Népotisme, clientélisme, corruption, militantisme, … Plus d’uns se demandent pourquoi les projets financés par les agences onusiennes et la Banque mondiale sont mal exécutés. Manque de patriotisme ou faibles capacités ?
« Le gouvernement me dit que nous n’avons pas pu exécuter ce projet parce qu’on n’a pas les capacités. J’ai posé la question : vous voulez des capacités externes qui viennent ici ou vous voulez qu’on vous aide à faire revenir les nationaux burundais qui sont hyper compétents qui sont dans la diaspora ? », déclare le coordonnateur a.i du système des Nations unies, Abdou Dieng.
« La question au Burundi que j’essaie de mettre sur la table, avec le Premier ministre et avec les bailleurs de fonds, tourne autour des renforcements des capacités. Il y en a beaucoup. Qu’est-ce qui a poussé ces Burundais à partir ? » Et d’ajouter : « Il faut d’abord régler cette question. Vous formez des gens, surtout en médecine. C’est un investissement lourd. Après il se dit, je n’ai pas les bonnes conditions pour travailler ici. On n’a pas parlé des salaires. Si on ne règle pas la question des salaires, j’ai peur que même les capacités qu’on va renforcer vont nous passer entre les doigts. »
Une question fondamentale selon les Nations unies
« Qu’est-ce qu’on peut faire pour qu’un médecin burundais formé ne parte pas. On ne peut pas l’attacher s’il veut partir. J’ai rencontré tellement de Burundais très compétents, mais qui n’arrivent pas à rentrer. C’est une question que nous sommes en train de discuter avec le gouvernement. Et c’est le gouvernement qui doit nous dire dans quels domaines, ce n’est pas à nous de dire que vous avez besoin de quelqu’un ici. Non. »
Il donne l’exemple de la Regideso. « Il faut passer par un appel d’offres. Dire, on besoin de quelqu’un avec telles qualifications. On ne va jamais régler le problème de l’énergie et de l’eau, il faut des gens compétents. Des Burundais, il y en a. »
Et la motivation ?
L’intervention du sénateur Jean Bosco Ntunzwenimana est revenue sur une des causes qui pousseraient au non-achèvement des projets. « Il y a des projets financés par les partenaires et je sais qu’il y a eu beaucoup de réunions pour analyser pourquoi beaucoup des projets rencontrent des problèmes d’exécution. On a évoqué plusieurs questions, surtout liées à leur intéressement. Et cela figure dans le financement des projets. » C’était lors de la présentation, du Premier ministre, devant le Parlement réuni en congrès afin de parler des principales actions du plan de travail et budget annuel du Gouvernement, exercice 2023-2024.
Pour lui, le problème se trouve surtout de ce côté : « Manque de motivation », a-t-il souligné. Et de faire une proposition : « J’aimerais alors lui suggérer s’il a pris la question en main, il faut voir ce qu’il peut faire pour que les projets soient bien exécutés et dans les délais.»
Une intervention qui ne laissera sans commentaire, Emmanuel Sinzohagera, président du Sénat et Gervais Ndirakobuca, 1er ministre.
Manque de patriotisme
« C’est une question à débattre. Je ne vais pas entrer en détail dans les salaires. Je ne pense pas que ce sont les seules causes. Il y en a qui vont dans ces projets en visant leurs propres intérêts au lieu de l’intérêt national. Alors, quand on se trompe et qu’on le place dans une structure, il freine tout. Parce qu’il n’a pas été désigné gestionnaire du projet », commente Emmanuel Sinzohagera, président du Sénat.
Pour lui, beaucoup de facteurs entrent en jeu. D’ailleurs, ces projets sont exécutés par des Burundais et pas des étrangers.
Emmanuel Sinzohagera trouve qu’il faut d’abord un esprit patriotique. « Il faut aimer notre pays. Il y a même des pays où on accepte qu’on diminue les salaires et les gens travaillent et le pays se développe. » Mais, au Burundi, les gestionnaires des projets ne sont pas mal payés, ils sont bien nantis.
« Mais, comme ils n’ont pas reçu la somme qu’ils ont mentionnée dans le projet, ou parce qu’il y a eu des influences pour s’octroyer de grosses sommes, ils disent qu’ils ne peuvent pas travailler. C’est un manque de patriotisme », déplore-t-il.
