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Le Sénat du Burundi

23/08/2011 Commentaires fermés sur Le Sénat du Burundi

Le Sénat est l’une des deux composantes du Parlement. Tout comme l’Assemblée nationale, cette chambre a la triple mission de représentation, vote des lois et contrôle de l’action du gouvernement. Cependant, la façon dont cette dernière mission est accomplie varie, sans être satisfaisante pour tout le monde.

La chambre haute qu’est le Sénat contrôle aussi l’action gouvernementale, mais, pour ainsi dire, différemment de l’Assemblée Nationale. Elle le fait par voie de questions orales ou écrites, et par l’analyse du rapport du gouvernement. Cependant, le Sénat vient en deuxième position après l’Assemblée Nationale au regard de la mission des deux chambres. Pour ce qui est de l’analyse des lois, Mme Gertrude Kazoviyo, Vice-président de l’Observatoire de l’Action Gouvernementale, indique qu’une loi peut, en fait, passer par l’Assemblée nationale et arriver au Sénat avec des insuffisances. Cette institution a donc, à ce moment, le devoir de corriger le texte de toutes ces insuffisances avant d’être transmis au Chef de l’Etat pour promulgation.

La spécificité du Sénat

A côté du rôle traditionnel des deux chambres du Parlement de contrôle de l’action gouvernementale, le Sénat a une mission spéciale : celle d’approuver les nominations aux hautes fonctions administratives, judiciaires et militaires, tout en en respectant les quotas ethniques et le genre.
Le Sénat comprend six commissions de travail. Lorsqu’une loi arrive au bureau du Sénat, celui-ci l’envoie à la commission spécialisée correspondante pour en faire une analyse de fond, avant de fournir son rapport au bureau du Sénat qui le programmera pour une séance plénière.

Le Sénat présente des caractères originaux très marqués, le différenciant fortement de l’Assemblée nationale. Son mode d’élection, sa composition, ses fonctions en font une assemblée législative au caractère politique manifeste bien que non partisan. C’est une assemblée également représentative des populations et des collectivités, régulatrice et dotée d’une fonction de vigilance particulière. Bref, c’est une assemblée enracinée dans la réalité burundaise et profondément en phase avec les aspirations les plus fortes de la population : la réconciliation nationale, la stabilisation institutionnelle et politique, la modération dans l’exercice du pouvoir, au service de la paix et du développement équilibré.
La population désire plus de vigilance

Certaines gens ont confiance dans les deux chambres du parlement au regard de leur mission. Mais, pour eux, tout ne se passe pas toujours comme prévu. Pour Dieudonné Kamenyero, professeur au lycée urbain de Gitega, le sénat Burundais, comme les autres sénats du monde entier, a le pouvoir et le rôle de contrôler en dernier ressort les actions du gouvernement. Les mesures prises par le gouvernement doivent être adoptées par les députés et, en dernier lieu, par les membres du sénat pour le bien du peuple, ajoute-t-il. Selon la même source, le sénat burundais n’est pas en vacances. Mais, la mission qui lui est assignée n’est pas remplie correctement, conformément aux desiderata de la population burundaise. En témoignent les mesures lourdes et fâcheuses qui oppriment une partie de la population. L’exemple éloquent, pour lui, est la montée vertigineuse des prix de certains produits tels que le carburant, les produits Brarudi, etc.

Pour Immaculée Kariyo, cultivatrice et femme leader de la Colline Bihororo, Commune Giheta, les sénateurs en collaboration avec les députés devraient intervenir en premier lieu pour l’intérêt général de la population qui les a mandatés. Les sénateurs devraient passer au crible les mesures d’une grande envergure prises par les membres du gouvernement. Salathiel Ntamikevyo de la Colline Rweza, commune Gitega, précise qu’au Burundi, le travail des membres du gouvernement étouffe celui des membres du Senat ; parce que les lourdes mesures qui sont prises par le Gouvernement devraient être retouchées par les sénateurs en dernier ressort pour l’intérêt de la population. Pour lui, d’une manière succincte, le sénat burundais devrait travailler correctement pour protéger les intérêts de la population burundaise.

