Les habitants de Rugombo dénoncent une incarcération illégale et dégradante des personnes dans un container durant un mois. La Fenadeb demande des sanctions. La police et l’administration réfutent.
Les faits remontent à février 2017. Douze des vingt-cinq détenus parviennent à s’enfuir en démolissant la porte du cachot de Rugombo. Stupeur totale. L’administration et la police locale décident de mettre les treize autres – parmi lesquels des mineurs -, dans un container de 8 mètres sur 3 avec une seule fenêtre. Selon les habitants de Rugombo interrogés, ce container servait d’entrepôt pour les armes et autres effets des policiers.
Dans la foulée, huit autres personnes y sont incarcérées. Les conditions y sont terribles soutient un jeune homme qui y a passé une semaine. « Il y fait très chaud le jour et très froid la nuit. » Pire, raconte notre source, les policiers ne laissaient que deux heures de répit par jour aux détenus. Finalement ces détenus ont été transférés à Cibitoke après inspection du parquet. Un défenseur des droits de l’Homme à Cibitoke dénonce cette situation affirmant que le lieu ne remplit absolument pas les conditions d’une maison de détention.
Des mineurs parmi les prévenus du container
Selon le président de la Fédération nationale des associations engagées dans le domaine de l’enfance au Burundi (Fenadeb), Jacques Nshimirimana, il y avait des mineurs parmi ces personnes emprisonnées dans un container. «Ils étaient emprisonnés avec des adultes et vivaient dans des conditions déplorables.» Jacques Nshimirimana fait savoir que trois garçons avaient été arrêtés pour vagabondage car ils étaient des enfants de la rue. Un autre était poursuivi pour un autre délit. Le président de la Fenadeb fait savoir que son organisation a informé le gouverneur de la province Cibitoke qui a ordonné, par la suite, leur libération dans la soirée du 4 mars 2017. «Un container n’est pas un lieu de détention. Nous considérons cela comme un crime. De plus, les relâcher ne veut pas dire qu’il y a réparation du préjudice causé à ces enfants.»
M. Nshimirimana observe que cette pratique commence à être une habitude car cela s’est passé à Karusi et à Mwaro. Pour lui, ne pas punir les responsables fait que les autres considèrent cette pratique comme normale. « Si cette situation se présente encore une fois, nous allons traduire en justice le responsable. C’est une mise en garde.»
Jacques Nshimirimana déplore la solidarité négative entre le ministère public et la police. «Normalement, le ministère public devrait se saisir d’office pour violation de procédure pénale.» Pour le président de la Fenadeb, il faut un renforcement des capacités pour les administrateurs communaux et les officiers de la police judiciaire (OPJ) sur la procédure pénale et les droits de l’enfant. «Il a été constaté que c’est cette catégorie qui commet la plupart des erreurs irréparables.»
Contactée, Béatrice Kaderi, administrateur communal de Rugombo, parle d’informations mensongères : « Ce container existe, mais personne n’y a été détenu. » Elle signale que le cachot est en train d’être réhabilité. Et de conclure : « Tous les détenus, dont il s’avère nécessaire de confectionner des dossiers, sont envoyés au cachot du chef-lieu de la province Cibitoke, à moins de 3 km de Rugombo. »
Même son de cloche chez Pierre Nkurikiye, porte-parole de la police : « Pourquoi enfermerait-on des gens dans un container alors que nous avons un cachot flambant neuf construit à Cibitoke qui remplit les normes d’un lieu de détention. »