Gervais Ndirakobuca, Premier ministre, abonde dans le même sens. « Je ne pense pas que c’est lié à la motivation. Si oui, comment est-ce que les projets d’avant l’ordonnance qui fixe les plafonds de salaire pour les gestionnaires des projets étaient exécutés ? Je sais très bien qu’il y a des projets qui ont reçu deux ou trois prolongations et qui ne sont pas encore achevés jusqu’aujourd’hui ? » Or, analyse-t-il, ils recevaient cet argent.
D’après lui, il y a un sérieux problème. « Tant que les gestionnaires n’auront pas compris qu’il faut achever le projet pour que les Burundais commencent à bénéficier de ses dividendes, il y a un problème. »
Il indique qu’il y en a même ceux qui font retarder l’exécution des projets afin qu’une fois les délais prolongés, ils maintiennent le poste de chef du projet.
Quid de la finalité des financements des partenaires
M. Sinzohagera doute d’ailleurs de l’objectif visé par ceux qui donnent les financements. « Il est temps de repenser cette politique. Je le dis souvent : aide au développement. Dans ces deux mots, l’action principale, ce n’est pas aider, c’est développer. Et on ne t’aide pas à te développer. Nous devons nous développer et l’aide viendrait après. Mais, nous, l’aide au développement nous a assujettis et nous avons oublié l’action principale. »
Pour lui, tant que les Burundais n’ont pas encore compris cette logique, les projets seront toujours faits, mais pas dans les délais. « Il ne faut pas résoudre des questions de façon superficielle », se résume-t-il.
Gervais Ndirakobuca, 1er ministre fait presque la même lecture. « Peut-être même avant ma naissance, les partenaires au développement étaient là et continuaient à parler du développement du Burundi. Mais, ce développement n’est pas encore là. Je pense qu’il est temps d’ouvrir les yeux pour voir. Où ces aides ont fait arriver le Burundi ? »
Il se demande d’ailleurs si ceux qui financent ces projets veulent réellement que le Burundi se développe : « Là, je me réserve de donner la réponse.»
Pour le 1er ministre Ndirakobuca, si le Burundi n’est pas encore développé, qu’on ne continue pas de se faire des illusions que ce sont les partenaires qui le feront progresser : « C’est nous qui développerons le pays. Et à ce moment, ils viendront dire qu’ils ont contribué ou qu’ils comptent nous appuyer. »
Réactions
Agathon Rwasa : « Le militantisme est loin d’être l’équivalent de la compétence »
Pour l’opposant Agathon Rwasa et président du CNL, le Burundi ne manque pas de ressources humaines. « Seulement, elles sont mal exploitées ou inexploitées. Du moment où le militantisme prime sur les compétences, alors vous comprendrez que c’est difficile lorsque les plus zélés militants sont les mieux placés. »
D’après lui, cela fait que d’abord ceux qui sont placés pour leur militantisme feront fi de tout ce qui est disposition légale et travailleront seulement dans l’esprit du parti. « Et le parti qui a ses orientations qui dictent sa volonté. Et lorsque le respect de la loi n’est pas une préoccupation pour ceux qui gèrent, salut les dégâts. »
Selon lui, le problème c’est le sectarisme dans ce sens que du sommet à la base, on a cherché qu’à y placer des militants zélés du parti de l’aigle. Il explique que ce n’est pas évident que le militantisme acerbe rime toujours avec les compétences. « Telle est la problématique et tout se fait malheureusement en violation de la Constitution. Parce que la Constitution de 2018 précise bel et bien en son article 13, que tous les Burundais sont égaux en droits et en dignité. Et là, allez-y chercher si réellement nous avons les mêmes droits, la même dignité aux yeux de ceux qui dirigent ou de ceux qui adhèrent à leur parti. »
De plus, poursuit-il, l’article 16 dit clairement que la formation du gouvernement doit refléter les composantes de la société burundaise. « Entendez par là les partis politiques notamment au-delà de cette histoire de quota ethnique, mais aussi les équilibres régionaux, etc. Est-ce que cela est respecté ? La réponse est non puisqu’on a un gouvernement monolithique, 100% issu du parti de l’aigle. Est-ce que les autres Burundais ne sont pas compétents, ministrables ? »
Encore, ajoute M. Rwasa, l’article 140 de la même Constitution précise bien que dans la nomination aux postes administratifs, d’autres administratifs au niveau ministériel notamment, « on veille à respecter les équilibres politiques, ethniques, genres, tout autant que les équilibres régionaux. » « Est-ce que cela est respecté ? Et cela est valable pour la diplomatie. Maintenant, allez-y voir quelle diplomatie nous avons. Elle a toute la couleur de l’aigle, toutes les allures militantes. »
Bref, résume-t-il, le manque de respect à la Constitution est la base de ce fléau, la mauvaise gouvernance parce que « le militantisme est loin d’être l’équivalent de la compétence. »
Faustin Ndikumana : « Certains cadres même s’ils sont compétents sont ignorés … »
« Normalement, le problème de compétences est une évidence au Burundi. Le pays a une faiblesse des capacités au niveau de la gestion des projets, de la gestion institutionnelle », analyse Faustin Ndikumana, directeur exécutif de l’ONG PARCEM. Ce qui affecte selon lui-même l’efficacité des institutions.
