Pour l’association Ntabariza SPF, les médias ont un rôle important à jouer durant la période préélectorale, électorale et postélectorale. En jouant correctement leur rôle de sensibilisation dans la neutralité, les radios, les journaux peuvent être la pierre angulaire pour contrer toute origine des conflits politiques.
Cherchant à rompre avec les conflits récurrents pendant les élections au Burundi, l’Association Solidarité avec les Prisonniers et leurs Familles ; Ntabariza SPF a réuni les responsables des médias pour renforcer les capacités des responsables des médias sur le thème : ’’Media et prévention des conflits et gestion des rumeurs pendant la période électorale et préélectorale’’.
Selon Jean-Marie Nshimirimana, les médias peuvent jouer un rôle central dans la prévention des conflits dans la société. Il affirme en outre que dans la mesure où les journalistes peuvent déformer la réalité et favoriser les réponses violentes conformes à la propagande, cela engendre souvent des conflits violents.
Selon lui, le journalisme doit naviguer entre le plaidoyer et la propagande, en veillant à ce que ses reportages restent justes, équilibrés et transparents.
« Peut-être que certains s’interrogent en quoi Ntabariza entre dans cette thématique ? Mais je vous dirais que certains des prisonniers que nous défendons sont là à causes des délits et crimes commis pendant la période électorale, un moment plus propice pour grossir la population carcérale », a-t-il justifié.
Même son de cloche pour Pierre Nkurikiye, un des consultants qui ont animé les travaux. Selon lui, les médias qui couvrent la période préélectorale et postélectorale sont les premiers à provoquer des conflits ou apaiser les esprits en diffusant des informations ou des émissions en faveur de la paix.
« La population burundaise donne plus de crédits à ce que les médias diffusent. Si alors ils versent dans le sensationnalisme et des préjugés dans la couverture médiatique, ils offrent sur un plateau d’argent à certains protagonistes un climat favorable à des violences », a-t-il indiqué.
Pour lui, le journalisme doit avoir à cœur l’équilibre de l’information et les conséquences de l’information qu’il délivre. Les médias ont une responsabilité importante dans la promotion de récits pacifiques.
Les journalistes sont-ils les seuls responsables des violences ?
En remettant en question le sensationnalisme et les préjugés, en humanisant l’autre , en encourageant le dialogue et la compréhension, en mettant en avant les initiatives de consolidation de la paix, en pratiquant des reportages responsables, en s’engageant avec le public, les journalistes peuvent contribuer à façonner un monde plus pacifique.
Selon Sylvère Ntakarutimana, expert et ancien directeur de la Radio-Télévision Isanganiro, les médias ont un rôle important à jouer pour humaniser ceux qui sont souvent présentés comme l’autre ou l’ennemi.
“En donnant la parole aux communautés marginalisées, les médias peuvent briser les stéréotypes et favoriser l’empathie. Par exemple, présenter des histoires personnelles des gens touchés par un conflit peut contribuer à combler les fossés et à créer un sentiment d’humanité partagée ! »
Il ajoute que les médias ont le potentiel de jouer un rôle de catalyseur pour la paix en fournissant des plateformes de dialogue, en favorisant la compréhension et en contribuant à la promotion de la tolérance.
Grâce à des documentaires, des reportages et des interviews, les médias peuvent faire la lumière sur les causes profondes des conflits et encourager les discussions menant à des résolutions pacifiques.
Au cours de ces échanges, les hommes et femmes des médias ont suivie des exposés relatifs au journalisme de paix. Passant de la compréhension de paix et de conflits, des techniques de résolutions des conflits et gestions des rumeurs ainsi que le cadre légal des élections, les journalistes n’ont pas manqué de souligner qu’à l’instar des médias, la plupart des responsables doivent aussi être sensibilisés sur le rôle des médias.
« Chaque jour des journalistes sont accusés à tort ou à raison d’alimenter les conflits à travers leurs productions mais il faut se poser aussi des questions sur ceux qui avancent de tels propos. Sont-ils neutres dans le déséquilibre de l’information », a indiqué Raymond Nzimana, directeur de la radio Bonesha FM.
D’après lui, même si ce n’est pas dans la majorité des médias (classiques et médias en ligne), le journalisme de paix est déjà bel et bien pratiqué. Il déplore en outre le fait que certains détenteurs de l’information ne veulent pas répondre aux questions des journalistes qui les sollicitent.
« De tels pratiques ouvrent la voie aux rumeurs, aux spéculations et propagations des informations douteuses ce qui peut provoquer des conflits inutiles », a-t-il ajouté.
Des critiques aussi ont été émises à l’endroit de certains textes de lois et des sanctions relatifs aux prochaines élections. Pour la plupart des intervenants, le rôle d’un journaliste reste ambigu et difficile.
« Si un journaliste qui couvre les élections ne doit pas informer sur les résultats sans l’autorisation d’un responsable électoral, ne va-t-il donner l’opportunités aux rumeurs et aux fausses informations relayées par des réseaux sociaux », se demande Prosper Ntahizaniye, chef des programmes à la RTNB.
Selon lui, les journalistes risquent involontairement ou intentionnellement, de se concentrer uniquement sur les aspects positifs d’un processus de résolution de conflit tout en négligeant les problèmes sous-jacents ou les voix dissonantes.