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Les médias burundais à l’école béninoise

05/06/2013 Commentaires fermés sur Les médias burundais à l’école béninoise

Une délégation burundaise des organes de régulation et d’autorégulation vient d’effectuer une mission de travail à Cotonou, au Bénin. Occasion d’échange d’expériences avec les homologues béninois.   <doc2465|right>« Ekabo », lance le chef de protocole de la Haute autorité de l’audiovisuel et la communication(HAAC) à la délégation burundaise à l’aéroport de Cotonou. Un mot de bienvenue. Le soir, dans un bar restaurant, un membre de la HAAC surprend gentiment ses hôtes : « Voulez-vous la béninoise en bouteille ou en pagne ? » Juste pour signifier qu’il y a une bière appelée la Béninoise. Et la vraie Béninoise… Et son ami de renchérir, avec un accent typiquement ouest africain : « Ils viennent du pays de Jean Pliya », allusion faite à cet évangéliste charismatique béninois qui vient fréquemment au Burundi. « Tout sera bon, qui commence bien », constate un membre de la délégation burundaise. Et justement, la semaine du 05 au 11 décembre a été riche en expériences pour la délégation burundaise des instances de régulation et d’autorégulation. Une découverte d’un peuple hospitalier, fier de sa démocratie. Qu’a-t-on appris de la HAAC ? Equivalant au Conseil national de la communication (CNC) au Burundi, la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication est un organe réellement autonome. D’abord, de par sa composition : la HAAC est composée de neuf membres désignés, à raison de trois par le bureau de l’Assemblée nationale (un communicateur, un juriste, une personnalité de la société civile), trois par le président de la République (un communicateur, un juriste, une personnalité de la société civile) et trois par les professionnels de l’audiovisuel et de la communication (deux journalistes professionnels dont un de l’audio- visuel, et un autre de la presse écrite ainsi qu’un technicien des télécommunications). ___________________________ {L’Observatoire de la déontologie et de l’éthique dans les médias (ODEM) a été créé en septembre 1999. C’est un organe d’autorégulation composé de 13 membres. Ils sont issus de l’Union des professionnels des médias et du Conseil du patronat des médias. Avec un mandat de 3 ans, ils veillent au respect du code de déontologie de la presse béninoise, font des descentes dans les différentes rédactions. L’ODEM assure la médiation entre les journalistes et la régulation d’une part, et entre les journalistes et les politiques d’autre part. Il est consulté pour l’octroi de la carte de presse aux journalistes ou de l’assistance financière de l’Etat aux organes de presse (il faut avoir une attestation de non-condamnation de l’ODEM). L’ODEM transmet les plaintes à la HAAC et son président participe aux auditions publiques de cet organe de régulation. Il est assisté financièrement par des partenaires notamment l’Agence danoise de développement international (DANIDA), l’Organisation internationale de la Francophonie, la HAAC.} _________________________ Ensuite par son mandat : la durée des fonctions des membres de la HAAC est de 5 ans et le mandat n’est ni révocable, ni renouvelable. Elle a 8 commissions permanentes, dispose d’un secrétariat administratif, de 6 directions (qui étudient les dossiers à examiner par les commissions, fournissent des éléments d’appréciation et émettent des avis susceptibles de fonder les décisions de la HAAC). La HAAC se réunit de plein droit en deux sessions ordinaires par an, pendant 4 mois au plus, chacune. Les séances d’audition sont publiques : les plaignants saisissent la HAAC. Après délibération, elle convoque les responsables du médium incriminé qui s’expliquent devant d’autres journalistes. <doc2464|left>La prison n’est pas la solution « Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà », disaient les Romains. Si l’on considère les fautes professionnelles que commettent ces nombreux médias béninois (plus de 150 journaux, une quarantaine de radios, cinq télévisions), un journaliste burundais peut s’étonner de trouver qu’aucun des auteurs n’a jamais séjourné dans les maisons carcérales. Les plaignants saisissent soit la HAAC, soit l’Observatoire de la déontologie et de l’éthique dans les médias (ODEM), l’équivalent de l’Observatoire de la presse burundaise(OPB) ou la justice. Jamais le recours à la prison. Le cas du {Béninois Libéré} Selon des sources proches de ce journal, c’est un quotidien plutôt commercial. Le professionnalisme est absent et il viole fréquemment et délibérément le code de déontologie de la presse béninoise. Deux cas pour illustrer. {Le Béninois Libéré} a publié, sans preuves, que l’avion du président gabonais a été saisi avec de la drogue à l’aéroport de Cotonou. L’opposition gabonaise a exploité cet article pour décrédibiliser le pouvoir en place. Le président béninois, Yayi Boni a dû présenter des excuses à son homologue gabonais. Les autorités béninoises ont par après saisi la HAAC. {Le Béninois Libéré} a été interdit de parution pendant un mois. Mieux : le 5 décembre 2011 se tient, à Cotonou, un sommet du Conseil de l’Entente (une organisation qui regroupe 5 pays de la Région). Le lendemain, {Le Béninois Libéré} écrit à sa Une: « Conseil de l’Entente : Du vent ! (Cotonou a servi hier de cadre à un club d’amis mal élus qui se sont retrouvés pour se féliciter chacun pour sa « brillante » élection) ». Et de développer : « Même pas une minute de silence en mémoire du regretté Kadhafi. Ils (les chefs d’Etats) ont montré une fois de plus leur lâcheté et leur couardise. » Le gouvernement béninois saisit de nouveau la HAAC. Après délibération, cet organe de régulation estime que le titre de cette parution (alors que le quotidien était déjà suspendu pour un mois) est d’une gravité particulière. Selon cette instance, les expressions employées sont outrageantes, grossières et ordurières à l’égard des chefs d’Etats. La HAAC prend alors pris la décision de suspendre définitivement les activités de ce journal. De plus, le promoteur du journal et le directeur des publications sont interdits d’exercice du métier de journaliste au Bénin et de créer un autre organe de presse. Toutefois, {Le Béninois Libéré} garde la latitude de saisir la justice, et ses auteurs ne sont pas emprisonnés. A chacun son commentaire. Le mien : il faut que liberté de presse rime avec responsabilité et professionnalisme.

CNC

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