Dans les quartiers du nord de la capitale économique, Bujumbura, le nombre d’enfants en situation de rue ne cesse d’augmenter. Les arrêts de bus sont devenus leur point de repère. Et pour certains passagers, descendre d’un bus commence à devenir inquiétant.
Les bus qui desservent différents quartiers du nord de la ville de Bujumbura sont confrontés à un problème d’enfants en situation de rue qui accourent vers la portière aussitôt qu’ils sont garés. Ces enfants se précipitent pour demander de l’argent aux passagers.
Comme ils sont devenus nombreux, et n’étant pas sûrs d’avoir tous une âme charitable pour leur laisser quelque chose, certains de ces enfants vont sur les vitres et demandent avec insistance aux passagers juste un billet de 100 francs pour s’acheter un beignet. Si le client n’a pas ce billet demandé, ces enfants revoient vite en baisse leur demande et sollicite une pièce de 50 francs.
Un des passagers qui descend à un arrêt de bus dans le quartier Ngagara se dit très gêné : « Ces enfants vont même jusqu’à nous bloquer le passage comme si donner quelque chose était obligatoire. Avec nos différentes provisions, nous avons peur d’être dépouillés, ils nous encerclent de partout et leur nombre ne cesse d’augmenter », se lamente un client d’un bus visiblement pressé de rentrer.
Un autre client ne cache pas sa colère et leur crie dessus : « Dégagez de mon chemin, vous me bloquer le passage, vous n’avez pas chez vous ? Vous ne voyez pas que c’est l’heure de rentrer, pour des enfants comme vous ? ». Il assure que ces enfants vont bientôt devenir une menace. Mais un autre client dit que des fois, ces enfants se permettent d’arracher des mains de certains clients des téléphones et se dispersent aussitôt, se volatilisent dans la nature.
Enfants en situation de rue et convoyeurs se regardent comme chiens de faïence
Ces enfants ont leur ennemi juré : les convoyeurs de bus, ces derniers les maltraitent et souvent ils se mettent à leur lancer des injures, les traitant de tous les noms.
Vexés, ces gavroches, s’éloignent sous ces invectives et autres remontrances : « Ce sont des bandits en devenir si rien n’est fait, ils n’ont peur de rien à cet âge ».
Ces convoyeurs n’épargnent pas certains passagers qui se montrent cléments envers ces enfants : « C’est votre faute parce que vous leur donnez de l’argent, ils ont vu que ceux qui reviennent du travail sont leur source de revenu, vous le comprendrez qu’ils sont dangereux quand ils vont commencer à vous dépouiller de vos biens ».
La peur se lit sur les visages des femmes à l’approche de ces enfants. A la descente du bus, une femme prend son sac pour prendre quelque chose à donner à l’un des enfants.
A ce geste, c’est toute la « meute » qui se rue vers cette âme charitable. Tout le monde veut être servi : « Moi aussi madame ». Plus d’une dizaine d’enfants l’encerclent et elle n’arrive pas à se dégager de leur emprise. Et c’est un convoyeur qui a suivi la scène qui vole au secours de cette dame.
A cet arrêt de bus se trouve un grand magasin très éclairé et bien achalandé, s’il n’y pas de bus, ces badauds se mettent à poursuivre les clients à la sortie de ce magasin et c’est pour leur demander un billet de 100 francs et à défaut une pièce de 50 francs : « Aide-moi, je ne demande que 100 francs, j’ai faim ». La plupart des clients préfèrent se sauver de peur d’être dépouillés.
Sur presque chaque arrêt de bus, c’est le même scénario mais la seule différence est le nombre d’enfants. Certains arrêts de bus comptent plus d’une dizaine voire même une vingtaine de badauds.
Ces enfants ont un âge variant entre 8 et 15 ans et ils se déplacent d’un endroit à un autre. Tantôt ils se mettent à jouer, tantôt ils se bagarrent mais à la vue d’un bus, ils font la trêve et accourent tous tenter leur chance.
A force de produire des enfants en désordre c’est des bandits que nous mettons au monde.