Les commissions pour le renouvellement des assurances ont été réduites, les courtiers d’assurances ne décolèrent pas et demandent la révision de cette mesure. L’organe de régulation reconnaît la contribution des courtiers et leur conseille d’attendre la mise en place de la nouvelle commission.
Un courtier qui renouvelle une assurance pour un client perd de l’argent. Ce sont les conséquences d’une mesure en vigueur depuis quelque temps.
« 50% est la réduction du taux de commissions pour le renouvellement des assurances, parfois cela arrive même à 70%. Cela nous conduit à travailler à perte », regrette M. D., courtier d’assurance depuis trois ans.
Il explique qu’avant la décision, le courtier recevait la même commission pour la première année et les années suivantes. Mais, actuellement, il reçoit la totalité des commissions pour la première année uniquement.
Les années suivantes, poursuit-il, sont considérées comme renouvellement et on nous donne la moitié des commissions : « A titre d’exemple, avant cette mesure, si un courtier amenait un client pour l’assurance automobile, le courtier recevait une commission de 5% sur la prime nette payée. Si c’est 17.000 BIF, il recevait 850 BIF. Mais, actuellement ce n’est que 2,5%, soit 425 BIF », tient-il à clarifier.
L’IBAB réclame la révision de cette mesure
Même son de cloche pour l’association des courtiers d’assurances du Burundi (IBAB), Abdoul Salum Rucekeri, président de ladite association, déplore la mesure de revoir à la baisse le taux des commissions jusqu’à 70% pour le renouvellement des polices.
Pour lui, cette mesure est injuste. « Nous n’avons pas été consultés lors des réunions de révision des commissions pour le renouvellement des polices. Pourtant, dans les réunions précédentes, nous étions invités et nos opinions étaient prises en considération. Cela a été fait plus de trois fois et cela nous arrangeait tous ».
De plus, ajoute M. Rucekeri, lors de la fixation des commissions, ils se référaient sur les taux de commission des pays de la sous-région. « Ce qui n’a pas été le cas pour la dernière révision des commissions. »
M. Rucekeri indique qu’ils ont écrit de nombreuses lettres à l’Autorité de régulation et de contrôle des assurances qui leur répond à chaque fois d’attendre la mise en place de la commission. « Cela fait plus d’une année que nous attendons cette commission, mais en vain »
De surcroît, Il fait savoir que cette mesure crée le désordre dans l’industrie d’assurances. « Comme cette mesure concerne le renouvellement chez un même assureur, certains courtiers changent d’assureur pour ne pas perdre, car s’ils gardent l’ancien assureur, leurs commissions vont être réduites jusqu’à 70%. Vous comprenez que cela crée du désordre », précise M. Rucekeri.
Selon lui, même les assureurs ont été touchés par la mesure et pour certains, leur chiffre d’affaires a dégringolé. « Cette situation freine également la promotion du secteur des assurances. », précise le président de l’IBAB.
Il implore le régulateur, l’ARCA, d’intervenir dans les plus brefs délais afin de promouvoir davantage l’expansion du secteur des assurances. Il demande entre autres de garder les anciennes commissions pour le renouvellement, et se référer au taux de commissions des pays de la sous-région et la consultation de toutes les parties prenantes avant le changement.
Les assureurs également touchés
D. C., haut cadre d’une maison d’assurances, indique que les sociétés de courtage les aident dans le recrutement et la fidélisation des clients. Il assure que les choses allaient à merveille jusqu’à la venue de la mesure de réduire leurs commissions. Or, ce sont les commissions qui font tenir les bureaux de courtage.
« Nous avions beaucoup de clients qui souscrivaient une assurance chez nous via les courtiers. Maintenant, pour le renouvellement, les courtiers vont changer leur assureur avec raison, car ils ne peuvent pas accepter de perdre 50 à 70% des commissions. Nous craignons alors de travailler à perte », raconte-t-il.
Inquiétude partagée par un autre agent d’une société d’assurance qui a voulu garder l’anonymat : « Personne ne peut accepter de renouveler l’assurance chez son premier assureur, car il doit perdre autour de 50% des commissions. Ce dernier change d’assureur pour que son dossier soit considéré comme « une nouvelle affaire » et ainsi recevoir la totalité des commissions. »
Toutefois, la contribution des sociétés de courtage a été reconnue par le secrétaire général de l’ARCA, lors de la première conférence des courtiers d’assurance. Il leur a même demandé de contribuer à doubler le taux de pénétration des assurances, d’ici cinq ans.
L’apport des sociétés de courtage en assurances est remarquable. Pour les primes émises en assurances Non-Vie (l’ensemble des conventions qui ne sont pas liées directement à la vie, notamment l’incendie, automobile, transport des marchandises,…), il oscille autour de 30% depuis 2016.
Pour l’assurance Vie (elle a l’objet de garantir le versement d’une certaine somme d’argent lorsque survient un évènement lié à l’assuré, comme le décès ou la maladie), il est passée de 2,60% en 2016 pour atteindre 9,16% en 2020.
L’ARCA se défend
« Cette décision a été prise par la commission de supervision et de régulation des assurances et l’ARCA n’est même pas membre de cette dernière. Elle est seulement invitée pour noter les recommandations et les décisions prises afin de les mettre en application par la suite », s’explique Joseph Butore, secrétaire général de l’ARCA.
Il précise que cette décision a été prise par l’organe qui est supérieur à l’ARCA: « Nous attendons alors la mise en place d’une nouvelle commission afin qu’elle se prononce là-dessus.»
Pour lui, jusqu’à présent, il n’y a pas d’indicateurs qui montrent que l’industrie d’assurances sera affectée par la décision de réduire les taux de commission pour les courtiers.
M. Butore rassure les courtiers d’assurances que la commission sera bientôt nommée et que leurs doléances seront prises en considération.
Sur la question de savoir à quelle date sera mise en place la commission, on a essayé de joindre la porte-parole du ministère de tutelle, en vain.
« Comme cette mesure concerne le renouvellement chez un même assureur, certains courtiers changent d’assureur pour ne pas perdre, car s’ils gardent l’ancien assureur, leurs commissions vont être réduites jusqu’à 70%. Vous comprenez que cela crée du désordre », précise M. Rucekeri.
Un client d’une assurance signe-t-il un contrat avec le courtier de sorte que ce dernier pourrait l’inciter/l’obliger à changer de compagnie d’assurance même s’il était satisfait du service de l’assureur?