Au centre-ville de la capitale économique, Bujumbura, les vendeuses des produits vivriers sont désespérées après la mesure du maire de la ville leur interdisant ce commerce ambulant. Selon ces dernières, ce travail était leur seul gagne-pain et la date du 24 novembre, jour d’entrée en vigueur de cette mesure est à marquer d’une pierre noire.
Pour ces vendeuses ambulantes vivant du petit commerce de même que d’autres jeunes gens proposant des œufs durs, des cacahuètes et des biscuits et autre confiserie dans différents parkings, c’est de nouveau le cauchemar de vivre une vie incertaine voire pire.
Tout autour de l’ancien marché central, plusieurs vendeuses sont assises en petits groupes de part et d’autre des différentes allées. D’humeur querelleuse pour s’arracher d’éventuels clients mais sans méchanceté, prêtes à des joutes avec les policiers en mission de maintien de l’ordre, ces battantes ne se laissent pas abattre, mais la dernière mesure du maire passe mal.
La plupart sont d’humeur massacrante, elles maugréent, semblent ruminer une colère noire, elles regardent du coin de l’œil les policiers déployés pour faire respecter la mesure du maire : leurs paniers remplis de vivres et autres légumes ont disparu, les allées sont subitement devenues grandes.
Les jeunes gens, épaule collée aux vitres des bus, proposant aux passagers déjà installés des cacahuètes emballées dans des sachets pendant au bord des palettes d’œufs ont également disparu pour laisser la place à leurs collègues proposant de petites coupures et des pièces aux convoyeurs soucieux avec les gros billets. Ces derniers en profitent pour étaler sur leurs tabourets quelques paquets de cigarettes vendus au détail.
L’air désespéré, l’une des femmes interpelle à haute voix les passants et leur demande de quoi s’acheter une bouteille d’eau : « S’il vous plaît donnez-moi un peu d’argent, vous ne voyez pas que je suis en train de mourir de soif », crie-t-elle pour attirer l’attention des passants.
Une autre ex vendeuse ambulante assise juste à côté approuve le désespoir de son amie et confie qu’elles vont commencer à mendier : « La dernière mesure de la mairie nous empêche de vivre dignement, et bien nous allons commencer à faire le mendiant ».
Ce groupe de femmes assises sur le trottoir à l’entrée de La Régie nationale des postes sont unanimes sur une chose, si la mairie ne veut pas leur donner un capital conséquent et leur montrer où aller travailler, elles prendront l’argent des poches des hommes ou des sacs des femmes qui rentrent du travail : « Nous venons vendre ici avec seulement un capital de 20 000 BIF parce que nous ne pouvons pas avoir les centaines de milliers de BIF pour se procurer des stands dans différents marchés ».
Les vendeuses ne comprennent pas comment une mesure peut être prise, sans consulter les concernés et sans leur donner le temps d’écouler les marchandises. Ces dames affirment qu’elles en avaient déjà dans leurs stocks : « Quand la décision de chasser les taxi-motos, les taxi-vélos et les tuk-tuk en plein centre-ville est tombé, il leur a été accordé du temps de se préparer conséquemment, mais nous, nos marchandises sont en train de pourrir dans nos maisons. Certaines d’entre nous sont des veuves et élèvent des orphelins, qu’est-ce que nous allons leur donner ».
Ces « vaillantes femmes », comme elles se font appeler, dénoncent ce qu’elles qualifient d’indifférences avec laquelle certaines autorités font preuve en leur imposant des sanctions.
Ces vendeuses ambulantes interpellent la Première dame à faire quelque chose : « L’ex Première dame a plaidé pour nous et la mairie nous a laissées tranquille, il faut que l’actuelle Première dame face de même pour que nous puissions chercher de quoi nourrir nos enfants ».
Signalons que dans un communiqué signé par le maire de la ville de Bujumbura, sorti ce 22 novembre est formel : pour des « raisons de sécurité et de salubrité », il est strictement interdit aux vendeurs se trouvant tout autour de l’ancien marché central et les vendeurs ambulants dans la ville de ne plus exercer ce métier à partir de ce 24 de ce même mois.
Je trouve que l’état n’est pas tolérant quand il s’agit de s’en prendre aux plus pauvres. Pourquoi ne pas créer des espaces en centre-ville à disposition de ces petites vendeuses aux ressources très limitées. On les chasse comme des voleurs ou des criminels. Ce n’est pas juste.
Pourtant la population est tolérante envers les manquements de l’état: combien d’infrastructures publiques sont mal entretenues ou en ruine? Et les pénuries de devises et de carburant? La liste est longue de ces mal fonctionnements qui sont imputables à l’état. Et quand un Ministre nous dit, ne vous en faites pas le problème est connu, et la solution est en cours. N’est-ce pas que nous patientons sagement? Pourquoi l’état ne pourrait-il pas patienter et laisser les pauvres se débrouiller tout seuls comme ils peuvent, en attendant qu’on leur trouve des solutions plus adéquates.