Dimanche 01 septembre 2024

Économie

Les 3 pétroliers annoncés se font toujours attendre

Les 3 pétroliers annoncés se font toujours attendre
Président Evariste Ndayishimiye : « Je suis sûr qu’il y a trois autres bateaux qui sont en route à destination du Burundi. »

Lors du lancement de la semaine dédiée à la propreté dans la zone Musaga, le président Evariste Ndayishimiye a annoncé que trois navires transportant du carburant affrétés par le Burundi étaient en route. Deux semaines après, les des questions se posent. Qu’est-ce qui s’est passé avec les trois bateaux ?

Différents services techniques approchés dont la SOPEBU, la Société pétrolières du Burundi n’ont pas encore voulu donner des explications : Comme une patate chaude, certains chargés de la communication interrogés préfèrent référer les curieux dont les journalistes à leurs collègues, un cercle vicieux.

Mais entretemps, la pénurie du carburant persiste au Burundi. Même si c’est interdit de faire la queue devant les stations-service, dépassés et n’en pouvant plus, des automobilistes bravent cette mesure et de longues files d’attente s’observent devant ces stations d’essence bien barricadées par une double rangées de fils barbelés.

Couvertes de poussière, témoin des journées et des nuits passées à attendre l’or noir, les véhicules sont méconnaissables et défigurés surtout qu’ils se retrouvent sans plaques d’immatriculation.

Les policiers les arrachent systématiquement comme une sanction infligée à tout automobiliste qui fait la queue devant une station-service alors que cette dernière est à sec. Selon certaines confidences, certains chauffeurs récupèrent eux-mêmes leurs plaques d’immatriculation ’’pour ne pas tomber en de mauvaises mains’’, car pour les récupérer, il y a une amende à payer.

En attendant le carburant, se déplacer devient un casse-tête pour les Burundais, c’est la débrouillardise à la limite du sauve-qui-peut. Il y en a qui s’approvisionne, chez le ’’grand voisin’’ de l’ouest du Burundi, l’addition est corsée et cela fait grimper les prix des déplacements et comme une réaction en chaîne, des
conséquences se répercutent sur tout.

Dans ce contexte de pénurie chronique du carburant, le président Evariste Ndayishimiye a annoncé que trois navires transportant du carburant acheté par le Burundi étaient en route. C’était le 12 août dernier, lors du lancement de la semaine dédiée à la propreté dans la zone de Musaga.

« Aujourd’hui, je pense qu’il va y avoir les premiers déchargements du carburant que nous avons acheté depuis les raffineries. Et je suis sûr qu’il y a trois autres bateaux qui sont en route ».

Le président Ndayishimiye a également rassuré que le pays débloque 30 millions de dollars par mois mais que le carburant acheté ne dépasse pas 20 millions de dollars. « Le reste est détourné par les commissionnaires », a-t-il lancé, avant de préciser que ces derniers sont parmi les saboteurs dans ce secteur, il n’a pas donné leur identité.

En attendant le carburant promis par le président de la République, …

 

« En attendant Godot… » Deux semaines après cette annonce, les contribuables s’interrogent sur cette promesse : « Qu’est-ce qui s’est passé avec les trois navires ? On pose des questions. Personne ne répond. Mais, quand est-ce que ce carburant va arriver au Burundi ?»

Plusieurs observateurs considèrent que les propos du président de la République sont presque des lois. « Dans l’ordonnément des choses, tous ses messages doivent être considérés comme une affaire sérieuse engageant le pays d’une façon ou d’une autre.» « Les paroles du chef de l’Etat ne s’envolent pas », estiment-ils.


Réactions

Agathon Rwasa : « La pénurie de carburant est devenue une sorte de mythe »

D’après Agathon Rwasa, la pénurie de carburant est devenue une sorte de mythe. « On alimente l’opinion des promesses qui ne peuvent pas être tenus, tenez, si on ne peut pas importer d’un coup 100 camions de carburant, comment est-ce qu’on peut porter 3 tankers ? Où trouve-t-on les devises ? »

Pour lui, le problème n’est pas ailleurs si ce n’est qu’un problème de devises, puisque si on avait les devises, il n’y aurait pas de problème de carburant parce que les raffineries n’ont jamais fermé.

« Tout autour de nous : au Rwanda, au Congo et en Tanzanie, il n’y a pas de problème de carburant ».

Concernant les fonds qui se volatilisent, Agathon Rwasa estime qu’il y a une mafia qui gangrène tout. « Je suis sûr et certain que le système au pouvoir sait tout. Malheureusement la situation reste inchangée ».

Ce député à l’Assemblée nationale du Burundi souligne que tous les mécanismes pour juguler ce « fléau » sont là. « Mais qui peut redresser la situation ? Je crois que c’est une autre problématique autant faire semblant de ne rien entendre, de ne rien voir ».

Tatien Sibomana : « Les propos du chef de l’Etat sont presque des lois »

« Les dires du président de la République sont presque des lois. Ses paroles ne s’envolent pas. Il faut que chaque fois que le président de la République s’exprime sur un sujet ou un autre en soit convaincu. Que ce soit dans le secteur des mines, dans le secteur agricole, que ce soit dans le secteur pétrolier, … La parole du chef de l’Etat n’est pas une simple parole ».

Selon lui, il nous donne espoir que des bateaux sont en route. « C’est véridique, mais quelques semaines après, cela veut dire dès qu’il prononce cette bonne nouvelle, on commence à compter, on ne lui demande pas directement des comptes, il faut qu’il se rende à l’évidence qu’on est en train de compter le nombre de jours qui restent pour que les bateaux arrivent. »

S’ils n’arrivent pas, c’est une déception du côté de tous les Burundais qui ont besoin de s’approvisionner en carburant et du coté de tous les bénéficiaires de tous les services inhérents à l’approvisionnement normal et régulier en carburant, en définitive, c’est tout le peuple burundais.

