Laissés à eux-mêmes, les enfants de la rue consomment des stupéfiants. Ils deviennent vulnérables et plus exposés au VIH/Sida. Mais ils n’aiment pas être recueillis dans des centres. <doc2455|left>J. M est séropositif depuis cinq mois. Il affirme avoir été trompé par une jeune femme qu’il ne connaissait pas. Elle lui a fait croire un jour qu’elle désirait avoir un enfant de lui : « J’ignorais tout d’elle, elle m’a promis une somme de cent mille francs /bu après les rapports sexuels. » Une promesse qu’elle a pu honorer avant de disparaître pour toujours. Quelques mois après, J.M a commencé à tomber malade. Mais fautes de moyens, il ne s’est jamais rendu à l’hôpital. Finalement, il a eu la chance d’assister à une campagne de sensibilisation sur le Sida, organisée par des éducateurs de la rue de l’Oeuvre humanitaire pour la Protection et le Développement de l’Enfant en difficulté (OPDE). Conscient du danger qu’il aurait couru, il se fait dépister. C’est à ce moment qu’il apprend son état sérologique. Aujourd’hui, J. M est sous traitement, il est obligé de mendier pour pouvoir manger. Son état de santé ne lui permet plus de travailler Quant à Etienne Abdoul, il a perdu son père à l’âge de 14ans. Depuis, il a opté pour la rue afin d’aider financièrement sa maman. D’après lui, tout enfant de la rue est exposé à cette maladie. « Comme nous vivons dans des conditions difficiles. Nous sommes obligés de nous droguer pour oublier toutes nos souffrances », lance Etienne. Sous l’emprise des drogues, poursuit-il, ils font des viols, des rapports sexuels entre eux (homosexualité) etc. Notre liberté prime Par rapport au VIH/SIDA, ce jeune de dix huit ans souligne que le personnel de l’OPDE aide à la sensibilisation avec l’objectif de les intégrer au centre. C’est une initiative qu’Etienne Abdoul juge bonne dans le sens que les enfants de la rue seront ainsi moins exposés mais l’appel de la rue reste fort. « Même si notre santé prime, notre liberté ne l’est pas moins », précise-t-il. Il estime qu’il fait partie d’une catégorie destinée à vivre dans la rue. Le mieux serait, d’après Etienne, de les laisser mener leurs vies comme ils l’entendent. Même sentiment chez Claude Nimbona, 23ans. Il vit dans la rue depuis dix bonnes années. Il n’a jamais souhaité vivre à l’OPDE, et arrive à subvenir à ses besoins par de petits travaux. D’après lui, l’intégration à l’OPDE ne résoudrait aucun de ses soucis. Par contre, il reconnaît qu’il est aujourd’hui plus exposé. « Cette maladie ne nous laisse pas indifférents. Mais que faire ? Tout homme qui se respecte doit satisfaire ses besoins sexuels. » Claude Nimbona avoue avoir couché avec plusieurs filles dont des prostitués. Il ne se protège que quand il est lucide. Pourtant, se rappelle-t-il, il a déjà assisté aux funérailles de quelques amis emportés par le Sida. Le suivi pas facile D’après Diomède Ntakananirimana, coordinateur national à l’OPDE, il y a trois ans, plusieurs enquêtes ont été menées auprès des enfants de la rue : Il s’est avéré qu’ils mourraient en masse sans savoir pourquoi. Appuyé par des bailleurs, le personnel de l’OPDE a intégré le volet VIH, pour faire une sensibilisation à l’aide des projections des films dans les lieux publics. Des activités, qui ne sont plus malheureusement financées. Après les séances, il appartenait à chacun de prendre la décision de se faire dépister ou pas. Selon M. Ntakananirimana le problème réside au niveau du suivi. La première chose que leur proposent les éducateurs est de quitter la rue. Ce qui pousse la plupart à ne pas revenir récupérer leurs résultats. De plus, ceux qui se retrouvent séropositifs ne prennent pas convenablement le traitement. Le coordonnateur propose à l’Etat de mobiliser des fonds afin d’étudier cette question. L’OPDE et le ministère de la Solidarité ont déjà élaboré le plan stratégique 2011-2015 (qui sortira bientôt). Il ne restera plus qu’à le mettre en vigueur. Diomède Ntakarutimana indique qu’il s’agit de nouvelles stratégies qui pourront permettre d’éradiquer ce problème. Pour lui, la balle est dans le camp du gouvernement. Il doit réagir avant que cette maladie ne continue à faire des ravages parmi les enfants de la rue. L’Œuvre Humanitaire pour la Protection et le Développement de l’Enfant en difficulté (OPDE) est née en septembre 1990 à Bujumbura. C’est une association sans but lucratif qui défend les droits des enfants en situation de vulnérabilité. Sa vision est de permettre à un plus grand nombre d’enfants vulnérables burundais de sortir de leurs conditions précaires et de devenir acteurs du développement de leur pays.