Jeudi 16 janvier 2025

Culture

Les tambourinaires burundais pas assez valorisés

16/01/2025 0
Les tambourinaires burundais pas assez valorisés
Un tambourinaire en train de s'exhiber

La 8e Édition de la semaine dédiée à la danse emblématique du tambour burundais s’est déroulée au Cercle hippique dans la mairie de Bujumbura du 10 au 12 décembre 2024. Cet évènement a été préparé par le ministère en charge de la culture. Une compétition a été organisée à cet effet. Trente-trois troupes y ont participé. La première équipe a reçu une enveloppe de 1 million de francs burundais. Des tambourinaires burundais se plaignent. Ils disent que non seulement ils sont considérés comme des citoyens de seconde zone mais aussi, ils trouvent cette somme dérisoire. Selon eux, ces prix ne contribuent pas à la valorisation de l’art des tambourinaires burundais. En effet, les efforts physiques et financiers investis pour pratiquer cet art sont énormes.

Le tambour burundais est un élément important de la culture burundaise. Du temps de la monarchie, il annonçait les grands évènements tels que les intronisations, les funérailles des souverains ou encore les fêtes de semailles du sorgho au mois de décembre de chaque année. Malgré cela, ceux qui pratiquent cet art ancestral ne sont pas traités à leur juste valeur.

Un tambourinaire témoigne qu’ils ne sont pas suffisamment valorisés et cela se reflète dans la manière dont ils sont traités lors de leurs exhibitions ou des cérémonies officielles. « Notre travail est mal payé alors que notre art fait partie intégrante de l’identité culturelle du pays. », se plaint-il. Il fait en outre savoir qu’ils sont parfois considérés comme des participants secondaires malgré l’importance de leur rôle.

« Nous voulons être traités avec respect et recevoir la même considération que les autres professionnels », clame ce tambourinaire. Il trouve qu’il est regrettable de recevoir une rémunération ne correspondant pas aux efforts qu’ils fournissent. « Notre art et notre engagement méritent une valorisation conséquente. », ajoute-t-il.

Selon Richard Batungwanayo, chef de service de la culture au ministère en charge de la culture, la culture n’est pas une priorité au Burundi. « On se bat encore pour faire valoriser la culture burundaise. Le business culturel n’est pas une réalité au Burundi », mentionne-t-il

Des prix dérisoires

Certains tambourinaires trouvent les prix offerts dérisoires. Lors de la dernière édition du tambour burundais, les cinq premiers groupes ont reçu par exemple des prix oscillant entre 1 million et 500 mille FBu. Du 6e groupe au 18e, une enveloppe de participation de 300 mille Fbu a été offerte à chaque groupe. Le reste jusqu’au 33e groupe a eu 200 mille Fbu chacun.

Selon un tambourinaire ayant participé dans cet évènement, la somme de 100 .000 Fbu est loin d’être proportionnelle aux efforts physiques et aux investissements qu’ils fournissent en tant que tambourinaires. « Une telle somme ne représente même pas 10 % de ce que nous méritons. En réalité, 1 000 000 Fbu ne suffit même pas pour couvrir les frais de déplacement actuels. Cela est sans parler des coûts liés à l’organisation et à la préparation des performances. », fait-il observer. Il ajoute que cette somme ignore totalement l’énorme travail, le temps et l’énergie qu’ils investissent pendant leurs répétitions régulières.

Un tambourinaire donne un aperçu des dépenses durant les entrainements pour cette compétition. « Premièrement, on procède à la réparation des tambours. Cela coûte 2 500 000 Fbu minimum, car, il y a ceux sur lesquels on tend la peau. On achète donc de nouvelles peaux à 33 000 Fbu le kg et on paie la main d’œuvre pour ce travail, Ensuite, l’achat de nouvelles tenues nous coûte 3 millions de francs burundais à raison de 200 000 Fbu par personne. Nous sommes un groupe de 15 personnes exigés pour la compétition. Les ornements qu’on porte sur la tête, autour du cou et sur les bras coûtent 120 000 francs burundais et la tenue 80 000 Fbu par personne. On prête une grande attention aux tenues, car cela fait partie des éléments sur lesquels le jury se base pour nous coter. », raconte-t-il.

Il mentionne aussi les frais de transport pour aller sur les lieux de répétition pendant une durée de 30 jours pour 15 personnes qui coûtent 1 080 000 Fbu le mois, à raison de 2 400 Fbu par jour et par personne. Il ajoute que dans ce calcul des dépenses, il n’inclut pas le prix de la nourriture et des boissons consommées ainsi que la force physique fournie durant ces répétitions.

Tout est fonction du budget

Face à ces plaintes, Richard Batungwanayo fait savoir qu’ils donnent les prix en fonction du budget qu’on a octroyé au ministère ayant en charge la culture. Ils aimeraient faire beaucoup plus mais, le budget ne le leur permet pas. « On est bien conscient des sacrifices consentis dans la pratique de cet art. On n’a pas reçu la totalité du budget qu’on avait demandé. Il a été revu à la moitié. », précise-t-il.

Il souligne que le but de cet évènement en grande partie est de mettre plusieurs équipes en compétition. « Le fer aiguise le fer. Ces équipes en contact les unes avec les autres constatent leurs faiblesses et s’appliquent à s’améliorer pour une plus grande performance dans la pratique de cet art. Cela a permis l’émergence des talents sur tout le territoire national burundais. », narre-t-il

Absence de transparence

Les tambourinaires se plaignent également que pour cette 8e édition, les prix n’étaient pas mentionnés à l’avance. Un des participants témoigne que « personne ne nous informe à l’avance du prix que nous allons recevoir après les compétitions, Ce qui est vraiment regrettable. Il s’agit d’une pratique qui crée beaucoup d’incertitude et de frustration parmi les participants. », souligne-t-il.

Il s’imagine que les organisateurs ont peur qu’en communiquant le montant du prix à l’avance, la somme médiocre découragerait les participants. Mais, il ajoute qu’il est essentiel de savoir à quoi s’attendre pour pouvoir prendre des décisions éclairées. En effet, l’absence de transparence sur ce point nuit à la valorisation de leur travail et de leur engagement.

Selon Richard Batungwanayo, ne pas annoncer les prix à l’avance n’est pas de la mauvaise volonté. En effet, le 29 novembre 2024, le ministre en charge des finances avait annoncé une suspension des dépenses non prioritaires. « Le budget de cet évènement n’était pas encore approuvé. On était encore dans des négociations. On a dû bénéficier d’une dérogation spéciale pour organiser cet évènement. », précise-t-il.

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