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Les violences faites aux femmes freinent l’économie

05/05/2013 Commentaires fermés sur Les violences faites aux femmes freinent l’économie

Démoralisées, déprimées, les unes n’ont plus la force de vaquer à leurs activités. Tandis que d’autres sont chassées ou empêchées de travailler par leurs familles. Et tous les pays de l’EAC sont concernés.

<doc1832|left>Allongée sur un lit dans le centre de santé dit « Munezero » de la commune Kamenge, son visage est gonflé. Elle peut à peine ouvrir sa bouche pour parler, son état est critique. Francine Niyonikundira, jeune femme résidant à Kamenge a été tabassée par son mari. C’était dans la soirée de lundi 24 octobre 2011. Son mari l’a d’abord enfermée dans une petite pièce pour ensuite la frapper à l’aide d’un tabouret. « Mes trois enfants étaient tous présents, ils ont eu peur que leur papa ne me tue. Ils seront à jamais traumatisés. » Cette jeune femme affirme qu’a chaque dispute ou mésentente, son mari la bat, il y a de cela plusieurs années.

Selon Francine Niyonikundira, l’idée de le quitter et de refaire sa vie, la hante tant. Désormais, en quittant l’hôpital, elle ira vivre chez ses parents : « Trop c’est trop! Je n’en peux plus. » Mais hélas, elle a peur de perdre ses enfants et de ne plus faire son petit commerce. Elle et son mari tiennent un magasin de quincaillerie au marché central de Bujumbura. D’après elle, ils se sont rencontrés, à l’époque où chacun  faisait le même commerce. Une fois fiancés, ils ont décidé de tout mettre ensemble et continuer le même business. « Si je le quitte, je renonce à ma part. Ce qui est impossible. Je ne peux pas tout recommencer à zéros puisque je n’ai même pas de capital. Mais la décision est déjà prise », s’insurge-t-elle. Le cœur déchiré, elle est persuadée que son mari va s’approprier de leurs biens. C’est pourquoi, Francine Niyonikundira demande que justice soit faite.

Elles ne peuvent plus travailler

Consolate Nahimana, une jeune femme célibataire, résidant à Ruziba a été violée par deux inconnus, il y a quatre ans. Quelques jours après ce viol, elle s’est retrouvée enceinte. Cultivatrice et habitant avec ses parents, ces derniers l’ont chassée de la maison lorsqu’ils l’ont su. « N’ayant nulle part où aller, j’ai passé plusieurs années à errer dans les rues de Bujumbura sans trouver quelqu’un qui pouvait m’héberger. » D’après elle, être victime de violences sexuelles est une situation traumatisante. Parents, maris et proches te rejettent. Plus grave encore, parfois, on ne te laisse même plus travailler.

<doc1831|right>Bien que ses parents se soient décidés de la faire revenir à la maison, elle n’a plus le droit de travailler dans leurs champs. N’ayant aucune autre source de revenus, Consolate Nahimana affirme avoir du mal à subvenir aux besoins de son enfant. Cependant même l’entourage la prend comme quelqu’un sans moralité. «  Personne ne veut m’embaucher, même pour des petits travaux  », souligne-t-elle.

Quant à Espérance Ntancuti, cultivatrice, une jeune femme mariée et mère de trois enfants, elle a été violée par des bandits venus dévaliser chez elle en pleine nuit, il y a quatre ans. Ce jour- là, raconte-t-elle, mon mari s’était rendu à Mwaro chez ses parents : « Je lui ai tout révélé, mais il ne m’a jamais cru. » Traumatisée, elle raconte qu’elle ne pouvait plus vaquer à ses activités quotidiennes : « C’était comme si la terre m’était tombée dessus. La nuit, je faisais des cauchemars. Pendant la journée, j’étais incapable d’aller cultiver dans les champs. » Pour Espérance Ntancuti, des femmes qui subissent des violences sont sans valeur et démoralisées aux yeux de la société.

Selon cette victime, son mari  lui refuse presque tout (la ration alimentaire, le fait de cultiver dans les champs etc.) A la limite, il lui donne cinq cents francs par jour comme ration.

La plupart des victimes sont démunies

D’après Marie-Claire Kezakimana, assistante sociale à l’Association pour la Défense des Droits de la Femme (ADDF) à Bujumbura, la plupart d’entre ces femmes sont démunies car ce sont leurs maris qui apportent de l’argent dans le ménage. Pour les victimes des violences conjugales, les conjoints profitent ainsi de leur dépendance économique en les rendant la vie impossible. Elle estime qu’elles devraient saisir la justice. Malheureusement, un grand nombre d’entre elles est peu informé sur leurs droits, ce qui constitue un grand défi.

Par ailleurs, déplore-t-elle, même celles dont les maris sont emprisonnés à cause de cela, reviennent sur leurs décisions en demandant qu’ils soient relâchés de peur de mourir de faim.
Concernant les victimes des violences sexuelles, Josiane Yvette Kamariza, psychologue au centre Seruka explique : « En général, les victimes se sentent coupables, rejetées et angoissées. » Cette situation les amène souvent à la dépression. Ainsi, pour qu’elles puissent un jour se rétablir et guérir de leurs traumatismes, un bon suivi est nécessaire. Selon le degré de traumatisme, le rétablissement peut prendre six mois, voire plus.

« Dans notre centre, nous accueillons des victimes qui ne veulent plus retourner chez elles, qui préfèrent rester enfermée », souligne-t-elle. La psychologue fait savoir que la réintégration familiale peut les aider psychologiquement. Par conséquent, ceci leur permet d’avoir la force et la morale afin de continuer à vaquer à leurs activités.

<doc1835|left>Ces violences influent sur le rendement

Selon Fabien Ngendakuriyo, économiste, la santé saine tant physique que mentale intervient pour avoir une meilleure production. Une récente étude, poursuit-il, réalisée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), révèle que 15 à 70´% des femmes au Burundi ont déclaré avoir subi des violences. C’est un chiffre non négligeable, dans la mesure où cette situation influe négativement sur la production du pays et de la famille. La société se chargera finalement de les prendre en charge. Alors que les femmes en général sont plus productives. Ceci constitue un obstacle au développement.
Ce docteur en économie fait également remarquer qu’il n’y a pas d’études d’envergure dans ce domaine : on ne se contente que de simples commentaires. De plus, les gens ne se limitent que sur les impacts de ces violences au niveau de la santé. Fabien Ngendakuriyo recommande de faire beaucoup plus de recherches dans ce domaine : « Elles pourront donner des indicateurs sur la gravité du phénomène au point de vue économique. »

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