Cette semaine, la capitale a dormi sous un déluge de coups de feu et de détonations de grenades dans certains coins de la capitale.
Des opérations de fouille-perquisition pour chercher des armes selon la police, des assassinats, d’après la population, parfois bloquée chez elle plus de 48 heures. Les quartiers les plus visés sont Jabe, Nyakabiga, Musaga et Cibitoke. Bilan officiel : deux civils tués, une dizaine de blessés, essentiellement des policiers, des arrestations, au moins une vingtaine, et saisie de trois armes et de quelques tenues militaires. Mais l’opération de fouille-perquisition s’est littéralement prolongée, se transformant en un véritable blocus dans une grande partie de ces quartiers.
Plus que les autres quartiers, Jabe reste dans l’œil du cyclone. Des sources sur place parlent d’un mort. «Le cadavre était toujours visible ce jeudi matin», affirme un habitant de ce quartier.
«Nous vivons au rythme des fouilles- perquisitions, pas une semaine ne passe sans une opération du genre», se lamente un autre habitant, apparemment dépassé par les événements.
«Notre quartier est complètement bouclé. Personne ne sort. Des policiers sont postés à chaque carrefour», lance au téléphone un jeune de Nyakabiga III.
Cibitoke : le quartier quadrillé après une nuit agitée,
Ce jeudi matin, après une nuit ponctuée de tirs à l’arme automatique et d’explosions de grenades, les habitants de Cibitoke croyaient être au bout de leur peine, mais ils se sont réveillés encerclés. L’armée et la police quadrillent la partie de ce quartier comprise entre l’avenue des Forces armées communément appelée ’’Kurya Kanyoni’’ et la RN9 vers Mutakura. La circulation semblait normale ce jeudi matin sur ces deux axes très animés. Mais des sources sur place nous indiquent qu’il y aurait plusieurs arrestations, côté Nyabagere. Les jeunes sont les plus visés.
Jabe : De longues nuits font place à d’interminables journées
Quadrillé à partir de mardi le 1er septembre, le quartier Jabe est entièrement paralysé durant deux jours. Tous ses habitants sont enfermés chez eux. Plusieurs jeunes sont arrêtés arbitrairement.
Des coups de feu nourris se sont appropriés les paisibles nuits de Jabe depuis mardi. « Nous sommes bercés par des tirs dorénavant. On pourrait croire à une sorte de « karaoké » de mauvais goût, » confie un jeune du quartier. Et dès lors, les journées des habitants de Jabe ne sont pas moins dramatiques : « Toute personne qui tente de sortir de chez elle depuis mercredi est renvoyée chez elle avec une arme pointée dans sa direction,» témoigne une victime de cet acte. Ainsi donc, personne n’entre au quartier. Et ceux qui y sont ne quittent pas leurs parcelles.
Les ménages ne pouvant plus se rendre au marché se retrouvent à cours d’approvisionnement. « Et les boutiques qui auraient pu maintenir la situation, pour un temps encore… au moins, sont honteusement pillées par des policiers,» déplore une source fiable. Cette source ajoute que ces policiers prennent dans ces boutiques tout ce qui leur tombe sous la main, tels que des téléphones portables, de l’argent, des produits de vente, etc.
Le mercredi matin, un cadavre sera découvert dans un caniveau, après la longue nuit de mardi, non loin de l’avenue de la jeunesse. La Croix-Rouge, qui a essayé d’intervenir pour emmener ce corps à la morgue, sera sommée par la police de quitter les lieux en catastrophe. Cette dépouille y était encore jusqu’à ce jeudi.
Signalons qu’au moment où les rues du quartier Jabe sont désertes, la police procède à des arrestations, jeunes hommes et vieux confondus, comme le rapporte une source sur place.
Nyakabiga, tirs, fouille et encerclement
Les tirs à l’arme automatique ponctués d’explosions de grenades ont commencé à Nyakabiga vers 21h ce mardi. Des sources sur place indiquent n’avoir pas identifié ceux qui ont mené cette attaque. «Pris de panique, tous les habitants se sont immédiatement cachés dans leurs maisons », raconte C.M de Nyakabiga.