Il signale qu’une enquête menée par son ONG révèle certaines causes de cette situation : « Il y a d’abord la philosophie et la culture actuelle qui ignorent les compétences. La philosophie de la gestion, des réformes, la gestion des projets, des politiques économiques et programmes. On voit que dans la culture des dirigeants, on veut ignorer les compétences des gens. »
Il évoque une faible compétence, mauvaise formation des jeunes générations montantes. Ce qui est liée, d’après lui, à la crise de l’école qu’on vit depuis un certain temps.
M.Ndikumana a évoqué aussi le réflexe ethnique du passé qui continue à émailler le système de nomination. « Cela fait que certains cadres même s’ils sont compétents soient ignorés suite aux considérations ethniques. Il y a la politisation des nominations qui est devenue monnaie courante. »
D’après lui, il y a en outre le militantisme qui fait que pour choisir ou nommer un cadre, l’image du parti au pouvoir reste prédominante et pèse lourdement sur le système de nomination.
« Il y a aussi des fois où les conditions de travail, la logistique, les salaires qui font que beaucoup de compétences, de cerveaux quittent le pays », poursuit-il, déplorant en outre qu’au Burundi, la mauvaise affectation budgétaire soit une maladie qui est en train de maintenir le pays dans une misère indescriptible. « Un pays ne peut jamais quitter le stade de pauvreté sans une affectation budgétaire rationnelle, digne de ce nom tenant compte des programmes et des priorités gouvernementales censées relever le niveau de vie des citoyens. »
Comme solutions, M. Ndikumana suggère qu’il faut chercher les compétences au Burundi et à l’extérieur. « Il faut bien les rémunérer à la hauteur de leur niveau de formation, expertise. Il faut aussi une stratégie de renforcement des capacités en permanence. A long terme, il faut aussi relever le niveau de formation. »
Pour lui, il faut faire tout pour inverser la tendance : « Sinon, le pays aura des conséquences graves dans l’avenir. »
Kefa Nibizi : « D’une part, c’est une honte »
« Quand nous ne sommes pas capables d’exécuter ces projets, de consommer les appuis financiers qui nous ont été donnés, d’une part c’est une honte, mais aussi ça fait retarder le développement socio-économique de notre pays », fait savoir Kefa Nibizi, président du parti Codebu.
Kefa Nibizi déplore que le gouvernement ait fait des coupures drastiques dans les salaires qui sont accordés aux exécutants des projets financés par les agences onusiennes sous prétexte de l’harmonisation des salaires.
Un facteur qui pousse vers la fuite de cerveaux, mais aussi la non-exécution correcte de ces projets, c’est que souvent même les intellectuels qui sont là ne travaillent pas de façon épanouie. « Ils subissent des injonctions de certains représentants politiques qui nécessairement n’ont pas les compétences techniques pour savoir ce qu’il faut faire, mais qui donnent des orientations de telle sorte que la personne compétente se sent gênée parce qu’elle est obligée dans ce cas de faire ce qui ne rentre pas dans sa compétence, mais dans la volonté politique de tierces personnes. » Et d’ajouter : « Cela retarde les projets, mais aussi gêne ces personnes-ressources à tel point que certaines démissionnent ou préfèrent aller travailler ailleurs. »
Selon le président du parti Codebu, un autre phénomène non négligeable est que souvent les recrutements de ceux qui exécutent ces projets sont basés sur l’appartenance politique. « Je ne peux pas douter que s’il y a une personne quoi que très compétente, mais qu’il n’est pas membre du parti au pouvoir, il ne peut sans aucun doute coordonner un projet. Cela freine alors l’avancée de ces projets. »
M. Nibizi nuance : « A côté de cette cause énoncée par ce représentant, il y a également le retard des autorisations d’exécutions, surtout lors du décaissement des fonds. Et un projet peut durer des mois sans être exécuté. » Selon ce politique, il faut toujours un renforcement des capacités, mais aussi assouplir les conditions de décaissement de fonds de financement pour exécuter ces projets dans les délais impartis.
