Jacques Kenese, gouverneur de Bubanza, estime que l’attaque du 10 août 2011 dans laquelle un militaire a été tué et deux bonnes sœurs grièvement blessées à Gihanga, n’avait aucun rapport avec la visite du Président sud-africain. Il parle de simples groupes de bandits en provenance de la République Démocratique du Congo (RDC).
D’après vos enquêtes, qui sont les auteurs de cette attaque ?
Des groupes de voleurs venant de la RDC, qui veulent s’enrichir à moindre frais en tuant des gens et en brûlant des véhicules.
Pourtant, ce n’est pas la première fois que Bubanza est le théâtre de pareille agression. Et la population parle de gens bien organisés ayant tous les traits de combattants…
Notre province étant frontalière à la RDC, les armes circulent facilement. Certains malfaiteurs peuvent traverser clandestinement la rivière Rusizi, se frayer le chemin et utiliser le sol congolais pour commettre des vols et assassinats à Bubanza. Toutefois, nous restons vigilants et les forces de défense font tout pour bien garder les frontières. De plus, il y a toujours au pays des gens qui cachent des armes en dehors de leurs maisons, craignant des fouilles, des perquisitions. Je doute par exemple que dans la forêt de la Rukoko, si on devait fouiller, on n’y trouve pas d’armes cachées. Nous apprenons même que certains détenteurs d’armes les font louer à des malfaiteurs. Un combattant digne de ce nom ne tue pas des civils innocents. Il s’attaque aux forces de l’ordre.
Vous mettez donc en doute le travail de la commission de désarmement ?
Non, elle a sa raison d’être. Car si nous sommes là, c’est qu’elle fait de son mieux, compte tenu des armes qui pullulaient dans la population, il y a peu. Cependant, il faut la doter encore de moyens de travail, par exemple lui procurer des engins pour détecter des armes cachées.
Une opinion estime que l’attaque du 10 août qui a coïncidé avec l’arrivée du Président Zuma était une façon de dire que la rébellion existe malgré les dénégations du gouvernement. Qu’en dites-vous ?
Il n’y a aucun rapport. Pour qu’une rébellion puisse s’enraciner, il faut qu’elle ait des motivations profondes. Or, aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Qu’il y ait des gens qui veulent exploiter le volet électoral soi-disant sous prétexte que des élections ont été trichées, c’est une mauvaise stratégie. Qu’ils attendent le rendez-vous électoral de 2015. S’ils veulent recourir à la guerre, l’Etat va les combattre avec la dernière énergie.
Certaines informations font état de la présence des hommes d’Agathon Rwasa, votre ancien compagnon de lutte, en RDC. Qu’en savez-vous ?
Pas grand-chose. Mais je peux affirmer que M. Rwasa n’a aucune force aujourd’hui pour mener une rébellion. Le gouvernement, avec sa politique qui consiste à occuper la jeunesse en l’incitant à se regrouper au sein des associations pour créer elle-même de l’emploi, donne peu de chance aux enrôleurs. En outre, le contexte sous-régional ne le lui permet pas : aucun pays de la Communauté Est Africaine ne peut aujourd’hui abriter une rébellion. A moins que M. Rwasa recrute des mercenaires!
Si vous dites qu’un vrai combattant s’attaque aux forces de l’ordre, dans ce cas, vous confirmez que ceux qui attaquent des positions policières sont des rebelles ?
Pas du tout. J’ai été dans une rébellion, je sais comment elle naît et grandit. Quand bien même il y aurait un groupe de bandits qui se transformerait en groupe de rebelles, il aurait peu de chance de réussir. Il est vrai que trois ou six personnes parmi ces malfaiteurs détiennent des armes. Est-ce que cela suffit pour les appeler des combattants ? Je le dirai et le répéterai, ces hommes qui tuent et volent sont des bandits. D’ailleurs, ils ne se sont pas encore déclarés. Et quand bien même ils le feraient, cela n’empêcherait pas le gouvernement de les combattre.