Le matin, poursuit la même source, tout le quartier était complètement bouclé par des policiers. Une autre source indique que trois personnes ont été arrêtées à Nyakabiga 3, sur la 9ème avenue : «Il s’agit de Guilain, Alberic et un certain Kiyoka. » D’autres informations font état d’une autre personne arrêtée à Nyakabiga 1 à la 17ème avenue. Il est difficile de vérifier ces informations parce qu’on moment où nous mettons sous presse, le quartier Nyakabiga est toujours quadrillé.
Cette présence inhabituelle de policiers inquiète la population de Nyakabiga car ils n’ont même pas fait une fouille perquisition.
Musaga, 72 heures sans répit….
Ponctuées de détonations de grenades et de crépitements d’armes automatiques, les nuits du 31 août au 3 septembre ont été dures pour les habitants de Musaga, qualifié de berceau de la contestation contre le 3ème mandat de Nkurunziza.
«Deux nuits et une journée de calvaire », s’indignent les habitants de Musaga qui ne peuvent pas sortir de leur maison, encore moins de leur quartier. Tout commence la nuit du 31 août au 1er septembre vers 22 h quand deux explosions de grenades brisent le silence nocturne, à la 3ème avenue.
Une source militaire fait savoir qu’une colonne des hommes en uniformes qui patrouillait la nuit a été la cible d’une attaque par des inconnus. Des tirs à l’arme automatique suivront.
«Nous avons juste eu le temps de nous cacher dans des caniveaux quand deux grenades ont été lancées dans notre direction », précise un des militaires qui effectuait une patrouille ce jour-là. « Surtout pas de riposte, avait insisté notre chef », ajoute-t-il.
« Nous avons contourné la deuxième avenue pour surprendre ces hommes armés, mais nous n’avons remarqué personne. »
Une heure plus tard, une autre détonation de grenade se fait entendre entre la 2ème et la 3ème avenue. Des tirs sporadiques se feront entendre dans tous le quartier, jusqu’au petit matin, avant que les policiers ne viennent quadriller la 2ème et la 3ème avenue, le matin du 2 septembre.
Toutes les ruelles, sont bloquées. Comme pour prédire une mauvaise journée, 7h du matin, une autre grenade a été lancée sur les policiers qui effectuaient la patrouille. Bilan, un policier et une maman de la 3ème avenue blessés.
Entre la 2ème et la 3ème avenue tout mouvement est contrôlé. Les policiers iront même obliger aux boutiquiers de fermer. Il n’y a que des voitures militaires qui passent.
Ce même jour, une personne connue sous le nom de Côme Nduwarugira, a été tuée. Selon les témoins trouvés sur le lieu du crime, ce jeune homme sortait de la maison pour s’enquérir de ce qui se passait à l’extérieur quand un policier a ouvert le feu sur lui, le touchant au niveau du cœur.
Jusque dans l’après-midi de ce 3 septembre, les habitants étaient toujours cloîtrés dans leurs maisons.
Une « routine » policière…
2 morts, 10 blessés dont 9 policiers, 17 arrestations, trois fusils, une grenade et des tenues militaires saisis.
Selon Pierre Nkurikiye, porte-parole adjoint de la police, des criminels ont essayé de perturber la sécurité dans les quartiers de Jabe, Nyakabiga, Musaga dans la nuit du 1er au 2 septembre 2015. « Mais la police les en a empêché », a-t-il déclaré dans une conférence de presse ce mercredi 2 septembre.
Il dénonce des grenades lancées par des malfaiteurs sans causer trop de dégâts : « Un de ces malfaiteurs a été tué lors des échanges de tirs avec la police. Son arme de type kalachnikov et une grenade ont été récupérés.»
Lors de ces échanges des tirs, a précisé M. Nkurikiye, une pers0nne a été blessée ainsi que deux policiers à Jabe, et deux autres à Nyakabiga. « 15 personnes ont été appréhendées pour des raisons d’enquête. Elles sont détenues au cachot de la zone Bwiza. »
Dans la matinée de ce mercredi, des tenues militaires et policières ont été découvertes à Jabe par la police lors d’une fouille perquisition, deux personnes arrêtées avec leurs armes à Kanyosha.
« Cinq policiers ont été légèrement blessés à Musaga lors d’une fouille perquisition de la police », a précisé le porte-parole adjoint de la police. Qui a ajouté que quatre personnes ont été attrapées sur place pour des raisons d’enquête mais relâchées en début d’après-midi.
