Les soirées karaoké interdites à Bujumbura au-delà de 20 heures : les musiciens s’indignent

La circulaire envoyée à toutes les communes urbaines par le Maire de la ville de Bujumbura est tombée à la fin du mois dernier comme un couperet chez les musiciens ayant signé des contrats pour animer ces soirées appelées karaoké dans certains cabarets de la capitale. Ils parlent de chômage assuré.

« Quiconque voudra organiser de telles activités doit préalablement demander une autorisation à la Mairie de Bujumbura et se conformer aux exigences techniques en la matière notamment l’insonorisation des salles de dancing, celles qui ne le sont pas doivent être fermées immédiatement, de même, le karaoké est interdit au-delà de 20 heures », précise cette lettre ayant pour objet : dernier avertissement.
« Cette décision reste de stricte application. Le commissaire municipal de la police et les administrateurs communaux sont priés de veiller, chacun en ce qui le concerne, au respect de la présente note », ordonne le Maire de la ville de Bujumbura. Cette lettre circulaire a été adressée à la plupart des tenanciers de bar qui organisent des soirées karaoké.

« Les temps sont durs et l’heure est grave », lance Steven Sogo déçu tout en poussant un long soupir. « Qu’allons nous devenir ? »,  se demande ce musicien qui se produit chaque fin de semaine au bar, ’’La Tempête’’ à l’Avenue du Large.
Ce qui est bizarre, explique-t-il, c’est que la police, alléguant un tapage nocturne, peut débarquer et intimer l’ordre au musicien sur scène d’arrêter de chanter mais laisser la musique sur CD continuer même au-delà de 22 heures alors qu’il s’agit des mêmes décibels balancés.

Selon Roméo Nininahazwe du groupe ’’Etoile du Centre’’ et du trio ’’Amashiga’’, avec cette mesure, certains musiciens envisagent de quitter le pays pour s’établir dans la sous-région. « Ce risque est réel, puisqu’à Nairobi, Kampala, Kigali ou Dar es-Salaam, les musiciens se produisent jusqu’au petit matin », précise Jean Pierre Nimbona alias Kidumu qui évolue à Nairobi avec son groupe ’’Boda Boda’’. Il a lancé ce week-end la première édition de festival musical appelé ’’Summer Fest’’ sur ses propres frais. « De telles décisions d’interdire les soirées karaoké au-delà de 20 heures, ne sont pas de nature à encourager les jeunes talents», s’indigne ce musicien.

Selon Issa Jamal alias Yoya qui anime des soirées karaoké les week-end au bar ’’Chez Cyrille’’ à Kabondo, de telles mesures ne pénalisent pas seulement les musiciens mais aussi tous les services connexes qui vont souffrir : « C’était notre unique gagne-pain en attendant les redevances des droits d’auteurs pour nos chansons exploitées depuis des années sans contrepartie », s’insurge Roméo Nininahazwe du Groupe Etoile du Centre.
Pour Bobo de l’orchestre Peace & Love qui tient avec son groupe un bar-restaurant appelé ’’I Muhira Bar ’’ à Kigobe, c’est la déception totale : « C’est injuste pour la vie des chanteurs qui essaient de vivre de leur musique. »