Un langage des stigmatisations est utilisé quand il s’agit de qualifier les membres d’un groupe opposé surtout en période électorale. Les conséquences étant la haine et les violences de masse. Sylvère Ntakarutimana, ancien chargé de la communication de la CVR et directeur de la Radio Isanganiro, donne des éclaircissements.
Que doit-on comprendre par langage des stigmatisations ?
Un langage des stigmatisations est un langage qui laisse des stigmas bien évidemment à l’endroit du destinateur du message. Les politiciens y font souvent recours. Il s’appuie sur des préjugés et stéréotypes collés à des membres d’un groupe ou une catégorie. Tous les membres d’un groupe ethnique, parti ou ressortissant d’une telle région, sont qualifiés de lâches, d’incapables, de honteux etc. Ce langage est utilisé à des fins de discrimination. Les auteurs en profitent pour s’accaparer des privilèges qui se présentent. Malheureusement, ces intérêts sont éphémères.
Ce langage blesse celui qui est indexé. L’histoire du Burundi a été conflictuelle. Un langage stigmatisant a été beaucoup utilisé pour discriminer les adversaires. Un groupe a été qualifié de « Bamenja », (renégats). Dans le passé lointain, ce qualificatif était collé à des criminels qui avaient attenté à la réputation du roi.
Quelle peut être la réaction des membres des groupes stigmatisés et les conséquences qui en découlent ?
Un langage stigmatisant sème la haine et la zizanie. Il a des conséquences fâcheuses sur le vivre ensemble dans la société. Un cycle ininterrompu d’une haine sans fin. Cette haine conduit aux violences de masse comme on en a connu dans le passé.
A force de les attaquer verbalement et de les dénigrer, les membres du groupe développent en eux un comportement revanchard. Ils peuvent se mettre à la défensive. Comme on le dit dans l’armée « le feu attire le feu ». Cela devient un cercle vicieux.
Est-il possible de combattre ce langage ? Comment ?
C’est fort possible. Ces infractions sont punissables par le code pénal. Il faut que la justice s’en saisisse pour les réprimer. Une sensibilisation est nécessaire pour que les interlocuteurs prennent conscience. Chacun d’entre nous doit se regarder dans le miroir et faire face à ses propres préjugés. Nous nous approchons des échéances électorales de 2020. Il faut que les hommes politiques pèsent leurs mots.
Si nous bannissons le langage stigmatisant, nous créons aussi une société plus juste et plus inclusive. Et faisons renaître l’espoir.