Différents représentants des agences du système des Nations Unies se sont réunis mercredi 17 octobre dans une conférence-débat organisée en partenariat avec l’Université du Burundi dans le cadre de la commémoration de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté.
Selon les données récentes (2015) de l’ISTEBU, Institut de statistiques et d’études économiques du Burundi, deux burundais/burundaises sur trois n’arrivent pas à satisfaire leurs besoins alimentaires et non alimentaires. Toutefois, analysant l’évolution de la pauvreté sur 8 ans, Gilbert Niyongabo, expert économiste et enseignant à l’Université du Burundi, reste tout de même optimiste.
La présentation de cet état des lieux a eu lieu ce mercredi 17 octobre au Campus Mutanga de l’Université du Burundi, dans le cadre de la célébration de la Journée internationale de l’élimination de la pauvreté et de la semaine des Nation Unies.
Cette semaine donne, précisera Jeremy Hopkins, Représentant de l’Unicef et Coordonnateur a.i du Système des Nations Unies (SNU), au Gouvernement, au SNU et les autres différents partenaires l’occasion d’échanger sur le pas franchi et les perspectives amorcées pour réaliser les Objectifs de développement durable, ODD.
Dans son allocution, il tiendra à saluer la tenue des activités en milieu universitaire. C’est là que se recrute les grands chercheurs, dont les travaux peuvent orienter les politiques et programmes de développement. Et les étudiants, décideurs de demain, qui, une fois sensibilisés dès le banc des études sur la cause des ODD se transformeront sans nul doute en véritables prophètes de leur réalisation, le jour où ils occuperont les sphères de décision. Car ayant dès le départ intériorisé leurs valeurs en termes d’amélioration du bien-être humain. «Nous devons aussi garder à l’esprit que la pauvreté dont nous célébrons l’élimination aujourd’hui est le premier des dix-sept objectifs et reste le plus difficile à réaliser pour libérer les populations du monde entier des maux qui les hantent et les empêchent à mener librement et équitablement leur vie à la lumière des ODD», soulignera-t-il.
64,6% des Burundais sous le seuil de pauvreté
L’intervalle de l’analyse du professeur Niyongabo se situe entre 2006 et 2014. D’après le rapport de 2006 du Centre universitaire de recherche pour le développement économique et social (CURDES), 67, 1% des Burundais vivaient dans la pauvreté en 2006 : le revenu journalier par tête de cette catégorie était alors inférieur à 1300 Francs Bu.
D’après lui, avec moins de 1744 BIF par jour, 64, 6% de la population restaient encore sous le seuil de pauvreté en 2014 selon les statistiques de l’ISTEBU. Soit une diminution de 2,5% en 8 ans. Cet expert nuance : « Le pourcentage du niveau de pauvreté ne fait pas automatiquement écho de l’effectif des personnes pauvres».
M. Niyongabo rapporte que les milieux, urbain ou rural, les niveaux d’instruction et le genre des chefs de ménage sont entre autres des facteurs qui influent sur le degré de pauvreté. Il est bas dans le monde urbain, chez les instruits et suivant leur niveau d’études et dans les ménages qui ont les femmes pour cheffes. A titre d’exemple, illustre-t-il, le taux de pauvreté en milieu urbain est de 10% tandis qu’il est de plus de 70% dans les zones rurales.
Ce professeur d’université appelle à l’amélioration des secteurs de l’éducation et de l’industrialisation. « La promotion de l’industrie ne s’est jamais réalisée jusqu’à ce moment », déplore-t-il, insistant sur la mise en place d’usines de transformation de la production.
A ce chapitre des remèdes à la pauvreté, Gilbert Niyongabo met un autre accent sur l’étude des modalités de « conservation de la production, parfois très abondante ». Procédé de la façon, estime l’expert économiste, la pauvreté viendrait à être éradiquée. Il recommande des plans communaux de développement pour la réussite du Programme national de développement.
Le gouvernement rassure
Les participants dans cette conférence-débat ont émis divers soucis qui convergent, pour la plupart, sur la part du PND dans l’éradication de la pauvreté. Fréderic Nimubona, enseignant dans les Sciences économiques à l’Université du Burundi, se dit préoccupé des modalités pratiques pour la concrétisation de la politique de redistribution prévue par ce plan. Comment, s’interroge-t-il, profiteront les masses paupérisées des zones rurales ? Des propos auxquels ne s’écarte pas Diomède Manirakiza, un autre enseignant d’université. «Par quels mécanismes le plan se réalisera -t-il ?» Les deux chercheurs demandent l’intégration de la dimension « recherche» dans le PND pour assurer sa réussite. Autre préoccupation soulevée au cours de la conférence, l’employabilité de la jeunesse. Bien d’étudiants évoqueront cette préoccupation.
En guise de réponse, Jeannine Hashazinka, présidente du comité technique en charge de l’élaboration du PND se veut rassurante. Pour elle, tel que prévu, le plan aboutirait à une bonne issue. Tout dépendra des différentes structures déconcentrées chargées de la mise en exécution du plan. Mme Hashazinka souligne que le PND associe le Burundais et la Burundaise du monde rural, notamment par le volet de la modernisation de l’agriculture. Elle insiste également, entre autres solutions à la pauvreté proposées par le plan, sur la promotion du tourisme, du partenariat et de l’industrialisation, la gestion et l’exploitation des ressources naturelles, le développement des infrastructures et TIC, etc.
S’agissant de l’employabilité de la jeunesse, la Directrice générale des prévisions de planification nationale au ministère des Finances, du Budget et de la Coopération au Développement économique atteste que la promotion de la jeunesse fait partie intégrante des priorités du Gouvernement. Une banque des micro-crédits pour jeunes sera bientôt mise en place. Déjà, confie-t-elle, plus de 17 milliards BIF ont été prévus dans l’exercice budgétaire 2017-2018. L’Objectif étant d’atteindre 30 milliards.
Quid des agences de l’ONU dans l’éradication de la pauvreté au Burundi
Les agences du Système des Nations Unies (SNU) affirment qu’elles ne ménageront aucun effort pour l’élimination de la pauvreté au Burundi. «Le moment est venu pour l’ensemble des partenaires de conjuguer leurs efforts en vue de la mise en œuvre du PND», dixit Jeremy Hopkins.
D’après lui, « le rapport de développement humain durable 2018 en cours de finalisation et placé sous le thème « Cohésion sociale, dividendes démographiques et développement », montre qu’il y a encore un long chemin à parcourir ».
Fort heureusement, les priorités contenues dans le PND répondent « … à l’esprit et à la lettre de l’agenda des ODD en prenant en compte les besoins spécifiques de certains groupes sociaux, tels que les femmes, les vulnérables, les personnes vivant avec un handicap et les groupes marginaux, pour ne laisser personne derrière ».
Soulignons qu’en marge de cette conférence, les différentes agences du SNU ont fait une exposition de leurs différentes réalisations au Burundi.
La semaine des Nations Unies est célébrée sous le thème : « Le système des Nations Unies aux côtés du Gouvernement pour l’atteinte des objectifs de développement durable au Burundi»