Selon cet acteur politique, il faut que chaque sortie médiatique du chef de l’Etat soit une sortie bien réfléchie, bien analysée afin qu’il se rassure que tous les contours en termes de conséquences positives ou négatives aient été sérieusement analysés pour que cela ne crée pas de désespoir du côté de ses dirigés.

« Le président de la République est le père de toute une nation. S’il promet des choses à son peuple et qu’il ne les réalise pas, il déçoit son peuple et vous comprenez la désillusion de tout un peuple envers son dirigeant. Cela devient très grave. Ils ne vont pas le cueillir dans la rue, ils ne vont pas le taper avec des bâtons, mais quand un peuple est déçu, les façons de réagir sont nombreuses. Il y en a qui sont immédiates, il y en a qui sont plus ou moins à brève échéance, il y en a qui sont à long échéance, il y a des réactions d’une façon ou d’une autre. »

Gaspard Kobako : « On croyait que la galère n’allait plus se reproduire, mais… »

Le président du parti Alliance nationale pour la Démocratie, AND-Intadohoka indique qu’avec la promesse du chef de l’Etat, tout monde a eu de l’espoir. « On croyait que la galère n’allait plus se reproduire. Tout le monde pensait que ça sera la fin du stress, des marches éreintantes ».

Pourtant, se désole le Gaspard Kobako, l’espoir risque de disparaître. « À peu près plus de deux semaines et bientôt trois semaines, nous attendons que le carburant nous arrive en accostant au port de Bujumbura ».

Gaspard Kobako donne quelques précisions sur le temps qui s’écoule afin que le carburant arrive à Bujumbura. « À notre connaissance, il faut presque deux jours pour que les marchandises quittent le port de Kigoma arrivent à Bujumbura. Même si ces bateaux étaient en haute mer, donc dans l’Océan Indien, il y a lieu de croire qu’en 17 jours, ces bateaux seraient au moins déjà arrivés à Dar es Salaam ».

Cette situation risque, estime le président de l’AND, de générer une perte de confiance dans le leadership. « Les populations risquent de perdre davantage confiance, d’ailleurs ils l’ont déjà perdu à cause de nombreuses raisons évoquées par les dirigeants, y compris au sommet de l’Etat ».

André Nikwigize : « Le langage politique populiste qu’un leader emprunte permet de faire oublier certaines lacunes »

« De telles déclarations politiques interviennent lorsqu’il y a des crises dans un pays sur lesquelles un leader n’a plus de contrôle. N’ayant rien à offrir pour résoudre ces crises, il essaie de prouver que l’origine des problèmes, ce sont les autres ».

Selon cet économiste, le langage politique populiste qu’un leader emprunte permet de faire oublier ses propres lacunes. « Il crée des antagonismes entre « nous » (les bons) et « eux » (les mauvais). Le peuple, quant à lui, écoute, observe, et ne peut réagir, malgré qu’il connaisse la vérité. Alors, il se tait, en attendant des jours meilleurs ».

Gabriel Rufyiri : « Il fallait des clarifications techniques »

Le président de l’Olucome insiste toujours sur cette différence qu’il y a entre le discours politique et le discours scientifique. « Souvent les messages du chef de l’Etat sont des messages politiques qui nécessitent des clarifications techniques. Je ne peux pas dire que le message du président de la République à Musaga qu’il est vrai ou faux. »

Gabriel Rufyiri fait savoir qu’il n’y a pas aucun navire qui part directement de Dar-es-Salaam jusqu’au Burundi. Il faut des wagons pour transporter le carburant jusqu’à Kigoma.

Selon les informations à notre disposition, les wagons-citernes ne sont plus utilisés en Tanzanie. Si c’est à Mpulungu, cela peut aller, mais à Dar-es-Salam, ce n’est pas possible. Les navires dont le président a parlé, c’est peut-être à Dar-es-Salam.

Le président de l’Olucome considère que les autorités devaient éclairer les Burundais. « D’abord, quand est-ce que ce carburant a été commandé ? Par qui ? C’est combien de litres ? Il y a beaucoup de questions qui n’ont pas de réponses jusqu’à maintenant. C’est une information que les Burundais ont actuellement besoin, mais on n’a pas de détails », regrette-t-il.

À propos des navires que le président a annoncés, Iwacu a essayé de joindre Rosine Gatoni, porte-parole du président Ndayishimiye mais en vain.

Charte des utilisateurs des forums d'Iwacu

Merci de prendre connaissances de nos règles d'usage avant de publier un commentaire.

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur. Sont notamment illicites les propos racistes, antisémites, diffamatoires ou injurieux, appelant à des divisions ethniques ou régionalistes, divulguant des informations relatives à la vie privée d’une personne, utilisant des œuvres protégées par les droits d’auteur (textes, photos, vidéos…) sans mentionner la source.

Iwacu se réserve le droit de supprimer tout commentaire susceptible de contrevenir à la présente charte, ainsi que tout commentaire hors-sujet, répété plusieurs fois, promotionnel ou grossier. Par ailleurs, tout commentaire écrit en lettres capitales sera supprimé d’office.

Ajouter un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Carburant. « Twariyakiriye »

S’il y a une phrase la plus entendue ces derniers temps au Burundi, c’est bel et bien ’’Twariyakiriye’’, littéralement, c’est se contenter collectivement de ce que l’on a, du peu que l’on a ou du ce que l’on est, à (…)

Online Users

Total 2 363 users online