« Si vous faites la comparaison avec l’ambiance pré-électorale d’avant les élections de 2020, on ne voit pas maintenant des partis politiques qui essaient de rivaliser en termes de compétition politique alors qu’avant, en 2019, il y avait des partis qui avaient des visions complètement différentes sur la façon dont le pays devrait être géré. Cela a occasionné une certaine effervescence politique qu’on ne voit pas aujourd’hui. » Cette analyse d’un politicologue vient répondre à l’enquête réalisée par Iwacu sur les formations politiques au lendemain des rendez-vous électoraux de 2020. La voix de l’opposition s’est presque éteinte.
Il n’y a vraiment pas de partis politiques qui se font face. Ils sont quasiment absents au terrain alors qu’ils devraient définir des programmes politiques clairs, et des projets de société. Bref, assurer une éducation politique à la base. Comment en est-on arrivé là ? Quel est l’avenir de l’opposition au Burundi ? Peut-on s’attendre à une recomposition des partis ?
L’Accord d’Arusha avait institutionnalisé le gouvernement d’union nationale en tant que mécanisme de pacification politique. Cet arrangement de partage du gâteau, ancré dans la Constitution de 2005 fondée sur cet Accord, a garanti un nombre de postes ministériels proportionnel à la représentation dans le Parlement à chaque parti obtenant au moins 5 % des voix lors des élections législatives. Ce que certains analystes politiques qualifiaient de « modèle associatif » de partage du pouvoir. La Constitution du 7 juin 2018 a changé la donne.
Elle n’oblige plus le vainqueur des élections à former un gouvernement d’union nationale. Le gagnant rafle la mise, « the winner takes it all ».
Dans le contexte burundais où l’absence au gouvernement est synonyme de l’exclusion de la vie économique, la représentation au gouvernement constitue une condition de survie des partis politiques et une ressource pour recruter, fidéliser et retenir les militants et les cadres. La différence entre parti au pouvoir et parti d’opposition étant nette, cela devrait normalement permettre aux autres formations politiques de fédérer autour de deux forces politiques qui dominent la scène politique.
Agréé en février 2019, le Congrès national pour la liberté, CNL, a démontré sa capacité à mobiliser ses membres et à rallier des électeurs de différents milieux. Cependant, il a été constaté que la direction était entre les mains d’un seul homme, Agathon Rwasa. La loyauté des membres du CNL envers leur chef charismatique Rwasa était extrêmement élevée avant les élections. Le parti de l’aigle, au pouvoir, l’a très bien compris. Depuis le 18 mars 2024, le pouvoir ne reconnaît plus Agathon Rwasa comme chef du parti principal d’opposition, le CNL. M. Rwasa dénoncera « un coup de force orchestré par le parti au pouvoir, à un an des législatives et communales. » Les carottes sont cuites pour l’opposition ? Plus rien à faire ?
La politique n’est pas statique, elle ne cède pas à la fatalité. Toutefois, l’annonce faite par le président de la CENI que la présentation du calendrier de dépôt et de vérification des candidatures est prévue du 9 au 24 décembre 2024 a suscité de vives réactions et de l’émoi parmi les politiques. Alors que les élections législatives et des conseillers communaux se tiendront le 5 juin 2025, les sénatoriales se tiendront le 23 juillet 2025. « Que faire de nos militants qui nous rejoindront en mars ? C’est terminé, les élections sont déjà finies… », s’interrogent certains politiciens.
Comparaison n’est pas raison. La victoire de l’opposant sénégalais Bassirou Diomaye Faye dès le premier tour de la présidentielle, encore en prison une dizaine de jours avant le scrutin donne matière à réflexion.
Je n’arrive pas à m’expliquer pourquoi il y a moins de dynamisme dans l’organisation des partis d’opposition en vue des préparations des futures élections.
Pour rappel, dans la période des élections 2019, il y avait moins de problèmes en général. Pour le détail, notons qu’il y avait plus d’eau dans les robinets, il y avait plus de carburant dans les stations, plus d’électricité dans le réseau, plus de boissons à la brasserie, plus de postes à pourvoir à la fonction publique, plus de haricots dans les assiettes, plus de sucre, plus de produits à bon marché, plus de pupitres dans les écoles, plus de médicaments dans les pharmacies, plus d’argent dans les poches, plus de nourriture dans les ménage … vous pouvez allonger la liste.
