Certaines activités sont exercées sans emplacement fixe ou en des endroits qui ne sont pas visibles par les autorités, tels que petites boutiques, ateliers, stands, ou à domicile. Elles ne sont pas reconnues, soutenues ou réglementées par les pouvoirs publics. Elles sont souvent placées, du fait des circonstances, en dehors du cadre légal. Ces activités constituent le secteur informel.
<doc1708|left>Déjà, par définition, le secteur informel est l’ensemble des activités économiques qui se réalisent en marge de la législation pénale, sociale et fiscale, ou qui échappent a la comptabilité nationale. Autrement dit, c’est l’ensemble des activités qui échappent à la politique économique et sociale, et donc à toute régulation de l’État. Ces deux définitions soulignent l’idée de fraude. Mais, paradoxalement, ce secteur censé se soustraire au contrôle de l’État, fonctionne allègrement au vu et au su de tous.
Entre les années 50 et 80, l’Afrique s’est distinguée par un boom démographique inversement proportionnel à la croissance économique. Au cours de la même période, la population urbaine s’élevait au rythme de 6% par an et celle des villes périphériques de 10%, alors que l’accroissement des emplois offerts dans le secteur formel ou secteur moderne ne représentait que 2%. Très vite, la demande d’emplois est apparue supérieure à l’offre. Il est ainsi apparu une question de survie des populations refusées par le secteur formel.
C’est un moyen de survie !
Le développement du chômage urbain, conséquence logique de la crise économique, s’est accompagné de l’émergence et de l’essor du secteur informel. C’est une question de survie de ces populations refusées par le secteur formel. En d’autres termes, le secteur informel joue un rôle d’adoption des migrants et un rôle d’accueil des agents économiques exclus du secteur officiel.
La baisse sans cesse croissante du pouvoir des salariés exerçant dans le secteur moderne incite les ménages à rechercher des revenus complémentaires dans le secteur informel. Les activités vont de la vente en plein air, du cirage de chaussures, de la préparation de produits alimentaires et d’autres menues activités requérant peu ou pas de capitaux et de qualifications et ayant un rendement marginal, à celles impliquant un certain effort d’investissement en qualifications et en capitaux et une productivité plus élevée. Comme la fabrication de produits industriels, le métier de tailleur, la réparation automobile ou le transport mécanisé. Les conditions dans lesquelles ces activités apparaissent, et les contraintes sous lesquelles elles sont exercées, leur confèrent certaines caractéristiques*.
En définitive, c’est l’incapacité de l’État de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans les domaines de l’emploi, de la santé, du logement et de l’éducation qui est à l’origine du foisonnement du secteur informel.
Un mal nécessaire
On peut observer le secteur informel de différents points de vue. Il peut être considéré de manière positive comme fournissant de l’emploi et des revenus à des millions de personnes qui autrement n’auraient pas de moyens de survie. Il peut être vu négativement comme un pan entier de la société qui échappe à toute régulation et protection. Il peut être idéalisé comme un vivier d’entrepreneurs qui pourrait prospérer si seulement il n’était pas entravé par un système réglementaire et bureaucratique inutile. Il peut être condamné comme une vaste zone de relégation, de pauvreté, de conditions insalubres, de travail dangereux, d’illégalité et d’utilisation du travail des enfants. Ou il peut être simplement ignoré.
Cependant, le secteur informel constitue un dilemme aussi bien pour les gouvernements que pour des organisations internationales telles que l’OIT (Organisation Internationale du Travail). D’une part, il constitue un acteur économique important dont il ne serait pas souhaitable de freiner la croissance et, d’autre part, il n’observe pas les règles et normes internationales du travail pour lesquelles des générations de travailleurs se sont battus. Une réponse à ce dilemme n’est pas simple. Pour sa part, l’OIT propose une approche pragmatique tendant à inciter les opérateurs du secteur informel d’appliquer, de manière progressive, certaines des normes internationales du travail auxquelles nul ne devrait se soustraire. C’est, par exemple, le travail des enfants.
Le secteur informel n’est pas criminel
Il faut noter, à cet égard, que la grande majorité des activités du secteur informel fournit des biens et services dont la production et la distribution sont parfaitement légales. Ceci est à opposer aux activités criminelles ou de production illégale, c’est-à-dire aux activités interdites par la loi ou qui deviennent illégales lorsqu’elles sont exercées par des producteurs non autorisés (par exemple extorsion, contrebande, trafic de stupéfiants, prostitution, change de devises étrangères). Il existe aussi une différence entre le concept de secteur informel et celui d’économie dissimulée ou souterraine. Les activités du secteur informel ne sont pas nécessairement réalisées avec l’intention délibérée de se soustraire au paiement des impôts ou des cotisations de sécurité sociale, ou d’enfreindre la législation du travail, d’autres législations ou d’autres dispositions administratives.
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*Caractéristiques des activités informelles
Elles sont informelles en ce sens que, pour la plupart, elles ne sont ni consignées ni enregistrées dans les statistiques officielles, et qu’elles s’opèrent sur une très petite échelle et avec un faible niveau d’organisation. La majorité d’entre elles impliquent un très faible niveau de capital, de productivité et de revenu.
Elles tendent à avoir peu ou pas d’accès aux marchés organisés, aux institutions de crédit, à la technologie moderne, à l’éducation formelle et aux outils de formation, et à nombre de services et aménagements publics.
Un grand nombre d’entre elles sont exercées sans emplacement fixe ou en des endroits qui ne sont pas visibles par les autorités, tels que petites boutiques, ateliers, stands ou à domicile. Elles ne sont pas reconnues, soutenues ou réglementées par le gouvernement, et souvent placées, du fait des circonstances, en dehors du cadre légal. L’existence d’activités du secteur informel en marge de la loi a parfois conduit les autorités publiques à les confondre avec des activités illégales, et donc à les harceler et à les réprimer. Même quand elles sont déclarées et respectent certaines dispositions légales, elles sont presque invariablement hors-la-loi en ce qui concerne la protection sociale, la législation du travail et les mesures de protection sur le lieu de travail.