Arrogant, maladroit, Philippe Nzobonariba, porte-parole et secrétaire général du gouvernement, irrite de plus en plus. Selon plusieurs observateurs, ses propos n’aident pas le gouvernement.
Comme si Human Rights Watch (HRW) n’était pas capable de faire ses propres enquêtes et de rédiger son propre rapport, Philippe Nzobonariba lâche : « Ce rapport a été rédigé par des journalistes de certains médias, l’opposition et la société civile. HRW n’a fait que mettre son logo. Ce rapport ne vise qu’à ternir et déformer l’image du Burundi par la manipulation, le mensonge, etc. » Ce genre de déclaration, selon plusieurs observateurs, est devenu une habitude pour le porte-parole du gouvernement : « Il a qualifié les journalistes de « vendeurs de cadavres » lorsqu’International Crisis Group (ICG) a sorti son rapport au mois de décembre dernier. » De surcroît, quand le sénat belge a demandé aux autorités burundaises de rétablir l’ancienne commission de suivi de l’application de l’Accord d’Arusha (…) afin de restaurer le dialogue politique entre les différentes composantes burundaises, Philippe Nzobonariba, ou « Tonton », égal à lui même, est encore monté au créneau. Il a donné une mise en garde à ces sénateurs en leur rappelant de ne pas s’ingérer dans les affaires du Burundi. Le secrétaire général du gouvernement estimait que les députés belges n’avaient pas de leçon à donner au gouvernement burundais d’autant plus que leur pays, la Belgique, venait de passer plus d’une année sans gouvernement. Apparemment, Philippe Nzobonariba est décidé. Après une toute petite accalmie, il vient encore une fois de mettre de l’huile sur le feu en s’attaquant à la fois à l’organisation Human Rights Watch, aux journalistes, à la société civile et à l’opposition. Réactions.
« Philippe Nzobonariba est impardonnable »
Léonce Ngendakumana, président en exercice de l’ADC Ikibiri, ne mâche pas ses mots : « Un gouvernement même issu d’un coup d’Etat ne peut pas tolérer de telles déclarations en son nom. » il se dit scandalisé : « Ce n’est pas au porte-parole du gouvernement de rapporter de tels propos, il y a des limites quand on est responsable. » Pour M. Ngendakumana, si Philippe Nzobonariba sort ses déclarations après concertation et avec le consentement de tout le gouvernement, cela dénote l’irresponsabilité de ce dernier. Le président du parti Sahwanya Frodebu ajoute que ce comportement du porte-parole du gouvernement confirme l’hypothèse qu’au Burundi, nous avons des ministres et non un gouvernement. Il s’interroge : comment Philippe Nzobonariba peut-il penser un seul instant que Human Rights Watch (HRW) est né pour combattre le CNDD-FDD. Selon M. Ngendakumana, HRW est la première organisation qui a mené des enquêtes sur l’assassinat du président Ndadaye : « A l’époque, M. Nzobonariba était dans le mouvement dit du changement, pourtant, il n’a pas levé un seul doigt pour contester le travail de HRW.» Léonce Ngendakumana n’en revient pas. Il estime qu’il est incapable de revenir sur son discours, ce qui prouve que c’est une caisse de résonnance de quelques individus proches du CNDD-FDD.
« Il faut lui chercher une place ailleurs »
Alexandre Niyungeko, président de l’Union Burundaise des journalistes (UBJ) regrette que chaque fois que Philippe Nzobonariba ouvre sa bouche, c’est pour « taper à côté » de la plaque. Il fait savoir que ce langage n’est pas digne d’un responsable comme lui : « Si tout le gouvernement s’exprimait comme lui, qu’adviendrait le Burundi ? » Le président de l’UBJ estime que M. Nzobonariba n’a pas de leçons à donner en matière de journalisme : « Le journaliste doit travailler avec tout le monde : le gouvernement, l’opposition et ces associations qu’il traite de n’importe comment. » M. Niyungeko demande à M. Nzobonariba de retourner à l’école pour soigner son langage, ne fût-ce que pour sa personnalité et transmettre le message du gouvernement avec diplomatie. Philippe Nzobonariba : « Les auteurs de ces rapports sont persuadés que l’usage de la force qui était la première option n’est plus possible » Léonce Ngendakumana : « On ne peut pas lui demander de réviser son discours, M. Nzobonariba en est incapable. » Alexandre Niyungeko : « Philippe Nzobonariba, est-il inamovible ? »