<doc516|right>Au moment où j’écris ces lignes, personne ne sait dans quel état tu te trouves. Battu ? Torturé ? Affamé ? Tout est possible. Il paraît que personne ne peut te voir, ont décrété « ceux qui ont le pouvoir ». Ce soir encore, Fatuma, ton épouse, et Milka, ta petite fille de deux ans, ne verront pas leur papa rentrer de radio Bonesha. Ce soir, ce général et ce cadre du service des renseignements qui harcelait le directeur de la radio, passeront eux une belle soirée, puis rentreront heureux, retrouver femmes et enfants, puis dormiront dans des draps propres. Toi, tu seras couché sur une planche, dans un cachot humide de Cankuzo. Mais ça ne les empêchera pas de dormir. Quel crime as-tu commis ? Parler avec des « rebelles » ? Mais, vois-tu, Hassan, je ne dis pas que tu ne pouvais pas être arrêté. Tu es journaliste, certes, mais avant tout, tu es citoyen. Mais j’aurais aimé que tes droits soient garantis, que tu sois traité avec humanité. Cette humanité que nous venons de perdre encore à Kiremba, en assassinant ceux qui étaient venus aider les plus pauvres d’entre nous. En ce moment, les dépouilles mortelles de sœur Lucrezia et Francesco Bazzani sont arrivées au pays. Ils nous ont envoyé deux bienfaiteurs, nous leur renvoyons deux corps sans vie… Je n’ai qu’un mot pour les leurs : pardon ! Que te dire de plus Hassan ? De tenir bon. Nous sommes avec toi. Nous lutterons pour que tu puisses avoir un procès équitable. C’est notre façon de résister.