Après avoir occupé plusieurs fonctions dans beaucoup d’organisations internationales, cette burundaise de 59 ans est, depuis 2005, traductrice au Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR).
Originaire de la commune Kiganda en Province Muramvya, cette militante des droits humains fait sa scolarité dans la même commune et au Lycée d’Ijenda où elle a eu son diplôme de fin du secondaire en 1972.
Elle part ensuite à l’Ecole Normale Supérieure où elle décroche, 4 ans après, une Licence d’enseignement en Français-Anglais : «J’avais pourtant choisi le droit, et j’y ai même fait deux mois, mais comme les autres facultés n’avaient pas de candidats, on nous a forcés de les intégrer », précise-t-elle.
Une année après, en 1977, elle se marie à Baricako Germain et cette union donne 4 enfants. Après sa licence, Mme Baricako est recrutée comme assistante au département d’anglais à l’Université du Burundi. 4 ans plus tard, elle fait son doctorat en Anglais à Yaoundé qu’elle termine en 1984.
Elle réintègre ensuite l’Université du Burundi où elle est chef de département d’anglais avant de s’envoler à Addis-Abeba en 1988 avec son mari.
C’est là que commence sa carrière internationale. «Je pensais que je ne manquerais pas de travail avec mon diplôme mais je ne l’ai pas trouvé, et je me suis contenté de faire de la traduction », confie-t-elle.
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« Que la femme ne soit pas seulement une victime, mais qu’elle se présente comme actrice et s’engage à côté des hommes pour inventer de meilleurs solutions. »
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Elle travaille alors comme traductrice indépendante pour plusieurs organisations : la CEA, l’OUA, la ZEP, l’UNEP, l’OMS, le BIT, la Commission Internationale de Juristes, le Centre Africain pour la Démocratie et les études de droits de l’homme, l’UNESCO, ainsi que la Commission Africaine des Droits de l’homme et des peuples.
Après Addis-Abeba, elle s’installe à Banjul en Gambie en 1994 jusqu’en 2005 où elle est recrutée comme traductrice au TPIR-Arusha.
Cette {born again} n’a pas pour autant été influencée par la culture étrangère qu’elle a côtoyée à suffisance. Elle reste une véritable burundaise. Ainée d’une famille de 11 enfants, «j’ai appris trop jeune à être responsable suite au handicap de mon père, victime d’un accident. J’ai dû alors travailler pendant les vacances depuis la 3è secondaire jusqu’à la fin de l’Université», se souvient-elle.
En plus du TPIR, Mme Baricako est aussi présidente de Femmes Africa Solidarité (FAS), dont elle est parmi les membres fondateurs. C’est notamment ce qui lui prend son temps libre à part son engagement à l’Eglise Zion City Church d’Arusha.
Elle nous parle de l’Organisation qu’elle dirige «qui la passionne plus, et qui lui prend autant de temps que son travail à Arusha.»
Parlez-nous des débuts de FAS ?
Quand nous étions encore en Gambie, mon mari a effectué une mission à Genève et à son retour il m’a parlé d’une Association qui était en train de naître en Suisse. Je me suis jointe aux initiatrices, et à 12 femmes, nous avons commencé cette Organisation. C’était en juin 1996.
FAS est née pour résoudre quel problème ?
FAS est née pour soutenir et encourager le leadership féminin. Nous voulons promouvoir le droit de la femme à prendre part aux solutions. Que la femme ne soit pas seulement une victime, mais qu’elle se présente comme actrice et s’engage à côté des hommes pour inventer de meilleures solutions. Nous ne sommes pas des mineures, nous ne sommes pas des incapables, il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire.
Par quels moyens voulez-vous atteindre vos objectifs ?
Nous organisons des formations de renforcement de capacités. En même temps nous faisons le plaidoyer notamment auprès de l’Union Africaine et du Conseil de sécurité de l’ONU. Nous promouvons leur visibilité pour que ce qu’elles font soit réellement connu. Nous entreprenons aussi des projets spécifiques dans plusieurs domaines. Et cela nous le faisons dans 28 pays africains.
Votre première intervention au Burundi ?
C’était en 1997, pour une mission baptisée «Mission de solidarité.» A ce moment, le pays était en difficultés et nous avions pensé que c’était le meilleur moment d’apporter notre solidarité aux femmes burundaises et être à leurs côtés pour les pousser à s’impliquer [dans tous les secteurs de la vie de ce pays].
Comment ?
Nous avons alors organisé à leur intention une formation en techniques de négociations et de règlement pacifique des conflits. Nous les avons encouragées à suivre le programme des négociations d’Arusha pour essayer de le comprendre. Après cela, nous les avons accompagnées à Arusha. Au début, elles n’y étaient pas autorisées. Mais nous avons dû faire le plaidoyer et rendre visite aux différents chefs d’Etats pour leur dire que c’est important que la femme soit entendue. Elles y ont finalement été admises comme observatrices, ce qui était déjà bien. C’est comme ça qu’elles ont eu les 30% [de représentativité dans les institutions du pays]. Au départ, c’est FAS qui a pris l’initiative d’accompagner ces femmes, mais après, d’autres organisations se sont jointes à nous.