Dimanche 22 décembre 2024

Editorial

Les jérémiades du Frodebu

07/06/2024 3

« Gémir, pleurer, prier est également lâche. Fais énergiquement ta longue et lourde tâche dans la voie où le Sort a voulu t’appeler… » Ces vers d’Alfred de Vigny dans La Mort du loup me sont venus à l’esprit en écoutant les invectives et les critiques tenues par les responsables du parti Sahwanya Frodebu envers le parti au pouvoir, lors de la célébration du 31ème anniversaire de la victoire du premier Président démocratiquement élu. Ils ont tiré à boulets rouges, accablant de reproches le parti de l’aigle : « Corruption, arrestations arbitraires et enlèvements, exclusion, vie chère, mauvaise gestion de la chose publique », le chapelet des griefs a été égrené à satiété.

Par Léandre Sikuyavuga
Directeur du groupe de presse Iwacu

Ce qui a suscité beaucoup d’indignation et d’incompréhension, c’est le langage confus, voire quémandeur qu’ils ont tenu : « C’est nous qui les avons créés (le Cndd-Fdd, ndlr), nous leur avons fourni du matériel, des médicaments, de la nourriture et nous les avons aidés financièrement, nous avons tout fait pour eux… Durant 19 ans de pouvoir, le Cndd-Fdd n’a engagé aucun militant du Frodebu… Quand tu dis que chaque poche doit avoir de l’argent, est-ce que les Frodebistes n’en ont pas besoin ? »

Des questions me taraudent : le parti de Ndadaye cherche-t-il à être associé au pouvoir ? A-t-il vraiment changé d’idéologie ? Depuis sa création, le parti Sahwanya Frodebu n’a jamais prôné publiquement et officiellement la lutte armée. Son leitmotiv était le triomphe de la démocratie par voie pacifique, ce qui a toujours été le point d’achoppement avec ceux qui avaient opté pour cette voie. Affirmer, trente ans après, qu’ils ont entretenu un mouvement armé tranche avec l’idéologie, la conviction des fondateurs de cette formation.

« Tout peut se partager, sauf le pouvoir », aimait répéter un de nos professeurs de sciences politiques. On entend aussi dire que « Le pouvoir ne se donne pas, il se prend…Le pouvoir ne se donne pas, il s’arrache…Le pouvoir ne se donne pas sur un plateau d’argent… ». Même en démocratie !

Le parti Sahwanya Frodebu a beau critiquer, réprimander, vilipender le parti de l’aigle, ce dernier reste de marbre, imperturbable à ces « jérémiades ». Ce n’est même pas ce dont les citoyens ont besoin. Ces derniers veulent un parti fort qui propose des solutions aux problèmes qui affligent le pays, qui suggère une alternative, qui promeut leurs intérêts. Bref, ils veulent un parti qui se veut être un contre-pouvoir. C’est en remplissant ces conditions que les citoyens peuvent décider une alternance.

Pour la première fois depuis la fin de l’apartheid en Afrique du Sud en 1994, le Congrès national africain (ANC) vient de perdre la majorité parlementaire. Ce tournant historique ouvre la voie à des coalitions gouvernementales impliquant plusieurs partis. Âgé de 44 ans, le nouveau Président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, récemment élu, a réalisé une ascension spectaculaire de la prison au palais présidentiel en seulement quelques semaines. C’est donc possible, mais cela a un coût : on doit mouiller le maillot.

Le Frodebu l’a déjà démontré dans un passé pas trop lointain : « Vox populi vox dei »

 

 

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Vincent

    Le Frodebu est le parti le plus fort qui a la capacité de changer les choses ici au Burundi

  2. Anonyme

    Tant qu’on aura des politiciens qui ne peuvent survivre que par la politique, le Pays continuera sa descente vers l’enfer… Aucune vision ! C’est juste chercher un poste pour assouvir ses besoins et ses intérêts individuels.

  3. Rufuku Charles

    « Gouvernement d’unité nationale, gouvernement de transition », ces gouvernements ont engraissé les « inziraguhemuka » (Frodebistes) et leurs faux jumeaux que je ne cite pas. Ils veulent continuer dans cette logique, sauf que ça ne marche pas comme ça avec les DD (Caratuvunye, ntitubaha)…

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.