Alors que la campagne d’enrôlement des électeurs pour les élections de 2025 a débuté ce mardi 22 octobre 2024, la participation semble disparate dans les différents centres d’enregistrement visités à Bujumbura. Il n’y a pas encore d’engouement.
Certains citoyens rencontrés affirment qu’ils s’y conforment, mais pas par élan civique, d’autres répondent à l’appel des autorités avec conviction. Une chose est sûre : depuis ce mardi 22 octobre 2024, les Burundais en âge de voter sont invités à se rendre dans les centres d’enregistrement pour s’inscrire afin de prendre part aux élections prévues pour l’année prochaine.
La campagne, s’étend jusqu’au 31 octobre 2024, mais semble démarrer avec une participation contrastée. Dans plusieurs quartiers de la capitale Bujumbura, la mobilisation des citoyens est très inégale, dans certains centres les citoyens arrivent au compte-goutte, tandis que dans d’autres l’engouement est plus ou moins dynamique avec des autorités à la base qui sillonnent les ruelles rappelant maison par maison ce devoir citoyen.
Au lycée Musaga, les agents d’enrôlement sont en poste, mais rares sont les citoyens qui se présentent. Certains agents, visiblement désœuvrés, tuent le temps en consultant leurs téléphones portables.
À quelques kilomètres de là, au centre d’enrôlement de l’Ecofo 1, appelé « Socartie », l’ambiance est légèrement plus animée, bien que les électeurs se présentent un à un.
Après son inscription, une femme d’un certain âge approchée fait une confidence : « Je suis venue me faire enrôler pour éviter les ennuis, ce sont les autorités qui m’ont ordonné de le faire. Vous connaissez le Burundi, n’est-ce pas ? »
Dans un bar du quartier Kinanira II, communément appelé ’’Sous le manguier’’, la scène est similaire, ceux qui se font enregistrer ne se bousculent pas. Toutefois, un agent d’enrôlement interrogé demeure optimiste : « Nous en sommes au deuxième jour, il nous reste encore neuf jours. Je suis sûr que les électeurs viendront en plus grand nombre, surtout les week-ends ».
Blaise, un électeur qui vient de s’inscrire, se montre plus enthousiaste : « Nous avons entendu l’appel de notre président bien aimé. J’invite tous les Burundais à faire de même, c’est la 1ère étape pour les élections, c’est un devoir de tout patriote ».
Entre devoir civique et pression sociale
Si certains répondent à l’appel des autorités avec détermination, d’autres disent le faire par crainte des conséquences. « Je ne voulais pas le faire, mais je n’ai pas le choix », confie H.K, un citoyen sous anonymat.
« Sans récépissé certifiant son enrôlement, il sera peut-être impossible d’obtenir des documents administratifs à la commune ou à la mairie. On ne sait jamais. Je le fais donc par sécurité », révèle un autre citoyen qui a requiert l’anonymat.
Ce sentiment d’obligation se reflète dans les chiffres faibles des premiers jours dans plusieurs centres de la capitale. À l’école Les Lierres, dans le quartier INSS, à Rohero, l’affluence est particulièrement faible.
À 11 heures, seuls quelques électeurs s’étaient présentés, laissant les agents recenseurs sans activité. Un agent du lycée municipal Gikungu II n’a pas voulu fournir des chiffres précis sur le nombre d’inscrits, préférant renvoyer les questions à sa hiérarchie.
Un rappel à l’ordre des autorités
Conscient de la situation, le président de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), Prosper Ntahorwamiye, a publié un communiqué ce mercredi 23 octobre 2024, rappelant l’importance de l’enrôlement. « L’enrôlement est la première étape qui lance le processus électoral, permettant à chaque citoyen d’exercer son droit de vote et d’être éligible », a-t-il déclaré.
Le président de la République, Evariste Ndayishimiye, a lui-même donné l’exemple en se faisant enregistrer dans sa circonscription de Giheta. Il a exhorté les Burundais à se faire enrôler rapidement pour permettre une organisation efficace des élections. « Si les politiciens sensibilisent leurs militants, ils disposeront alors du temps nécessaire pour se préparer », a-t-il ajouté.
Inquiétudes sur la transparence du processus
Alors que l’enrôlement se poursuit, le parti Sahwanya Frodebu a, de son côté, encouragé ses militants à s’inscrire, tout en mettant en garde contre les risques de fraudes. « C’est souvent à cette période que des mineurs sont inscrits illégalement pour servir des intérêts particuliers », a averti ce parti dans un communiqué.
Alors que la campagne se poursuit jusqu’au 31 octobre, les autorités espèrent voir une mobilisation plus importante des citoyens, notamment lors des week-ends. Cependant, le manque d’enthousiasme des premiers jours témoigne d’un climat où l’enrôlement est perçu davantage comme une obligation administrative que comme un acte de citoyenneté.