A l’occasion de la Journée internationale des archives célébrée e 9 juin de chaque année, Félicien Niyonzima, bibliothécaire, archiviste et documentariste à l’école doctorale de l’Université du Burundi, appelle le Gouvernement à prêter attention aux documents d’archives.
Qu’entend-on par archivage numérique ?
Appelée aussi archivage électronique, l’archivage numérique désigne la gestion des documents et les données numériques. Et cela commence dès la création du document.
A ce moment-là, nous distinguons trois catégories de documents : il y a les archives courantes, les archives semi-courantes et les archives définitives ou les archives historiques.
Les archives courantes sont des documents de bureau qu’on utilise fréquemment. Les archives semi-courantes sont des documents qu’on n’utilise pas souvent mais qu’on garde près du bureau.
Les archives définitives peuvent être conservées à la cave. Les gens croient souvent que ce sont de vieux documents dont nul n’a besoin. Or, ce type de documents est indispensable, non seulement pour l’histoire mais aussi comme preuves. L’archivage numérique permet la sécurisation du document. De plus, avec l’archivage numérique, c’est du temps et de l’espace gagnés.
Quel est l’état des lieux de l’archivage au Burundi ?
Nous sommes très en retard par rapport à d’autres pays. Je doute même qu’on puisse un jour rattraper ce retard.
Qu’est-ce qui, selon vous, explique ce retard ?
Premièrement, les autorités burundaises ne sont pas sensibilisées sur la gestion moderne des documents, pire, sur la gestion des documents de manière générale.
Deuxièmement, la plupart des gens qui gèrent ces documents ne sont pas des professionnels. Il y a une carence de formation en la matière. Nous observons d’ailleurs à ce niveau que ce ne sont pas ceux qui ont des compétences en la matière qui sont engagés mais des gens qui viennent souvent d’autres facultés et sans aucune expérience.
Au niveau de l’archivage électronique, il y a des logiciels dédiés à la conservation des documents. Or aujourd’hui, il y a un manque criant de professionnels pouvant les utiliser par manque de formation. Troisièmement, les professionnels ne se mettent pas ensemble pour valoriser leur métier.
Quelles solutions pour que la situation aille mieux dans ce domaine ?
Que les non-professionnels qui travaillent dans l’archivage, dans les bibliothèques ou autres puissent bénéficier de formation. Il faut que le Gouvernement accorde une attention particulière aux documents d’archives qui sont d’une grande utilité pour des franges assez larges de la population, y compris les politiques eux-mêmes.
Que l’information documentaire trouve la place qu’elle mérite et que les professionnels dans ce domaine se mettent en association et s’associer à d’autres associations étrangères « pour voir ce qui se passe ailleurs ».
Archives dites vous?
1. Chez nous comme dans beaucoup de pays africains, nous sommes de la tradition orale. Tout se conserve dans la tête et quand on meurt c’est la bibliothèque qui brûle dit-on.
2. L’archivage des documents rime avec richesse et civilisation des mœurs et comportements. En effet, comment voulez-vous que le document papier soit conservé alors que le vendeur de sel et petits poissons n’a pas d’emballage appropriée ? Ou que dans certaines maisons les serviettes hygiéniques quotidiennes sont hors de prix?. Les cabaretiers ne disposent pas encore de facturiers standards? Donc autant de contraintes qui obligent les gens à se servir dans les bureaux et autres services, surtout que le planton mal payé y a trouvé une source de financement de quelques repas.
Une solution. Comme on chasse à coup de matraque le commerçant ambulant des fruits dans la ville de Bujumbura , qu’on fasse la même chose pour les emballages dans les marchés et les factures dans les buvettes.
De plus, à défaut visiter les toilettes des ménages, l’Etat peut jouer sur les prix des papiers hygiéniques, en abandonnant une partie de la taxe sur ce produit.
Rugwe
Parlons justement de l’archivage de vieux documents, indispensables à la compréhension de l’histoire. Partons du cas bien précis de la CVR, qui tente actuellement de faire la lumière sur les tragédies du passé. Elle fait parler les témoins, les survivants, elle fait parler les tombes… mais je ne sais pas si elle fait parler les archives. Je sais d’expérience que c’est très difficile, voire même impossible, d’accéder aux documents liés à la tragédie de 72 par exemple. Il faut aller chez les « colons » pour mettre la main sur quelques documents accessibles. Pourtant beaucoup de documents écrits, manuscrits et sonores ont circulé entre les administrations burundaises à tous les niveaux. Ont-ils été détruits ou cachés quelque part? S’ils existent, c’est le moment de les déclassifier et les mettre à disposition des chercheurs, surtout de la CVR qui en a besoin pour donner plus de crédibilité à ses recherches.
@Jereve
Vous écrivez: »Il faut aller chez les “colons” pour mettre la main sur quelques documents accessibles. Pourtant beaucoup de documents écrits, manuscrits et sonores ont circulé entre les administrations burundaises à tous les niveaux… »
2. Mon commentaire
En 1989, quand je suis allé étudier dans une école dans l’état d’Arizona (sud-ouest des Etats-Unis) j’ai été agréablement surpris de trouver dans la bibliothèque le livre intitulé « Burundi The tragic years ».
Ce livre est consacré aux événements de 1972 et il a été publié en 1974 par Thomas Patrick Melady qui était l’ambassadeur des Etats-Unis au Burundi de novembre 1969 à juin 1972.
J’ai toujours la photocopie de quelques premières pages de ce livre qui était catalogué sous le numéro DT449.B88 M44.
Aujourd’hui, je suis surpris que ce livre est encore en vente sur le site d’Amazon.
https://www.amazon.com/Burundi-Tragic-Thomas-P-Melady/dp/0883440458/ref=sr_1_1?dchild=1&keywords=burundi+the+tragic+years&qid=1623434758&sr=8-1