Après les formations en leadership, résolution pacifique des conflits, plaidoyer et masculinité positive, c’était au tour des séances de coaching entre les femmes leaders et les jeunes filles et hommes de la nouvelle génération. Les associations Reja et Afrabu se sont déployées dans la province Kayanza.
«Désormais, ma tâche consiste à aider mes mentorés à être des modèles dans la communauté surtout en ce qui concerne la résolution pacifique des conflits», confie Charlène Akimana de la colline Campazi, commune Muruta en province Kayanza. Elle vient d’être choisie mentor pour parrainer six autres leaders de sa commune. Malgré son jeune âge, 19 ans, cette jeune fille n’a pas peur de ‘’coacher’’ des femmes et des hommes plus âgés qu’elle. «Ça ne me pose aucun problème. Je la respecte comme leader car je sais ce qu’elle vaut», lance une femme, la quarantaine, de la colline Campazi. Présidente de l’Association «Tuje hamwe rwaruka», elle dirige une quarantaine de personnes. «Je viens d’en hériter 6 autres. C’est une lourde tâche. Je vais essayer de l’accomplir avec brio».
Après les ateliers de formation en leadership, la résolution pacifique des conflits, le plaidoyer et la masculinité positive, dans le cadre du projet « soutenir les femmes d’aujourd’hui et de demain pour avancer la paix au Burundi » de l’ONG SFCG, des séances interactives de coaching entre les femmes leaders confirmées et les jeunes femmes et hommes leaders de leur communauté ont été organisées au cours de la semaine du 25 février au 1 mars 2019.
Les objectifs visés sont, entre autres, la promotion des échanges d’expériences entre les femmes expérimentées de la communauté avec les jeunes femmes et hommes leaders ainsi que le renforcement des capacités et le leadership de jeunes femmes.
Au cours de ces séances, les femmes leaders d’expérience et les jeunes femmes et hommes leaders de différentes catégories vont être mis en relation en vue d’organiser des séances individuelles de coaching et de mentorat. De plus, il y aura un partage de leur expérience de leadership et les femmes leaders confirmées donneront des conseils qui répondent aux préoccupations des jeunes femmes et filles leaders.
Un agenda chargé
De Muhanga à Gahombo en passant par Kabarore et Muruta en province Kayanza, six femmes mentors ont été choisis par chaque commune. En commune Muhanga, la formatrice lance : «Est-ce qu’une femme peut servir de mentor à un homme?» Certains hommes ricanent. D’autres restent impassibles. Après un court débat, tout le monde tombe d’accord que c’est normal. «Avoir une femme comme mentor ne pose pas problème. Ce qui compte, c’est la qualité de son aide et de ses conseils», dira un homme de la zone Jene en commune Kabarore.
En collaboration avec leurs mentorés, les mentors ont élaboré un plan d’action des activités à réaliser dans les mois à venir. «Nous allons nous rencontrer pour mieux nous connaître les uns et les autres», souligne Euphrasie Miburo de la commune Gahombo en province Kayanza. Cette femme leader mentor assure qu’elle va rencontrer ses mentorés un à un afin de s’enquérir de leurs problèmes en ce qui concerne la résolution pacifique des conflits dans la communauté.
C’est le même schéma proposé par les autres mentors des autres communes. Jeanine Kwizerimana, femme mentor de la commune Muruta, va plus loin en proposant de consacrer, avec ses mentorés, une journée à aider les personnes vulnérables. Pour ces mentors choisis, les jeunes filles doivent se réveiller et assurer la relève. «Le pays a besoin d’une nouvelle génération de leaders. Nous prenons de l’âge. Il est temps de passer le relais», indique Sylvana Baranyizigiye, la cinquantaine.