Gabriel Rufyiri : « Le premier problème est celui du leadership »
« En matière de gestion, il doit y avoir de la coordination des actions et cela requiert plusieurs étapes. Il faut d’abord celui qui raisonne au plus haut sommet et qui donne des orientations. Quand il n’y a pas de stratégies globales en matière de planification, d’élaboration des projets et programmes et puis en matière de mobilisation et d’exécution de fonds, le problème se trouve d’abord à ce niveau. Et c’est la raison pour laquelle, le renforcement des capacités doit commencer par le leadership au sommet », analyse le président de l’Olucome. « Pour répondre à la question d’absorption de fonds alloués aux projets, il doit y avoir des experts à plusieurs niveaux et fondamentalement et à l’occurrence au niveau de la planification. »
Selon Gabriel Rufyiri, le gouvernement burundais doit d’abord élaborer des profils qu’il ne dispose pas sur bases des TDR bien déterminés et avec bien sûr un budget conséquent pour les encourager. « S’il y a un étranger qui dispose de ces compétences pourquoi ne pas le prendre ? »
Malheureusement, indique-t-il, le constat est qu’actuellement le recrutement de ces experts se fasse sur base du militantisme partisan et ça a été prouvé que la plupart des ceux qui sont recrutés sur base des critères partisanes n’ont pas ces compétences. « A ce niveau-là, les compétences sont reléguées à l’arrière-plan. Un Burundais intelligent, mais qui n’est pas membre du parti au pouvoir, il est tout simplement déconsidéré. C’est pour cette raison qu’il est difficile d’arriver loin si on travaille de la sorte. »
Il rappelle que si l’Office burundais des Recettes (OBR) existe aujourd’hui, c’est grâce à l’expert irlandais qui a accompagné le Burundi dans sa mise en place.
Aloys Baricako : « Maintenant, le CNDD-FDD se recherche »
« Au Burundi, nous avons bien des compétences. Dans la sous-région, le Burundi se place parmi les pays qui ont des gens qui ont fréquenté de grandes écoles, de grandes universités et qui ont des compétences capables d’exécuter n’importe quel projet ici au Burundi », analyse le président du parti Ranac. « Par ailleurs, il y a eu dans le temps des exécutions de projets financés par ces agences onusiennes et ils ont été bien exécutés. Pourquoi pas aujourd’hui ? »
Selon lui, le problème se situe d’abord dans l’histoire du Burundi. « Le Burundi est un pays qui a connu de grandes difficultés à ce qui concerne l’exclusion de tout genre. Avant, on évoquait l’exclusion ethnique et régionale. Maintenant c’est l’exclusion politique qui se manifeste. Il y a des considérations partisanes qui entrent en jeu. Aujourd’hui, vous n’êtes pas de la mouvance, vous n’êtes pas en connivence avec une telle ou telle autorité, vous êtes exclus malgré vos compétences. » Et d’ajouter : « Il y a dans ce pays le triomphe du népotisme. »
Selon lui, les choses se sont empirées avec le tournant électoral de 2015. « A cette période, il y a une fronde au sein du parti au pouvoir et la plupart des gens qui ont un niveau de compétence assez considérable ont été écartés du système et ont pris le chemin de l’exil. Maintenant le CNDD-FDD se recherche, il s’est retrouvé devant une nouvelle génération qui a besoin d’accompagnement. Et il faut là aussi que les dirigeants du CNDD-FDD s’en rendent compte. » Pour lui, il faut privilégier la méritocratie pour gérer une nation.
