La déclaration du Conseil de sécurité du 22 août déplore la lenteur des pourparlers et appelle au dialogue inclusif.
Les membres du Conseil de sécurité demande à la facilitation/médiation de la Communauté est africaine de passer à la vitesse supérieure. Le dialogue inter-burundais affiche une lenteur préoccupante et Bujumbura fait montre d’un manque d’engagement par rapport à ce dialogue.
Le Conseil de sécurité n’est pas pessimiste, pour autant. Il reconnaît plusieurs efforts du gouvernement, entre autres les missions onusiennes de maintien de la paix, l’amélioration de la situation sécuritaire du pays, la libération des prisonniers et la décision de Pierre Nkurunziza de ne pas se présenter aux prochaines élections. Des étapes significatives. Sauf qu’un progrès reste à faire, « la situation politique du pays demeurant préoccupante ».
Pour sortir de cette situation, une seule solution politique est proposée : le dialogue inclusif mené par la facilitation sous la houlette de l’EAC.
D’où l’appel lancé aux différents protagonistes dans la crise burundaise à un dialogue inclusif et sans conditions préalables. « C’est crucial que toutes les parties, spécialement le gouvernement, arrivent à un accord. Le dialogue est le seul processus qui va mener vers la fin de la crise ».
Le Conseil de sécurité espère que les pourparlers vont déboucher sur des élections de 2020 qui seront libres, justes et transparentes paisibles et inclusives.
Cette notion d’inclusivité du dialogue a toujours créé un débat. Pour les diplomates, cela signifie un dialogue entre les vrais protagonistes, ceux qui sont en conflit. Pour Bujumbura, il n’est pas question de s’asseoir avec les personnes impliquées dans le putsch, poursuivies par la justice. « Ils sont au nombre de 34 et ne peuvent pas prendre en otage tout un peuple, » a déclaré un membre du gouvernement.
La facilitation veut en finir
La « dernière » session des pourparlers serait pour bientôt. Mais le bilan du travail de Mkapa reste très mitigé. L’opposition lui reproche qu’à ce jour, il n’ait jamais pu organiser des pourparlers réellement inclusifs.
Lors de sa dernière visite, la délégation de la facilitation de Mkapa a pu convaincre Bujumbura de participer au prochain round du dialogue. Le parti au pouvoir est donc revenu sur sa position tranchée et a annoncé qu’il va accepter de répondre à l’invitation si « la session est bien organisée. »
Pour rappel, le premier vice-président, ou encore l’assistant du ministre de l’Intérieur avaient déclaré qu’il n’y avait plus « de nécessité de dialogue externe ». Pour eux, presque toutes les questions avaient été vidées à l’interne.
Une position finalement abandonnée par Bujumbura. « Nous ne voulons pas qu’ils viennent dire que nous avons été l’objet du blocage du dialogue, » a expliqué Thérence Ntahiraja, l’assistant du ministre de l’Intérieur.
Le gouvernement a néanmoins posé ses conditions. Il faudra offrir une sécurité à sa délégation. L’Ouganda, choisi pour abriter la prochaine session, ne remplirait pas ces normes de sécurité, car « abritant des putschistes burundais sur son sol ».
Autres conditions avancées par Joseph Ntakarutimana, secrétaire général du parti Cndd-Fdd : « Pas question d’aborder des questions déjà vidées par la Constitution issue du référendum ainsi que la feuille de route adoptée par les politiques. »
Selon plusieurs observateurs, Bujumbura ne pouvait pas prendre le risque de froisser la Communauté Est africaine qui a été à ses côtés depuis la crise de 2015.
En effet, alors que la Communauté internationale haussait le ton, l’Union européenne prenait des sanctions contre le gouvernement, des présidents de la sous-région ont pris position ouvertement en faveur de Bujumbura.
Le discours de Yoweri Museveni au 18ème sommet de l’EAC au mois de mai 2017 reste dans les mémoires. A la tête de l’EAC mais également médiateur dans le dialogue inter-burundais, alors que l’opinion internationale attendait un discours ferme contre Bujumbura, Museveni avait créé la surprise en s’en prenant violemment à l’Union européenne… Pourtant, le gouvernement burundais avait été indexé par le facilitateur Mkapa comme « le mauvais élève des pourparlers. »
Pour rappel, Bujumbura avait décidé de boycotter le 3ème round, la facilitation ayant invité des personnalités poursuivies par la justice burundaise.
Autre soutien de taille : Le président de la Tanzanie qui a de son côté tenu à plusieurs reprises le même discours que celui de Bujumbura. Lors de son discours du 20 juillet alors qu’il accueillait le président Nkurunziza, il avait déclaré que la paix et la sécurité étaient une réalité et plaidé pour le retour des réfugiés au Burundi.
Bujumbura n’a donc pas intérêt à boycotter l’invitation. Par ailleurs, le facilitateur, M Mkapa, semble très en phase avec le gouvernement burundais. Lors de la dernière session de décembre 2017, il avait déclaré qu’au nom de la souveraineté nationale, la population burundaise avait le droit de réviser sa Constitution et qu’il n’y pouvait rien.
Quelles questions feront l’objet de discussion ?
Alors que la facilitation prévoit que ce 5ème round soit le dernier et marque la fin de la crise, la question est de savoir quelles seront les questions à l’agenda de la rencontre ?
D’après la facilitation, il faudra convaincre les réfugiés burundais qui ne sont pas poursuivis par la justice de rentrer au pays et donner des garanties pour des élections libres et démocratiques.
Mais les choses ne sont pas aussi simples. Pour le Cnared, une autre feuille de route pour les élections de 2020 doit être renégociée lors des prochains pourparlers. Il faudrait aussi un débat sur certaines dispositions de la nouvelle Constitution qui « excluent certains tout en privilégiant d’autres. »
Agnès Ndirubusa