Vendredi 22 novembre 2024

Environnement

«L’habitat des oiseaux est aujourd’hui fortement menacé au Burundi»

22/10/2019 Commentaires fermés sur «L’habitat des oiseaux est aujourd’hui fortement menacé au Burundi»
«L’habitat des oiseaux est aujourd’hui fortement menacé au Burundi»
Arsène Manirambona

C’est le cri d’alarme qu’a lancé Arsène Manirambona, ornithologue et président de l’Association burundaise pour la Protection de la Nature (ABN) au cours d’un entretien accordé à Iwacu ce lundi 21 octobre 2019 au lendemain de la célébration nationale par cette association de la Journée Mondiale des Oiseaux migrateurs.

Quel est l’intérêt d’une journée dédiée aux oiseaux migrateurs?

Les oiseaux migrateurs font partie des êtres vivants qui servent d’indicateurs d’une bonne ou mauvaise santé environnementale. Quand ils quittent leur milieu d’origine vers des destinations lointaines, ils font face à de nombreux obstacles qui, parfois, conduisent à leur mort. L’importance de cette journée est donc de mettre en valeur et éveiller les consciences à la protection de tels êtres vivants qui nous sont chers.

Justement, quelle est l’importance des oiseaux migrateurs au Burundi?

Ils sont importants pour plusieurs raisons. D’abord, en termes socio-économiques, ces oiseaux ramènent des touristes dans le pays à travers ce qu’on appelle «un tourisme de niche» qui cible une catégorie d’êtres vivants à visiter, ici en l’occurrence les oiseaux migrateurs, ce qui contribue au développement économique. Ils sont aussi une manne précieuse pour les chercheurs sur place qui travaillent sur ces sujets-là quant à connaître l’énergie calorifique qu’ils consomment lors de la traversée des mers et océans, leur capacité à s’orienter, etc.

Cette journée pour cette année était placée sous le thème:«Sois la solution à la pollution plastique». En quoi le plastique est-il nuisible aux oiseaux migrateurs?

Le plastique est nuisible à tous les êtres vivants. Pour les oiseaux migrateurs, il l’est par le biais notamment des sachets en plastique déversés dans les lacs et rivières. L’accumulation de ces sachets empêche les oiseaux de se baigner tranquillement, certains pouvant être pris au piège dans ces sachets et mourir asphyxiés. Aussi, ces sachets étant de composition chimique, lâchent des substances toxiques dans l’eau qui sont un danger mortel pour les animaux aquatiques en général et bien sûr pour les oiseaux aquatiques migrateurs en particulier.

D’après des spécialistes, les oiseaux seraient menacés à l’échelle mondiale. Quel est l’état des lieux au Burundi?

Ici aussi, on observe le même phénomène. Certains types d’oiseaux qu’on voyait dans le temps ont disparu et d’autres sont devenus assez rares……….

Lesquels par exemple?

Prenons la Grue Royale (Umusambi). Ce type d’oiseau vit souvent dans les zones humides comme les marées qui sont menacées par l’extension des terres cultivables. L’autre facteur d’extinction de ce type d’oiseau est lié à sa beauté qui suscite la convoitise des hôtels de luxe et des particuliers fortunés qui les attrapent pour servir de joyau d’attraction pour les premiers et de joujou à domicile pour les seconds. Nos forêts abritaient également dans le passé des populations de rapaces qui ont totalement déserté ces lieux suite à la surpopulation qui a entraîné l’exploitation anarchique de ces forêts.

Aussi, le Bec en sabot qui, jusque dans les années 1980, peuplait les marées de la Malagarazi, a disparu du côté burundais pour se réfugier du côté tanzanien où son espace naturel est mieux conservé.

Quid du braconnage ?

En dépit d’une loi qui interdit la chasse au Burundi, le braconnage continue à être pratiqué d’après nos constats sur terrain. Certains oiseaux sont tués pour être consommés et d’autres le sont pour servir d’usage dans la médecine traditionnelle.

Quel est l’état actuel de préservation des lacs du nord du pays communément connus pour abriter une population importante d’oiseaux migrateurs?

Malgré les efforts des associations de protection de l’environnement, des administrateurs locaux et même des services techniques du ministère de l’Environnement, ces écosystèmes restent menacés par le déboisement avec l’extension des terres cultivables qui a détruit les zones tampons au bord des lacs, la surpêche, bref, tout ce qui faisait de ces endroits un espace privilégié pour les oiseaux migrateurs. Mais je tiens quand même à saluer le travail mené par de simples citoyens qui se démènent en vue de reboiser les zones tampons, recréer des zones de frayeur pour les poissons et reconstituer ainsi un cadre magique pour attirer à nouveau les oiseaux migrateurs.

Quel rôle peuvent jouer les autorités dans la protection de différentes espèces d’oiseaux?

La loi qui interdit le braconnage doit être scrupuleusement respectée et amener à des sanctions sévères à l’encontre de ses contrevenants. L’Etat doit aussi appliquer les conventions internationales de protection de la biodiversité qu’il a ratifiées comme la CITES qui interdit la commercialisation des espèces en danger. Les administratifs à la base doivent également être sensibilisés à la question environnementale, car souvent, quand nous leur expliquons qu’il y a un danger lié à l’extension des zones cultivables (qui portent souvent atteinte aux espaces naturels protégés), ils font la sourde oreille.

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