Pour M. Baricako, le problème des salaires qui sont maigres ne suffit pas pour expliquer cette problématique. D’après lui, il y a une panoplie de raisons. Parmi ces raisons, le président du parti RANAC évoque le dilemme de sécurité dans lequel se trouve notre pays. « Le Burundi est classé parmi les pays se trouvant dans la région de turbulence. On ne sait pas quand la crise peut s’éclater. Dans ce cas, il est difficile de maintenir ces experts dont le pays a besoin. »
D’après m. Baricako, le problème est que certains fonctionnaires de l’Etat sont devenus des commerçants de premier rang. « Dans ce cas, ils s’occupent beaucoup plus de leur business au détriment du service qu’ils sont censés rendre. Les fonds alloués aux différents projets tombent en annulation à cause de ça plutôt que le patriotisme. D’ailleurs, ça dépend de la manière dont on définit le patriotisme. »
Olivier Nkurunziza : « Il faut mettre en avant l’esprit d’excellence quand on recrute »
« Au Burundi, il y a des hommes pleins d’expérience. Il y a même des hommes qui travaillent dans les différents pays, dans le système des Nations-Unies et partout dans le monde. Pour dire qu’au Burundi il y a des gens compétents capables d’exécuter les projets. »
Le problème pour M. Nkurunziza, c’est le militantisme. « Au Burundi, même si tu es expert compétent, mais que tu n’es pas membre du parti au pouvoir, tu ne peux pas trouver du travail. Ton CV n’est pas considéré. Ça, c’est un problème très majeur. On n’engage les gens non pas parce qu’ils sont compétents, mais plutôt parce qu’ils sont militants du parti au pouvoir. »
D’après le président de l’Uprona, l’autre problème est bien évidemment celui des salaires. « Avec l’inflation que connaît le pays, il devient difficile pour un fonctionnaire de joindre les deux bouts du mois. Par exemple, un docteur en médecine et lui payer 500 mille de Fbu alors qu’il a une famille, c’est une situation pratiquement intenable. Celui-ci va donc chercher là où il peut toucher un salaire qui lui sera capable de subvenir aux besoins de sa famille. » Pour Olivier Nkurunziza, il faut alors mettre en avant la méritocratie et non les affinités partisanes. « Il faut mettre en avant l’esprit d’excellence quand on recrute. »
Hamza Venant Burikukiye : « Il faut le sens du patriotisme »
Selon le représentant légal de l’Association Capes+, ce ne sont pas des compétences qui manquent au Burundi plutôt le sens du patriotisme et de responsabilité font défaut pour certains. « Il faut des gens capables dans la place qu’il faut. Les Burundais doivent avoir un esprit de reconnaissance pour servir leur patrie qui les a éduqués et instruits. »
Interview exclusive avec André Nikwigize : « Le Burundi souffre d’une politisation des services techniques »
D’après vous, pourquoi les projets sont mal exécutés ?
Contrairement à ce qu’affirment les autorités burundaises, les faibles capacités institutionnelles ne sont pas dues au manque de patriotisme des coordonnateurs des projets, ou bien, à cause des institutions de développement, qui font trainer les projets, le Burundi traine cette situation depuis plus d’une décennie.
Déjà, dans son rapport d’évaluation de 2011, le programme PEFA (Public Expenditure and Financial Accountability), financé par l’Union européenne, soulignait que le Burundi manquait de capacités pour faire face aux exigences, en particulier en matière de formation et d’encadrement, ce qui se traduisait par des retards dans la mise en œuvre des réformes, notamment dans l’adoption de textes.
En 2012, la Banque africaine s’inquiétait de la longueur d’exécution des projets, due à « l’absence de culture de recevabilité et de résultats ». Plus récemment, en mars 2023, la Banque Mondiale exprimait ses préoccupations sur un niveau de décaissement, d’à peine 21% sur un montant de 1,3 milliard USD accordé par cette institution financière pour la période 2019-2023.
Est-ce l’insuffisance des ressources humaines qualifiées et compétentes ?
Le Burundi dispose des personnes qualifiées suffisantes pour gérer des projets et coordonner les programmes de développement, mais ces personnes, n’étant pas membres du parti au pouvoir, ont été écartées ou ignorées, y compris les experts dans les domaines clés de la santé, de l’éducation, de la recherche-développement. Ceux qui ont la chance, se sont exilés à l’étranger, tandis que ceux qui s’y trouvent déjà, préfèrent y rester, puisqu’ils bénéficient des conditions favorables de travail et de sécurité.
