L’affaire Kenta rappelle aussi que les enfants sont encore affectés par les violences de tous genres. A l’image de ces chiffres rendus publics par l’Observatoire Ineza des Droits de l’Enfant au Burundi (OIDEB).
A base « d’une liste non exhaustive, mais échantillonnaire », Athanase Rwamo, représentant légal de l’OIDEB fait part de la situation des principales formes de violation de droits de l’enfant durant les mois d’avril et mai 2011. L’enquête, réalisée aux chefs lieux de toutes les provinces du pays, montre que :
– 10 enfants ont été tués pendant les deux mois dont 3 égorgés à Ruyigi et Musongati, 1 par grenade à Ngozi, 2 par balles à Rohero et Ruziba, 1 jeté dans la rivière Mpimba, 2 brûlés vifs par le père et 1 enterré vivant par sa tante maternelle à Mabayi (Cibitoke), mais déterré et sauvé de justesse.
– 34 enfants ont été victimes de viols sexuels
– 49 enfants ont été spoliés de leurs biens
– 18 ont été victimes de violences domestiques
– 61 ont été victimes d’abandon et de non assistance
– 7 victimes d’accident et abandonnés à leur sort
– 153 victimes d’exploitation économique
– 11 victimes de mauvais traitements corporels
– 11 victimes de discrimination dont 10 albinos
– 5.051 ont abandonné l’école dans la seule province de Ruyigi, alors qu’ils sont à 7 dans la Mairie de Bujumbura
– 1913 ne sont pas inscrits à l’état-civil
– 17 recherchent la paternité
– 11 sollicitent une institution d’hébergement
– 7 sont impliqués dans la vente des stupéfiants (alcool dit {umunanasi})
– 10 sont des enfants dont les parents se disputent la garde.
Selon le représentant légal de l’OIDEB, son organisation a ouvert 65 dossiers en justice pour la défense de ces enfants durant la période du 02 janvier 2010 au 30 avril 2011. Parmi ces dossiers 16 sont déjà clôturés, 9 sont en délibéré, 2 ont été réglés à l’amiable, et 28 autres sont soit pendants ou en appel. « Les enfants restent toujours des victimes ciblés des assassinats et d’autres formes de violence.» Telle est l’affirmation du représentant légal de l’OIDEB, qui illustre combien « la mise en application par le Burundi de la Convention Universelle relative aux Droits de l’Enfant, ratifiée en août 1990, n’est pas encore satisfaisante.
Pour Goreth Girukwishaka, coordinatrice nationale de l’OIDEB, «c’est la volonté politique qui a manqué pour que cette Convention soit mise en application.» Explications : « Il s’agit d’un plan d’action accompagné de moyens et d’outils pour le travail. Si le gouvernement veut aujourd’hui qu’il n’y ait pas d’enfants de la rue, il n’y en aura pas. Il met les outils en marche, il affecte le budget, il demande un plan d’action, et la machine est mise en marche. Mais tant que ce n’est pas une priorité pour le gouvernement, le phénomène perdure et s’accroît.»
Au-delà de cette situation, Mme Girukwishaka reconnaît que l’OIDEB collabore bien avec le gouvernement mais que cette collaboration reste technique car l’Etat ne subventionne pas cette organisation. « L’OIDEB navigue avec des moyens puisé chez des bailleurs tels que l’ambassade de Belgique, l’Union Européenne et des ONGs étrangères. Et pas un centime de l’Etat», complète Athanase Rwamo. Et de conclure sur la nécessité d’une éducation des communautés sur le sujet : «La plupart des Burundais savent que les enfants ont des devoirs mais ne savent pas qu’ils ont des droits ».