Justement ce que nous avions en « plus » à cette période (bien sûr qui parlait en faveur du pouvoir), nous l’avons en « moins » aujourd’hui. Ce qui logiquement devrait booster et donner des arguments de poids à l’opposition pour « avoir envie d’avoir envie » de s’organiser énergiquement pour s’emparer du pouvoir.
L’occasion est exceptionnellement favorable; comment expliquer ce manque d’enthousiasme?
Le Frodebu était bien parti pour occuper la place du FNL mais au fur des mois. Le dynamisme n’est pas là
« Dans le contexte burundais où l’absence au gouvernement est synonyme de l’exclusion de la vie économique, la représentation au gouvernement constitue une condition de survie des partis politiques et une ressource pour recruter, fidéliser et retenir les militants et les cadres. »
Triste réalité. Combien de partis au Burundi ont une idéologie? Demandez au parti de l’aigle son projet de société… La réponse te sera donnée à l’avènement du Christ (gushika Yezu agarutse).
« Si vous faites la comparaison avec l’ambiance pré-électorale d’avant les élections de 2020, on ne voit pas maintenant des partis politiques qui essaient de rivaliser en termes de compétition politique alors qu’avant, en 2019, il y avait des partis qui avaient des visions complètement différentes sur la façon dont le pays devrait être géré. Cela a occasionné une certaine effervescence politique qu’on ne voit pas aujourd’hui. » selon ce politologue que vous citez….
J’ai eu le privilège de côtoyer d’autres systèmes politiques dans le monde pour me rendre compte de comment les périodes pré-électorales sont animées. Sauf dans des pays où le vote est obligatoire, c’est très rare de voir le peuple s’emballer pour ce genre d’événements….
Chez nous, comment voulez-vous que les choses se passent autrement si les permanences des partis se confondent aux services de l’emploi ( Mains d’œuvre pour reprendre le bon terme)?.
Malheur à celui qui critique!
Regarde ce qui se passe à Kigobe pour vous rendre compte que l’AN est plutôt une section du CNDD-FDD de Kigobe! Ceci est par ailleurs valable dans toute l’administartion. Les administrateurs, à quelques exceptions près, se comportent en agent du parti de l’Aîgle!
Mwirambire Bana b’Imana
I have a dream:
Voir tous les partis de l’opposition se coaliser pour un même pari ! L’Uprona (et tout ce qui en dérive), le Frodebu (et tout ce qui en dérive), le FNL/CNL (du moins ce qui en reste) et les autres UPD, MSD, … tous contre le CNDD-FDD lors des prochaines élections de 2025/2027. Evidemment, cela suppose que tous les leaders de ces partis acceptent de sortir de leurs egos individualistes. Les deux Nkurunziza, Olivier et Patrick, au côté d’autres leaders de l’opposition, ensemble pour une vision politique, même simplement électoraliste. Après tout, il y a beaucoup de pays où ce sont des coalitions qui gouvernent. Voyez l’Italie de Meloni, voyez l’Espagne de Sanchez. Pourquoi pas le Burundi?
Ce n’est qu’un rêve. I have a dream. Et qui sait! Yes we can !
»Alors que les élections législatives et des conseillers communaux se tiendront le 5 juin 2025, les sénatoriales se tiendront le 23 juillet 2025. « Que faire de nos militants qui nous rejoindront en mars ? » Si les partis politiques de l’opposition comptent sur leurs militants de la dernière heure pour défendre leurs programmes, laissez-moi rire pour mieux pleurer.
« Dans le contexte burundais où l’absence au gouvernement est synonyme de l’exclusion de la vie économique, la représentation au gouvernement constitue une condition de survie des partis politiques et une ressource pour recruter, fidéliser et retenir les militants et les cadres. »
Donc politique = clientélisme au Burundi ? L’intérêt supérieur n’existerait plus ?
@ Ishimwe
Bien vu! Une belle façon de réduire nos formations politiques à des »partis alimentaires ». Bien entendu dans ces conditions, on parlera plus d’opposition de proposition ou de projet de société alternatif.
»ON NE PARLERA PLUS »
@Ishimwe
« L’intérêt supérieur n’existerait plus ? »
Je serais (très) intéressé de savoir à quel moment l’intérêt supérieur aurait existé dans ce pays.
Oh ! Y que je vous comprends. L’intérêt supérieur a existé pendant le temps de la rosée : les quelques mois au pouvoir de nos héros.
Là-dessus je peux acquiescer