Concrètement, quelles sont les causes qui entravent l’exécution normale des projets ?
Le Burundi souffre d’une crise de gouvernance, de politisation des services techniques et d’un manque de transparence dans la gestion des services de l’Etat. Il est difficile d’évaluer les performances d’un agent de l’Etat ou d’une entreprise publique qui n’ont pas été recrutés sur base de ses compétences professionnelles, mais, plutôt par son affiliation et sa fidélité au parti ou recommandée par une autorité politique.
Malgré l’existence d’une loi faisant la distinction entre les fonctions techniques et politiques, cette loi n’a jamais été respectée. On observe plusieurs dérapages dans ce domaine, comme des recrutements et des promotions qui ne se font pas sur une base objective, l’attribution des marchés de services ou de travaux à des entreprises non compétentes, juste parce qu’ils sont « recommandés » par des personnalités haut placées, dans le langage courant les fameux « ibihangange » et les surfacturations dans les contrats de services ou de travaux.
C’est ce que l’organisation International Crisis Group, dans son rapport en 2012 sur le Burundi, qualifiait de « politisation clientéliste des recrutements dans le secteur public ».
Malgré les faibles performances des agents de l’Etat, l’Assemblée nationale n’arrête pas d’attribuer, chaque année, des notes de 90 pour cent aux institutions étatiques, ce qui veut dire que les hauts responsables sont satisfaits des résultats atteints par leurs fonctionnaires.
Que faire ?
Si réellement les autorités burundaises sont, enfin, convaincues de l’ampleur de cette question de faibles capacités institutionnelles et les conséquences sur la gestion économique du pays, au lieu de blâmer les coordonnateurs des projets, les agents de l’Etat ou les partenaires de développement, devraient s’engager à entreprendre des réformes de l’administration.
Quelles réformes ?
Cesser, immédiatement, la politisation clientéliste des recrutements dans le secteur public, et mettre les hommes qu’il faut aux places qu’il faut dans les administrations publiques, dans la transparence la plus totale. A cet effet, seuls les ministres seraient désignés sur des bases politiques, le reste des cadres devant être recrutés selon leurs compétences et expériences professionnelles.
Promouvoir une administration qui rend des comptes. Les ministres, les coordonnateurs des projets et tous les agents de l’Etat et des entreprises publiques devront rendre des comptes de la gestion des projets ou programmes leur confiés, et lorsque l’un ou l’autre agent se rend coupable de mauvaise gestion ou de corruption, qu’il soit poursuivi et sanctionné, sans aucune interférence d’une quelconque autorité du parti ou de l’administration.
Le Gouvernement devrait autoriser un audit de ses fonctionnaires et de la façon dont ils se sont acquittés de leurs missions respectives, aux niveaux, tant technique, administratif que financier.
D’autres réformes ?
Mettre en place un programme concerté entre le Gouvernement et les partenaires de développement, dont le PNUD, la Banque Mondiale, le FMI, la BAD, l’Union européenne, de renforcement des capacités nationales, notamment, au travers des mécanismes existants d’utilisation des compétences disponibles dans le pays et dans la Diaspora.
Dans ce contexte, il serait demandé au PNUD de financer une étude du renforcement des capacités institutionnelles, dont les recommandations seraient approuvées par le Gouvernement et le Parlement, et mises en œuvre aussitôt que possible.
Reka mvuge ibintu, metered ko urutoke kunda.
Juste pour montrer la promotion ou la vision.
Je vais parler du CNDD/FDD.
Comparez l’ancien président de l’Assemblée Nivyohanyuma et l’actuel.
Comparez Rufyikiri aux deux autres premiers ministres Bunyoni et l’actuel.
Je viens de rentrer d’un voyage au Burundi et ngarutse « ubwanwa bwafutse umunwa ». Même les médias en ligne comme « Iwacu » ne peuvent plus trouver des mots juste pour nous donner uko uBurundi bumeze uno munsi. D’ailleurs les médias en ligne sont devenu rare à part ces quelques videos sur « youtube » dont certains font l’apologie de la médiocrité ; ils dansent sur la misère des barundis.
Une chose seulement ; le Burundi est au bord du gouffre ; l’incompétence est visible partout et dans tout les domaines et elle se sent.
