L’incompétence de certains magistrats, les emprisonnements abusifs, la surpopulation carcérale. Des défis qui hantent la justice, selon le président Ndayishimiye, lors de son message à la Nation du 31 décembre 2021. SPF/Ntabariza, quant à elle, s’est dite préoccupée par la situation des détenus insolvables.
“Nous avons remarqué des irrégularités dans le secteur de la justice liées notamment au passé douloureux de notre pays, aux lois rétrogrades et au mauvais comportement de certains magistrats”, a déploré le Magistrat Suprême.
Le président Ndayishimiye a promis de trouver une solution aux plaintes de la population contre ce sercteur : “Nous allons nous atteler à relever ses irrégularités”.
Le chef de l’Etat n’y va pas par quatre chemins. Il a pris la décision de désengorger les établissements pénitentiaires : “Désormais, toutes les personnes non poursuivies pour assassinat ou autres atteintes à la vie humaine doivent comparaître étant libres.”
Le président de la République a instruit tous les procueurs à libérer cette catégorie de détenus dans les plus brefs délais.
Dans son discours, le président Ndayishimiye en a profité pour donner le bilan de la grâce présidentielle. Selon lui, plus de 2700 détenus ont été libérés. Il a fait savoir que le gouvernement responsable continue de suivre de près le comportement des détenus pour voir d’autres qui méritent d’être relaxés.
Par ailleurs, le Magistrat Suprême s’est dit engagé à exécuter les jugements rendus : “Nous avons aussi remarqué que rien ne peut marcher si nous n’exécutons pas les jugements rendus. Et les magistrats sont à l’oeuvre.”
Réhabilitation des notables collinaires
Le chef de l’Etat est revenu sur le rôle incontournable des notables collinaires dans le réglement des conflits fonciers et familiaux. Il s’est engagé à réhabiliter cette institution : “Il faut réhabiliter et renforcer l’institution des notables collinaires. Ils connaissent la vérité sur ces conflits. Ils sont témoins et voisins des gens en conflit”.
Il a annoncé que l’élection de ces notables est pour bientôt : « Nous demandons à la population d’élire des personnes honnêtes et intègres.”
Par ailleurs, le président Ndayishimiye s’est réjoui de la mise en place du secrétariat permanent du Conseil supérieur de la magistrature : “Nous avons maintenant des spécialistes du droit qui vont enquêter sur les plaintes de la population et comme cela ils vont travailler sur des questions bien étudiées.”
Il a invité le procureur général de la Réubliique de collaborer avec le Conseil supérieur de la magistrature pour analyser les plaintes de la population.
Toutefois, le chef de l’Etat a fustigé le comportement de certains justiciables qui ont une mauvaise habitude de rejeter les jugements rendus. Et de leur prodiguer des conseils: “Nous demandons à la population de ne pas apporter des mensonges auprès dudit Conseil.”
Une décision saluée
“Nous saluons la décision du chef de l’Etat de relâcher tous ceux qui n’ont pas commis les crimes de sang. C’est un ouf de soulagement autant pour les bénéficiaires qui vont recouvrer leur liberté et regagner leurs familles que pour les familles qui faisaient la navette pour voir leurs proches dans différentes prisons”, s’est réjoui Jean Marie Nshimirimana, représentant légal de l’Association solidarité avec les prisonniers et leurs familles, SPF-Ntabariza dans une conférence de presse tenue le 3 janvier.
Selon une étude menée par ladite association, au moins 7 mille détenus pourront être libérés, si la mesure est bien appliquée. M. Nshimirimana a demanadé à la ministre de la Justice de mettre en application cette décision sans délai.
De son côté, M. Nshimirimana a promis d’apporter son coup de main dans l’application de la décision présidentielle : “Nous allons effectuer des descentes pour voir si l’analyse des dossiers est claire. Une commission ad hoc sera mise en place. Nous allons vous communiquer le nombre et la liste des personnes libérées chaque trimestre.”
Il a invité ceux qui vont bénéficier de ladite décision à s’atteler aux travaux de développement, d’autant plus que cette année a été dédiée à l’agriculture.
Interrogé sur les risques de vindict populaire, il a tranquillisé tout en invitant chacun à accueillir à bras ouverts ceux qui seront libérés et en exhortant ces derniers d’éviter l’esprit de vengeance.
Du regret
Le défenseur des droits des prisonniers s’est attristé sur la situation de certains bénéficiaires de la grâce présidentielle qui n’ont pas encore été libérés : “C’est de la douleur au niveau de SPF-Ntabariza de voir des prisonniers qui croupissent en prison alors qu’ils ont été graciés ou ont purgé leurs peines.”
Selon lui, le maintien en détention de ces détenus est dû à leur insolvabilité suite aux amendes excessives qui leur ont été infligées. “Comment se fait-il que celui qui n’a jamais eu 5 mille BIF dans sa poche soit capable de payer 50 millions BIF d’amende?”, s’est-il interrogé. Et d’ajouter: “C’est de l’amertume pour ces détenus qui se voient privés de leur liberté.”
Cet activiste de la société civile et ancien prisonnier s’est s’insurgé contre les emprisonnements pour cause de dette civile. Il a interpellé tous les intervenants en matière de détention de couper court avec les emprisonnements illégaux et arbitraires : “C’est regrettable de voir des gens emprisonnés sur simple coup de téléphone. Je vous rassure, cela ne se reproduira plus”. Il invite la population à régler à l’amiable les questions liées à la dettte civile. Et de rassurer qu’il va suivre de près cette question : “Désormais, il n’y aura plus d’emprisonnement pour cause de dette civile.”
Par ailleurs, il a déploré le fait de voir des gens qui passent plus de 8 ans en prison et qui se voient acquitter après cette longue période d’emprisonnement.
Il a recommandé de mettre en place un fonds pour indemniser ceux qui auront subi de telles injustices.
Interrogé sur la réhabilitation des notables collinaires, le président de SPF-Ntabariza n’a pas caché sa satisfaction : “Désormais, les litiges fonciers et familiaux seront vite réglés. Ils ne pourront plus pousser quelqu’un à être emprisonné.”
Il faudrait qu’un psychologue nous explique : pourquoi toujours le reflexe d’emprisonner est prépondérant ?