La plateforme des opposants en exil a subi, le 18 octobre dernier, une défection importante. Le Frodebu a décidé de claquer la porte. Un départ qui augure des lendemains plus incertains.
Encore, un qui quitte le navire ! Le parti Sahwanya Frodebu « se retire du Cnared avec effet immédiat». Il devient ainsi le huitième parti politique à s’écarter de cette plateforme de l’opposition.
La décision est prise à la veille de la 25è commémoration de l’assassinat du fondateur du parti et héros national de la démocratie. D’après Pierre Claver Nahimana, président du Frodebu, son parti souhaite travailler sans être «dérangé», encore moins être «contrarié».
Néanmoins, il nie la volonté de faire cavalier seul. «A l’issue de notre congrès, nous nous sommes engagés à collaborer avec toute organisation présente au pays ou à l’extérieur. Pourvu que cette dernière soit en droite ligne avec les idéaux du président Ndadaye.»
Selon le politologue Denis Banshimiyubusa, cette défection est l’aboutissement des dissensions caractéristiques au Cnared depuis sa naissance. Elle vient encore perturber une organisation mal en point. Sur les problèmes « congénitaux » de cette coalition, le politologue rappelle qu’aucune idéologie n’a guidé sa fondation. «Des gens qui ne se digèrent pas se sont mis ensemble suite aux circonstances du moment. De ce fait, elle est fragile depuis sa création». Il soutient que le Cnared est le résultat des « émotions rassemblées. »
Le Cnared, un conglomérat de projets contradictoires
Le Cnared souffre d’un manque de cohésion avec un leadership peu rassembleur. Le politologue estime que le leadership de Jean Minani passe difficilement. Ses anciens compagnons du Frodebu n’oublient pas qu’il a inauguré la «Nyakurisation», cette fameuse scission des partis. C’est en effet, Jean Minani qui a créé le Frodebu Nyakuri. Opportuniste pour les uns, pragmatique pour d’autres, Jean Minani est une personnalité «controversée», un sphinx déroutant.
Il semblerait que le Frodebu veuille se chercher un souffle nouveau. L’analyste estime qu’il pourrait chercher un allié de taille à l’ ‘intérieur. L’hypothèse que le parti veuille faire les « yeux doux » au pouvoir en place est donc plausible. Ce serait aussi un moyen de sortir ses cadres du chômage politique et économique, comme on le sait, au Burundi souvent les deux sont liés. Certains de ses cadres sont en effet désœuvrés depuis 2010. Ré-exister donc.
«La lassitude du parti est visible. Avec l’espoir d’une victoire qui va diminuant de plus en plus, pas étonnant qu’il fasse des concessions avec un parti hégémonique. » Commente un autre observateur du paysage politique burundais. Le parti de Ndadaye n’a plus les capacités de faire cavalier seul. Au fil des années, siphonnée par le parti au pouvoir, sa base électorale s’est érodée. Pour sa survie, il doit se joindre à une coalition.
Que devient le Cnared dans tout cela ? Certains observateurs estiment que ces « renoncements » peuvent lui être utiles. « Je pense que le Cnared a besoin de ces défections pour se cristalliser comme une force homogène capable de défendre un projet unique», explique un fin connaisseur des arcanes politiques burundaises. Sinon, , poursuit- il, cette structure politique demeurera un conglomérat de projets contradictoires.
Cet optimisme est tempéré par un membre de cette coalition des opposants en exil : « Le Cnared qui était censé être une plateforme de l’opposition burundaise tend à devenir une coalition d’individus et cela consacrera sa mort si rien n’est fait dans l’immédiat», confie un membre du Cnared sous anonymat.
Une chose est sûre, les divergences et les défections au sein du Cnared font le jeu du Cndd-Fdd.