La direction générale de l’urbanisme et de l’habitat donne un délai d’un mois pour que les parcelles soient mises en valeur suivant les normes urbanistiques », écrit Emérence Ntahonkuriye, son directeurgénéral, dans un communiqué de mise en demeure, du 29 mai. Et de prévenir qu’au-delà de ce délai, elles leur seront retirées définitivement. « Et ce, sans aucune autre forme d’avertissement ».
Chez les concernés, la pression monte. A Kizingwe ou Nyabugete, zone Kanyosha, commune Muha, au sud de Bujumbura, des ouvriers s’activent. Idem à Kiyange, zone Buterere, commune Ntahangwa au nord de la capitale. Des bennes remplies de maillot, des cailloux … font des va-et-vient. Certains propriétaires font des acrobaties pour n’y installer ne fût-ce qu’une fondation ou une clôture. Ceux qui avaient mis en jachère leurs chantiers se sont également réveillés. Des travaux de finissage sont en cours. Dans d’autres parcelles, on y trouve des champs verdoyants de maïs, de manioc, etc. Les travaux n’ont pas encore commencé.
Dans les quartiers touchés par la crise de 1993, la situation est similaire. Que ça soit à Kamenge, Kinama, Musaga, etc. les propriétaires des parcelles vides attendent la date fatidique. Aucun activité n’y est en train de se passer. Il ne reste que des fondations dans ces parcelles où les maisons ont été détruites durant la crise. Même à Nyabugete ou Kizingwe, il s’agit des travaux d’urgence. « Je vais tout simplement ériger la clôture pour que ma parcelle ne me soit pas retirée », confie un homme rencontré à Nyabugete. Et d’avouer qu’il n’a pas d’argent pour entreprendre les travaux de construction. Pour acheter cette parcelle, il avait contracté une dette auprès d’une banque.
« Une décision unilatérale »
« Comment est-ce qu’on peu prendre une telle décision sans nous consulter ? Au lieu de menacer de nous retirer nos parcelles, il serait humain de s’informer sur les raisons qui nous ont empêchés de les mettre en valeur », lâche un des propriétaires de parcelle à Kizingwe. Pour lui, il s’agit d’une décision unilatérale. Actuellement, sa grande préoccupation est de joindre les deux bouts du mois et nourrir sa famille.
« Lorsque j’ai acheté cette parcelle, mon commerce était florissant. Aujourd’hui, c’est courant de passer toute une journée sans aucun client ». I.J., un autre propriétaire de Kiyange, à Buterere, crie à l’injustice : « Nous n’avons aucune dette à l’urbanisme. Et comment cherche-t-il à voler nos parcelles ? ». Et de demander à cette direction de revenir sur cette décision. Sinon, avertit-il, personne ne va accepter qu’on lui ôte une parcelle difficilement obtenue. Et de lâcher : « Vu le degré de pauvreté dans le pays, suite à la crise, notre préoccupation n’est pas de construire des maisons, d’ériger des étages, mais de joindre les deux bouts du mois.» Pour lui, avant de prendre une telle décision, les décideurs devaient d’abord penser à la relance de l’économie nationale.
Le ministre des Transports, des Travaux publics, de l’Equipement et de l’Aménagement du territoire a finalement annulé cette décision. Dans une correspondance du 12 juin, le ministre Jean-Bosco Ntunzwenimana, a annoncé qu’après analyse des textes légaux en matière de gestion des terres concédées, la décision de l’urbanisme ne respecte pas les procédures tant au niveau de la forme que du fond.
Ainsi, il a demandé son annulation et un rapport endéans 30 jours de l’état des lieux de la mise en valeur des parcelles, quartier par quartier. « Et ce, avant de procéder à la mise en demeure qui se conforme au code foncier ».