Samedi 23 novembre 2024

Politique

Le Cnared : « La véritable opposition »

23/10/2017 5

Cette coalition s’est fendue d’une déclaration le 16 octobre. Elle tire à boulets rouges tour à tour sur l’ombudsman burundais, la facilitation d’Arusha ainsi que certains partis d’opposition.

Le Cnared contre les manœuvres destinées à saboter le dialogue inclusif

Edouard Nduwimana ? « Le serviteur zélé du pouvoir illégal et illégitime de Bujumbura. » L’opposition politique de l’intérieure ? « Opposition parallèle et pirate. » Le Cnared n’épargne pas non plus la facilitation de Mkapa et l’accuse entre autre de sabordage.

Il faut dire que le communiqué est quand même centré sur l’ombudsman Edouard Nduwimana. Taxé de militant zélé au service du président Nkurunziza, il comploterait pour mettre à mal le processus de sortie de crise d’Arusha. En substance, il est accusé par le Cnared de vouloir l’écarter du dialogue. Pour y arriver, Edouard Nduwimana fait miroiter à l’opposition qui est au Burundi la possibilité de réunification de leurs partis ou alors l’éventualité d’une coalition. Histoire d’en faire le seul interlocuteur face à Bujumbura. Par conséquent, le Cnared condamne ce qu’il qualifie « de tricheries éhontées de M. Edouard Nduwimana qui sont indignes d’un ombudsman.»

« L’opposition parallèle et pirate, dite interne »

Le Cnared craint qu’il soit rayé de la liste des participants au dialogue d’Arusha. Selon lui, l’ombudsman se sert d’Agathon Rwasa du FNL, d’Evariste Ngayimpenda de l’Uprona de l’opposition, de Juvénal Ngorwanubusa du MRC ainsi que de Zénon Nimubona du Parena.

Le patron de cette plateforme, Charles Nditije, affirme que ces entités politiques d’opposition sont tombées dans la supercherie de l’ombudsman. Il a multiplié des réunions avec elles depuis la session de Kayanza et leur a promis la réunification des partis ou le regroupement en coalition.

Selon la coalition de l’opposition en exil, « ces entités politiques en création sous la houlette de M. Nduwimana doivent être considérées comme des émanations du pouvoir de facto de Bujumbura et par conséquent comme des acolytes acquis à sa cause.»

Le communiqué poursuit en exigeant que les négociations aient lieu entre le pouvoir et ses satellites qu’il ramène à toute force politique opérant à partir de l’intérieur du Burundi et la « véritable opposition » qu’il croit incarnée par le seul Cnared. Avant de conclure que l’opposition politique intérieure ne pourra jamais constituer une alternative à la plate-forme CNARED.

La facilitation conduite par Benjamin Mkapa, elle aussi, n’est pas en reste. Pour la plateforme de l’opposition en exil, elle doit arrêter ses manœuvres dilatoires. Ces manigances n’auraient d’autres finalités que le sabordage et le refus des négociations inclusives avec la véritable opposition.

Contacté pour réagir sur les accusations du Cnared, l’ombudsman burundais, Edouard Nduwimana, a assuré qu’il ne souhaitait pas réagir pour le moment.

La présidence, qui est accusée par le Cnared de se servir de l’ombudsman pour saboter le dialogue en cours, indique, par le truchement de son conseiller principal, Willy Nyamitwe, « qu’il faudrait d’abord descendre trop bas pour répondre à de tels propos de sieur Charles Nditije. Par conséquent, « il préfère garder de la hauteur. »


>>Réactions

Agathon Rwasa: « Le Cnared donne l’impression d’être fatigué»

Cet acteur politique se dit surpris que le Cnared le taxe d’être à la solde de M Nduwimana parce qu’il a participé à la réunion de Kayanza. « Quelques jours après Kayanza, l’ombudsman a rencontré le Cnared à Helsinki. Cela veut-il dire pour autant qu’il est à sa solde ? » Agathon Rwasa fustige les propos véhiculés par la plateforme. « Ils sont fatigués. Ils luttaient contre le système Cndd-Fdd, maintenant ils luttent contre les autres partis de l’opposition, c’est n’importe quoi. » Le premier vice-président de l’Assemblée nationale ne comprend pas pourquoi l’opposition en exil pense être plus légitime, juste parce qu’ils sont en exil. « Trouvez-vous normal que ceux qui ont décidé de rester pour défendre la cause à leurs risques et périls passent pour des larbins de Nkurunziza ? » Il demande plutôt au Cnared d’arrêter de distraire l’opinion et de prouver sa supériorité par des actions. Et de conclure : « J’ai envie de dire au Cnared de se recentrer. Il donne l’impression d’être fatigué. »

Evariste Ngayimpenda invite la coalition à plus de sagesse et de modestie

Cet acteur politique de l’Uprona de l’opposition assure que les quatre entités politiques que le Cnared qualifie de création de Nduwimana sont toutes antérieures à l’émergence politique de ce dernier et même du Cndd-Fdd. Selon Evariste Ngayimpenda, ces entités politiques ne peuvent donc pas être leur création et Nditije ne peut s’autoriser de raccourcir leur histoire. « Notre proposition de sortie de crise a été rendue publique. Curieusement, le Cnared n’en dit rien et ne propose pas mieux. » Cet homme politique assure qu’il n’a jamais été dans l’esprit de l’opposition opérant à l’intérieur de se substituer au Cnared. Cette opposition est née et a commencé à fonctionner longtemps avant la naissance du Cnared et indépendamment de l’existence et des objectifs de ce dernier. « Nous voudrions inviter la coalition à plus de sagesse et de modestie. » Pour lui, la coalition n’a aucun moyen d’imposer à l’ensemble de l’opposition qu’il est son unique représentant accrédité. Et la dualité entre opposition interne et externe est une fausse question. A moins que les uns et les autres n’aient pas de cause à défendre. S’ils en ont une, elle sera d’autant mieux défendue qu’elle le sera tant de l’intérieur que de l’extérieur.