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Analyse
Objectif sécurité dans ou avant deux mois…
Les crépitements d’armes et les détonations de grenades la nuit ont recommencé après une réunion du nouveau ministre de la Sécurité publique, avec des hauts gradés de la police. M. Alain Guillaume Bunyoni, a rencontré ce mardi 1er septembre les officiers de la police œuvrant dans la région ouest, comprenant les provinces Cibitoke, Bubanza, Bujumbura-mairie et Bujumbura. Cette réunion, a-t-il précisé, visait à adopter les stratégies nécessaires pour sécuriser tout le pays dans deux mois, comme le Chef de l’Etat l’a promis dans son discours lors de sa 3e prestation de serment. « Cela est possible, car la volonté de le faire est là, les moyens tant humains et matériels ont été organisés en conséquence et, avant la fin de ces deux mois, nous serons en mesure de montrer à la population burundaise le pas franchi, la stabilisation de la sécurité dans notre pays. » Alain Bunyoni n’a pas manqué de remercier d’abord ses hommes pour leur comportement affiché avant, pendant et après les élections. « Vous avez bien travaillé, vous avez mis tout le paquet, vous avez mis en œuvre votre savoir-faire et votre abnégation pour ramener la paix. »
Et dans la nuit de ce même mardi, les armes ont craché le feu une fois de plus sur certains quartiers de Bujumbura. La police a parlé de fouille-perquisition pour désarmer et de réplique contre des éléments qui lui ont tiré dessus. Une fouille perquisition accompagnée, comme à l’accoutumée, de son lot d’arrestations et de saisies d’armes. Pendant que la population fouillée parle de policiers qui tirent sur elle, et saisissent des armes qu’ils ont apportées eux-mêmes, pour pouvoir arrêter des gens. Cependant, des policiers sont blessés. Et, très souvent, après ces fouille-perquisitions, un corps ou deux sont trouvés le lendemain dans les quartiers fouillés. La police parle de légitime défense, alors que la population parle d’assassinat. Une chose est sûre, entre les blessés de la police, et les morts des « fouillés », il y a des non-dits.
Surtout que, à force d’entendre ces coups de feu la nuit, on peut aujourd’hui reconnaître sans se tromper, des échanges de tirs ou non.
Le sang appellera toujours le sang et je ne vois pas comment NKURUNZIZA dirigera le Burundi dans ces conditions-là…! Il n’est pas possible, je crois, de régler tout ce que nous avons comme problèmes liés au 3è mandat de NKURUNZIZA par une seule voie appelée force et violence. Le Président NKURUNZIZA, qu’il le veuille ou non, finira par s’asseoir et négocier. En effet, toutes les conséquences de l’insécurité au Burundi y compris les tortures et autres assassinats ciblés des membres de la société civile, des opposants, des journalistes et j’en passe, tout cela tombe sur la tête de NKURUNZIZA et ceci en vertu du principe simple en politique à savoir la responsabilité institutionnelle! Il devrait suivre attentivement ce qui se passe à Dakar en ce moment avec le procès de l’ancien président Tchadien Hussein HABRE sur des crimes commis il y a près de 30 ans..! Le Gouvernement NKURUNZIZA ne devrait pas croire une seule fois que personne n’est entrain de s’occuper de ses crimes, de récolter des preuves etc..! NKURUNZIZA, à mon humble avis, a intérêt à négocier avant qu’il ne soit trop tard pour lui et contrairement à ce qu’il croit, il a très peu de soutiens en Afrique et dans le monde… ! Les exemples de Buyoya II, récemment le Sud-Soudan sont là pour le réveiller afin qu’il soit mieux inspiré et cesse de se murer dans un silence assourdissant, inacceptable pour les citoyens burundais traumatisés ainsi que les partenaires clé du Burundi. NKURUNZIZA compte sûrement sur la force de lpour faire taire tous ceux qui s’opposent à lui. Il compte sur le découragement et essaye donc de laisser le temps au temps tout en réprimant radicalement ses opposants…! Cette stratégie est politiquement suicidaire pour NKURUNZIZA et je ne vois pas la situation s’améliorer bientôt surtout après la mort de Nshimirimana le 2 Août qui, à mon avis, est un signal fort d’alerte montrant que les anti-troisième mandats ont changé de stratégies de résistance.
Nyagaza abo bansi bigihugu