L’émission « Club de la presse » a encore consacré une partie de l’émission au projet de loi sur la presse en cours de révision. Les professionnels des médias ont exprimé leur espoir de voir le Parlement mener des concertations avec eux sur ledit projet avant de le soumettre à la plénière pour analyse et adoption.
Athanase Ntiyanogeye, un vieux routier du métier de journaliste, se souvient qu’en 1992, déjà, il y a eu une mauvaise lecture de la loi sur la presse. Dans cette loi, on accordait un rôle consultatif au conseil national de la communication (CNC) alors que la constitution lui donnait le pouvoir de décision. On a corrigé cette lacune au niveau de la cour constitutionnelle. La loi sur la presse de 1997 contenait, quant à elle, beaucoup de sanctions. C’était à l’époque des médias de la haine et on pouvait comprendre la nécessité de sévir. La loi du 27 novembre 2003 est plus ou moins convenable. La protection des sources est garantie en une phrase dans la loi de 2003. Concernant le nouveau projet de loi, il considère qu’elle constitue un recul par rapport à la loi de 2003. « Le pouvoir qui est reconnu au CNC n’est pas judiciaire, mais administratif », souligne-t-il. C’est ainsi que les autorisations et les suspensions des publications reviennent de droit au CNC.
De l’avis de Jean François Bastin, un journaliste et formateur belge, il y a des reculs par rapport à la loi de 2003 qui n’est pas non plus parfaite : " J’ai quelques problèmes de compréhension par rapport à cette loi : les délits de presse, les limites à la liberté de la presse ou encore l’unité nationale. D’autres dispositions sont pertinentes comme le fait d’exiger de ne pas porter atteinte à la vie privée, ou encore le respect de la présomption d’innocence. Par contre, les délits de presse constituent une notion vague dans les deux lois. Il faudrait définir très clairement ce qu’est le délit de presse. Il faut des lois et des définitions très précises du délit de presse. Sinon, c’est la porte ouverte à tous les abus. D’un autre côté, nous avons des codes. Il faut les respecter. Nous devons donner un droit de réponse aux gens injustement citées. "
Pour Jérôme Niyonzima, ce qui est dérangeant, c’est qu’en 2011, à Gitega, les États généraux ont recommandé certains éléments à mettre en avant en cas de révision de la loi sur la presse. C’est, entre autres, la dépénalisation des délits de presse, le fonds des médias, l’accès aux sources d’information. La concertation avec les professionnels des médias a manqué alors que d’aucuns savent pertinemment que ce que vous faites pour moi sans moi, vous le faites contre moi. Le parlement ferait mieux d’inviter tous les partenaires en vue d’un consensus.
Palice Ndimurukundo, journaliste à la radio publique africaine (RPA), quant à lui, s’est dit carrément « très pessimiste » au sujet du sort qui attend les journalistes et les médias avec ce projet de loi : " Ce n’est pas la première fois qu’on fait des propositions à l’Assemblée nationale, mais sans résultat. On est dans un combat pour le contrôle du pouvoir ", analyse-t-il, avant de souligner que " l’objectif de ce projet de loi est de mieux contrôler les médias. "