Turakwiye kuvuga ukuri, turakwiye kubwirana ukuri ; aBarundi babishoboye baragiye canke bari munzira bagenda. Sinshaka kurandira kubabeshi qui font l’autriche en mettant leurs têtes sous le sable; « ibintu bimeze neza! ».
Umuti nuko :
1. umukuru w’igihugu yokwifatira ico kibazo ca fuite des cerveaux/compétences muminwe, na canecane abari hanze y’igihugu. Agafata missions zokuja kubonana nabo amaso muyandi.
2. Harakwiye amnistie générale kuvyabaye 2015, kugira ama conditions yogutaha nogutahana imitahe/cerveaux biri hanze bitahukanwe kandi n’icuka kibi kiveho.
3. Harakwiye aba ambassadeurs babishoboye (ubu muma ambassades har’abavuzi b’ingoma z’umugambwe) kugira bashobore guhimiriza no gufasha abarundi bari hanze na canecane les technocrates bashobore gufasha uBurundi. Hariho benshi babahinga kabuhariwe muri Europe, Amérique du Nord eka n’ahandi bashobora guterera batarinze gutaha burundu. Akarorero n’uko uRwanda rwabakoresheje kandi vyafashije !
Il n’y a jamais de mauvaises troupes, il n’y a que de mauvais commandant, comme quelqu’un l’a dit, le poisson… L’échec d’exécution des projets qui en principe sont écrits d’avance, approuvés et ainsi financés est une honte. Si la conception serait relativement difficile, l’exécution ne devrait pas l’être autant.
Le népotisme, clientélisme, corruption, militantisme, … c’est sûr qu’il y en a du côté du gouvernement mais du côté des bailleurs de fonds ils sont bien plus corrompus.
Imaginez un bailleur vous demande un projet, tu prépares un projet bien étudié au moment de l’exécution, il va te dire qu’il n’y a pas eu d’études et recommande des nouvelles études qui vont coûter plus de la moitié du budget. Il faudra alors constituer les DAO et il faudra recruter des experts étrangers pour y mettre des conditions pour éliminer d’office tous les experts locaux. Par exemple dire que le cabinet doit avoir réalisé ce travail dans au moins 3 pays où réalisé un travail similaire alors que c’est la toute première au pays…. Une fois recruté, ces experts font tout pour se créer un nouveau marché ainsi de suite. Quid aux qualités de la plus part de ces soi-disant experts internationaux. La plupart ne connaissent pas grand chose ou ne sont pas du domaine. Et souvent ils font tout pour retarder les projets. Par ailleurs, j’ai déjà assisté où le bailleur défend les soi-disant experts qu’il avait lui-même recruté. Ils le font parce que certains cabinets sont les leurs.
Bien sûr ils profitent la complicité de certains burundais. Ces soi-disant gestionnaires des projets qui sont intéressés par des salaires plus intéressant et ferment les yeux. Quand les délais d’execution des projets sont prolongés c’est vraiment intéressant. C’est le manque du patriotisme.
Je pense que le gouvernement ne devrait pas compter aux bailleurs de fonds pour développer le pays. Je ne vois pas comment quelqu’un qui vient d’autre pays pauvre viendrait t’aider à développer ton pays. Je dis cela parce que la plupart de ces agences sont dirigés ici par les représentants qui viennent des pays africains ou autres pays en développement. Vous voulez qu’ils vous aident à faire ce qu’ils n’ont pas fait pour leurs propres pays. C’est du paradoxe.
Le pays doit avoir confiance en soi et ses citoyens. Identifier les compétences internes et les impliquer dans la préparation des projets. Pour faire les exécuter qu’il pense en priorité à impliquer le secteur privé dans le financement. Le mécanisme du capital participatif est le meilleur modèle pour financer les projets de grande envergure. Au besoin, il peut recourir aux crédits bancaires. Sinon l’argent soi-disant gratuit n’a jamais développé un pays car ce qui ne te coûte rien ne vaut rien.
A bon entendeur salut!
Ba birenge nibumve kuko nibo babwirwa!
En un mot comme en plusieurs.
It’s a shame.
Le poisson pourrit par la tête
Le Burundi a des compétences à l’étranger.Il va falloir les intéresser pour qu’ils rentrent chez eux sinon ce sera difficile de développer le pays par des pratiques népotistes.La formation au Burundi ne donne pas les mêmes outils qu’à l’étranger.
Ak’i muhana kaza imvura ihise!