu où on apprend tout sauf l’essentiel. En substance, il soutient que le ligala est devenu le cadre de dépravation des mœurs à travers certains phénomènes, comme la consommation de stupéfiants, le harcèlement de rue et la socialisation à la violence. Et de conclure : « C’est le cadre de fabrication d’individus émasculés qui ne peuvent malheureusement pas apporter une valeur ajoutée à l’édifice du pays. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. Mugunza

    L’article est vrai mais à quelle entité sociale s’adresse-t-il au juste? Aux jeunes? Ils n’ont aucune solution. Aux administratifs? Ils ont d’autres chats à fouetter! Aux élus? Ils peuvent utiliser ces ligalas pour les voix…à qui finalement? Aux parents? Ils peuvent essayer mais ils sont souvent impuissants! Ont-ils des alternatives d’occupation et de loisir? Trouvent-ils un autre moyen utile d’occupation?

    Est-ce que la jeunesse voit clair à l’horizon…pour chercher mieux? Casse-tête pour beaucoup!

    Trouvez un truc messieurs dames journalistes pour tourner la situation au bien de la société!

  2. Pourquoi ces jeunes de Ngagara s’insurgent contre l’auteur de ce documentaire? Quelques fois la verite est une pillule amere!

  3. Stan Siyomana

    « …LES LIGALAS, ces lieux de rencontre de jeunes desoeuvres… »
    1. Le BEAU PAYS DE MWEZI GISABO est cite parmi les 40 pays d’Afrique subsaharienne qui sont aux premieres etapes pour jouir de la « DIVIDENDE DEMOGRAPHIQUE ».
    Si (tous?) les pays de l’Afrique subsaharienne mettaient assez de ressources pour developper l’immense capital humain que represente LEUR JEUNESSE/make the right investments in human and social capital for youth development, il en resulterait des dividendes demographiques d’AU MOINS 500 MILLIARDS DE DOLLARS AMERICAINS PAR AN (OU UN TIER DE L’ACTUEL PRODUIT INTERIEUR BRUT (PIB) DE CES PAYS) POUR UNE PERIODE DE 30 ANS.
    (Voir United Nations Fund for Population Activities (UNFPA): « State of World population 2014. Fact sheet- Youth in Sub-Saharan Africa, http://www.unfpa.org).
    2. Le titre-meme du rapport annuel (2014) de l’agence onusienne UNFPA interpelle TOUS LES GOUVERNEMENTS DU MONDE quant a l’importance de la jeunesse dans la societe: « THE POWER OF 1.8 BILLION adolescents, youth and the transformation of the future. UNFPA state of World population 2014 », [pdf] http://www.unfpa.org, 136 pages.
    3. EN L’ABSENCE D’UNE POLITIQUE DE LA JEUNESSE AU BURUNDI, LE SIMPLE OCTROI DE CARTE NATIONALE D’IDENTITE (EN CETTE PERIODE PRE-ELECTORALE) NE CHANGERA PAS LA CONDITION SOCIO-ECONOMIQUE DE LA JEUNESSE DES LIGALAS (QUI N’A MEME PAS PU ETRE RECRUTEE POUR INSCRIRE LES ELECTEURS POTENTIELS).
    Merci.

  4. Vandur

    Ces trucs sur les oreilles signifient quoi finalement, un en porte deux et l’autre semble porter un seul. Jeune homme ou jeune femme? Perdu tout de meme!

  5. GAKWAVU Tite

    Les hétérotopies,les contre-espaces(cfr Foucault) sont partout et les habitudes qu’on y inculque sont de l’ordre etabli ou dissidentes. La société, si l’on l’examine a la loupe l’ordre en pâtirait. les philosophes des sciences en savent quelque chose.

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