Toutes ces femmes mentors disent vouloir consacrer plus de temps à des séances individuelles de coaching. «Nous allons les aider à acquérir de nouvelles compétences et avoir confiance en eux. Certains ont peur et parfois les élus collinaires ne leur facilitent pas la tâche. Ces derniers doivent comprendre que ces jeunes leaders ne sont pas des concurrents, mais plutôt qu’ils peuvent se compléter », souligne Marie-Goreth Mukamarakiza, de la commune Gahombo. «Par après, nous allons faire une évaluation pour voir si les objectifs que nous nous sommes assignés ont été atteints»>.
Des initiatives qui inspirent
Après les formations sur le leadership, la résolution pacifique des conflits, le plaidoyer et la masculinité positive, certains jeunes filles et hommes leaders de la commune Muruta en province Kayanza n’ont pas perdu de temps. Ils ont mis sur pied des initiatives afin de partager les connaissances acquises avec les autres jeunes de leur communauté.
Charlène Akimana
«J’ai tout de suite créé une association après la formation. Elle s’appelle ‘’Rwaruka kerebuka urashoye’’», indique cette jeune fille de 19 ans. Présidente d’une autre Association Tuje hamwe rwaruka, elle assure qu’elle veut transmettre les connaissances acquises lors de la formation afin de faire émerger une nouvelle génération de jeunes filles leaders pour un Burundi nouveau.
«En décembre dernier, nous avons créé un club d’épargne». Après 3 mois, l’association a un capital de plus 400.000 Fbu et compte 35 membres. Selon Charlène Akimana, plusieurs jeunes des autres collines veulent adhérer à leur association. «C’est une occasion de vulgariser les connaissances acquises sur le leadership et la résolution pacifique des conflits. Du coup, ces jeunes pourront les enseigner sur leurs collines d’origine».
Les membres de l’association se rencontrent une fois la semaine pour dispenser les enseignements reçus à ceux qui n’ont pas suivi la formation. «Nous comptons des hommes et des femmes très âgés. Parfois, sans s’attacher à mon âge, ils me soumettent leurs problèmes pour que je les aide à trouver une solution».
Jean-Marie Harerimana
«La formation nous a beaucoup aidés à prendre conscience de nos potentiels», témoigne ce jeune homme de la colline Mikuba, zone Nkonge. Du coup, les jeunes qui ont suivi la formation se sont mis ensemble pour aider dans la résolution pacifique des conflits. «Nous avons approché les chefs collinaires, les ménages et différentes associations pour nous faire connaître et leur dire que nous sommes disposés à les aider dans leurs problèmes».
Aujourd’hui, plusieurs ménages et associations font appel à eux. «Nous sommes fiers de nos jeunes. Avant on se méfiait d’eux mais les choses commencent à changer», raconte un habitant de la colline Mikuba. Ces jeunes comptent prochainement créer une association ainsi qu’un club d’épargne. «La base sera les jeunes leaders qui ont suivi la formation de Search For Common Ground».
Appolonie Nikonabasanze
«Sur notre colline, il y a beaucoup de problèmes surtout les bagarres, des histoires de concubinage, des conflits conjugaux,…Avec les autres jeunes qui ont suivi cette formation, nous nous organisons pour aider les parties en conflit», indique cette jeune fille, 24 ans, de la colline Nkongwe. Selon elle, les gens ne les prenaient pas au sérieux au début. «Ils disaient que nous sommes encore jeunes, que nous ne comprenons rien à la vie». Ils ont alors approché les chefs collinaires. «Lors des réunions, ils nous présentent comme gens qui peuvent aider des personnes en conflit. Cela nous a permis d’acquérir une certaine notoriété. Aujourd’hui, les habitants nous font confiance».
Au mois de février, les jeunes leaders formés de la zone Nkongwe et de la zone Muruta se sont rencontrés pour voir comment créer ensemble une association. «L’objectif est de pouvoir sensibiliser les jeunes sur la résolution pacifique des conflits d’autant plus que les échéances électorales approchent. Le projet sera concrétisé prochainement.»