Vendredi 22 novembre 2024

Politique

Le Rwanda sort de sa réserve

01/04/2019 Commentaires fermés sur Le Rwanda sort de sa réserve
Le Rwanda sort de sa réserve
Général Mbalaka Muganga : « En tant que commandant militaire, je vous préviens! »

Gitega pense que Kigali exagère en déconseillant ses ressortissants de fréquenter le Burundi. Une note de plus qui prouve que la hache de guerre burundo-rwandais est loin d’être enterrée.

Vers une escalade dans la détérioration des relations entre les deux voisins ? Le 20 mars dernier, le commandant de la région militaire Est et le gouverneur tiennent une réunion de sécurité, dans le district de Bugesera. La population, les forces de l’ordre et l’administration sont au rendez-vous.

Pour le général Mbalaka Muganga, pas question pour les Rwandais de se rendre au Burundi. « Même en cas de mariage, cherchez des partenaires ici chez nous car de l’autre côté, le terrain est glissant. La sécurité est au-dessus de tout, nos voisins ne sont pas bons actuellement. Surveillez vos amis et partenaires de l’autre côté, et surtout ne vous y rendez pas jusqu’à ce que les choses se normalisent à nouveau, »insiste-t-il.

Il est aussi question d’interdiction de fréquenter la forêt naturelle de Gako, qui longe la frontière Burundaise du côté de Kirundo. « Nous vous mettons en garde. Oubliez toute raison qui vous pousserait à aller dans cette forêt naturelle, S’y rendre est pour le moment considéré comme un acte de rébellion. En tant que commandant militaire, je vous préviens! Celui qui sera attrapé n’aura pas la chance d’aller raconter aux autres son sort, nous n’allons même pas le présenter à la police, plutôt nous allons l’immobiliser ici, » prévient le général Muganga.
Gitega est quelque peu dubitatif quant à la réaction à poser contre ces propos. Faut-il les prendre au sérieux ? Quelle importance attribuer à cette interdiction ?

Gitega défend sa cathédrale

Le premier vice-président burundais semble gêné sur cette question. Selon Gaston Sindimwo, le Burundi garde tout de même ses valeurs de pays accueillant. « Nous avons plusieurs Rwandais qui ont décidé de vivre ici, et on n’y trouve rien à redire. Ils sont comme chez eux ici. » Pour lui, la paix et la sécurité règnent au Burundi et les Burundais comme tout étranger vivant sur son sol doivent en bénéficier. Ses frontières sont très bien gardées. Contrairement à ce que dit Kigali, aucun groupe tapi dans l’ombre d’une forêt n’attend le bon moment pour attaquer le voisin d’en face. Gaston Sindimwo pointe plutôt le Rwanda du doigt et l’accuse de crier aux loups pour camoufler ses tentatives d’incursion sur le territoire burundais. « Vous vous rappelez l’avion rwandais survolant le territoire burundais ?»

Pour rappel, par le passé, les autorités burundaises avaient accusé le Rwanda d’espionner le Burundi. Lors d’une rencontre des politiques dans sa province, Anicet Ndayizeye, gouverneur de la province Kayanza, avait affirmé qu’un avion militaire rwandais avait survolé le territoire burundais en date du 13 juillet 2018. Jusqu’à plus de quatre kilomètres. « Cet avion a fait une reconnaissance de nos positions militaires avant de repartir et cela nous a agacés». Pour Gaston Sindimwo, les preuves attestant les tentatives d’incursion des militaires rwandais sur le sol burundais existent. « Nous les soumettrons, en temps voulu, aux institutions compétentes ».
Une réaction plutôt mesurée du côté sud de la Kanyaru après cette escalade. Depuis la détérioration des relations entre les deux pays voisins en 2015, c’est la première fois qu’une autorité rwandaise prend une décision aussi drastique.

Les deux gouvernements se regardent en chiens de faïence, au lieu de régler une crise diplomatique qui se répercute sur ses populations. Ces dernières ne savent plus où donner de la tête. Plusieurs Burundais commencent à hésiter à aller visiter leurs proches au Rwanda. « S’ils pensent que nous sommes leurs ennemis et empêchent les leurs de nous fréquenter, peut-on y aller et être bien accueilli ? » s’interroge un observateur.

Une escalade ?

Gaston Sindimwo : « Le Burundi garde ses valeurs de pays accueillant.»

« Ce général avait-il la bénédiction des hautes sphères rwandaises pour prendre une telle décision ? » s’interrogent plusieurs autorités de Gitega. Certains penchent pour un excès de zèle. En revanche, ce qui est sûr c’est que jusqu’à présent Kigali n’a pas démenti ses propos.
En tout cas c’est bien une première fois qu’une autorité de haut niveau du Rwanda annonce clairement que « le Burundi est son ennemi ». Une rhétorique qui rappelle celle tenue par le président Pierre Nkurunziza en septembre dernier.

Dans une correspondance adressée au président ougandais, patron de l’EAC et médiateur dans le conflit burundais, Pierre Nkurunziza a accusé le Rwanda d’être à l’origine de la crise que traverse le Burundi depuis avril 2015. Il a exigé la tenue d’un sommet spécial des chefs d’État de la région consacré à ce qu’il qualifie de « conflit ouvert » avec son « ennemi » et voisin rwandais. Selon le chef de l’Etat, son voisin recrute et forme des éléments pour déstabiliser le Burundi. La diplomatie rwandaise a jusque-là démenti ces accusations et balayé cette proposition de sommet spécial d’un revers de la main. Allant jusqu’à parler de simple « paranoïa. »

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