Juvénal Ngorwanubusa: « C’est notre droit de discuter avec n’importe quelle partie »

Le président du parti MRC ne comprend pas pourquoi il a été attaqué par le Cnared. Juvénal Ngorwanubusa indique être contre la politique de la chaise vide. D’où sa participation dans la session de Kayanza. « C’est notre droit de discuter avec n’importe quelle partie.» Il assure ne pas défendre l’ombudsman, qui par ailleurs penche vers les desiderata du pouvoir en place. Toutefois, il devait l’écouter s’il voulait à son tour être entendu. « Ce sont des valeurs d’ubushingantahe qui nous animent. » Selon Juvénal Ngorwanubusa, il est normal de débattre avec les adversaires pour défendre ses opinions. Par ailleurs, il indique avoir produit avec d’autres formations politiques un document détaillant leurs propositions pour une sortie de crise. « Le Cnared peut émettre des critiques sur nos propositions quitte à les améliorer, mais ne pas nous indexer juste pour la forme. »

 

Quand l’argument ad hominem évacue le débat sur le fond

« Les entités politiques en création sous la houlette de M. Nduwimana doivent être considérées comme des émanations du pouvoir de facto de Bujumbura et par conséquent comme des acolytes acquis à sa cause. Ils ne peuvent en aucun cas constituer une alternative à une véritable opposition, encore moins à la plateforme politique CNARED », peut-on lire dans le communiqué du CNARED du 16 octobre dernier.

L’opposition en exil interpelle alors l’ex-président tanzanien en charge du volet externe du dialogue inter-burundais : « Nous en appelons à la Facilitation conduite par son Excellence le président Benjamin Mkapa de couper court à ses manœuvres dilatoires qui n’ont d’autres finalités que le sabordage et le refus de négociations inclusives avec la véritable opposition. »

« S’opposer sans proposer n’est qu’un mouvement d’humeur », dixit l’écrivain français Robert Sabatier. L’invective et la calomnie ne peuvent en aucun cas tenir lieu de force de proposition. Les partis MRC et PARENA ainsi que les acteurs politiques Agathon Rwasa et Evariste Ngayimpenda, signataires d’une feuille de route de sortie de crise, sont accusés d’intelligence avec le « pouvoir de facto de Bujumbura ». Se sont-ils rendus coupables de compromission en produisant un document faisant les yeux doux au régime en place ? Que nenni ! Ne pas être membres de la plateforme politique CNARED est leur seul crime. Cette dernière semble ainsi estimer qu’elle a consommé tout l’oxygène dévolu à l’espace « véritable opposition », annihilant ipso facto toute possibilité de coexistence avec d’autres forces politiques.

Dans le sillage de ce mouvement d’humeur du CNARED affleure un dénominateur commun avec celui qu’il qualifie de « pouvoir de facto de Bujumbura » : le déni de la réalité. L’un autour du diagnostic : pas de crise en cours – politico-sécuritaire dans sa première manifestation – dont l’élément déclencheur est le non-respect de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi et de la Constitution qui en est la résultante. L’autre autour de la qualité de « véritable opposition » : en dehors des frontières terrestres du CNARED, c’est le vide.
Au-delà de la lutte légitime pour le positionnement lors du prochain round du dialogue inter-burundais à Arusha, l’enjeu – sortie de crise structurelle – requiert de toutes les parties prenantes une certaine hauteur de vue.

Guibert Mbonimpa

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. Casimir

    Cette politique de diviser pour régner est vieille comme la terre…à voir comment les couteaux sont en train de voler aussi bas entre les membres de l’opposition, le pouvoir DD doit se dire  »mission accomplie »….Doudou doit en train de se marrer!!!

  2. Tomahawk

    Debat « entre opposants » sur veritable opposition ou pas veritable pendant qu’il y a des  » chats a foueter », le pouvoir, montre qu’il n’ y a pas d’opposition contre ce dernier.

  3. Bundes

    Jewe ikimbabaza ni kimwe :abantu twahenzwe na CNARED ngo igiye kudukiza aba DD kumbe Kari akarimi gusa ! Nimwibereho mubuhungiro basha

  4. James

    Une chose esr sûre: ni le CNARED, ni l’opposition intérieure ni le gouvernement en place n’a prouvé une véritable légitimité à ce jour. A défaut d’aller à la retraite, lis devraient se taire et cesser de nous les gonfler!

  5. Björn

    Well on negocie quand on a la force. Quand on en a pas , on ferme sa gueule est on se contante des mietes ???

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