Mme Kazoviyo croit que toute la population n’est pas au courant de toutes les procédures, ou de la façon dont le Sénat joue son rôle. Néanmoins, cette universitaire et vice-présidente de l’OAG estime que les organisations de la société civile sont informées de ces procédures et du fonctionnement des deux chambres du parlement. Cependant, elle demande que les deux institutions diffusent leurs missions et les procédures de leur fonctionnement, sinon la représentation du peuple risque de ne pas être effective.

Aperçu de l’histoire du Sénat Burundais

Le premier Sénat burundais date de 1965 et résulte des deuxièmes élections organisées cette année-là. La Constitution du Royaume du Burundi, promulguée par le Roi Mwambutsa IV le 16 octobre 1962, permettait en effet la création d’un Sénat puisqu’elle indiquait que « le pouvoir législatif s’exerce collectivement par le Roi, l’Assemblée nationale et le Sénat » (art. 24), mais elle ne l’imposait pas : elle se bornait à en prévoir la possibilité puisque l’article 50 disposait que « le Sénat pourra être créé sur l’initiative du pouvoir législatif » (en fait, le Roi et l’Assemblée nationale).

Le Sénat ne fut donc effectivement créé qu’au lendemain des élections législatives de mai 1965. Il était composé de seize sénateurs, 50% de tutsi et 50% de hutu, dont huit élus par la population, quatre désignés par la Commission Electorale et quatre autre par le Roi. Ce Sénat, dirigé par Joseph Bamina, fut dissous en même temps que l’Assemblée Nationale, suite à la crise politico-ethnique de 1965, pendant laquelle plusieurs sénateurs furent assassinés.

Il a fallu attendre trente-sept ans pour que les politiciens burundais repensent à cette autre chambre du Parlement, lors des négociations d’Arusha et l’Accord qui les a sanctionnées le 28 août  2000. Parmi les solutions proposées par Arusha pour éviter le renouvellement du drame burundais figurait «  une nouvelle organisation des institutions de l’Etat afin qu’elles soient à même d’intégrer et de rassurer toutes les composantes de la société burundaise ». C’est dans ce contexte et dans cette perspective qu’a été créé, en 2002, le deuxième Sénat (de transition) du Burundi : il est à la fois élément de réconciliation et contrôleur de son processus.
Il reflète l’image des négociateurs d’Arusha: son mode de mise en place a été la nomination, selon qu’on était du groupe G10, à majorité tutsi, ou du groupe G7, à majorité hutu, signataires des accords d’Arusha. Ce Sénat était dirigé par Libère Bararunteretse, issu du Parti Uprona, faisant ainsi équilibre avec l’Assemblée Nationale dirigée par Jean Minani, du groupe G7. Il était composé de 52 sénateurs, à parité ethnique, de trois représentants des Batwas et des anciens présidents Jean Baptiste Bagaza, Pierre Buyoya et Sylvestre Ntibantunganya.

Les membres du Sénat de transition étaient désignés par le Président de la République, le Vice-président de la République et le Bureau de l’Assemblée Nationale dans le respect des équilibres politiques, ethniques et régionaux.
Quant au Sénat post-transition, il est composé de 49 sénateurs répartis en 4 catégories, tous les sénateurs disposant, indépendamment de la catégorie dont ils sont issus, du même statut. 34 sénateurs sont élus dans chaque province du Burundi. Un collège électoral composé des membres des conseils communaux de la Province considérée élit deux Sénateurs, provenant des communautés ethniques différentes et aux scrutins distincts.

Le Sénat comprend également trois Sénateurs cooptés représentant l’ethnie Batwa et provenant de régions différentes. Il compte aussi les anciens chefs d’Etat qui en son membres de plein droit et à vie. Enfin la Constitution impose un minimum de 30% de femmes et prévoit, à cet effet, une procédure de cooptation pour corriger, le cas échéant, la composition du Sénat. Cela vaut aussi pour la représentation des trois catégories précédentes.

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