La cinquantaine révolue. Des femmes et aussi des hommes, ils sont toujours célibataires. Ils assument leur statut. Pour un sociologue, cet état de fait n’est pas un choix en soi mais un problème du choix de l’objet sexuel.
« J’ai toujours voulu vivre vrai et profond», raconte Béatrice Nyamoya, 57 ans, célibataire et fière de l’être. Elle affirme que pour rien au monde elle ne changerait sa vie pour une vie de couple : « J’ai vécu pleinement et intensément ma vie affective. J’ai deux adorables enfants, une fille de 23 ans et un petit garçon de 10 ans. (Des enfants adoptifs, ndlr) » Cela ne signifie pas pour autant qu’elle n’a pas connu d’hommes dans sa vie. « J’ai aimé. Ce que j’ai vécu était vrai et intense. »
Elle précise qu’il n’y a pas de demi-mesure dans une relation : soit ça marche soit ça casse. « Ce que je revendique dans une relation entre deux personnes, c’est le partage de tout, une complicité ». Selon elle, les hommes sont de grands enfants qui demandent beaucoup d’attention alors que sa vie professionnelle lui prend pratiquement tout son temps. Gérer ce genre de relation, pour elle, est trop lourd à supporter. En plus, toute relation doit avoir des bases solides. « Je n’ai jamais trouvé quelqu’un qui répondait à mes attentes, qui pouvait cheminer vers ce que je voulais. Si je désirais me marier à la burundaise comme la plupart de gens, je l’aurais fait. Rien ne m’en empêchait. » Mais pour autant, elle a gardé de bonnes relations avec ses ex-compagnons. Elle avoue que le fait de rester célibataire n’est pas un choix, c’est tout un processus. « Je pencherais pour une union libre, mais maintenant je n’en veux plus, je me consacre à autre chose » conclut-elle.
« Les femmes sont si compliquées ! »
De l’autre côté de la barrière du genre, on trouve Déogratias Nahimana, 52 ans, lui aussi célibataire. « J’ai été déçu par la vie qu’ont menée mes grands frères. Je ne veux pas subir le même sort qu’eux» confie-t-il. L’un a divorcé, l’autre mène une vie de couple bancale. Selon lui, au lieu de se marier pour ensuite divorcer, il préfère rester seul. De nature calme, il affirme qu’il chérit la tranquillité et fait tout pour la préserver. Toutefois, il confie avoir voulu sauter le pas : « J’ai vécu avec une femme pour voir si ça pouvait marcher. Après quatre ans, nous nous sommes séparés. Par après, j’ai essayé de renouveler l’expérience mais au bout de quelques mois, on se disputait sans cesse. » Il a fini par claquer la porte. « Depuis lors, je n’ai plus eu envie de vivre avec une femme. Les Burundaises sont si compliquées ! »
Maintenant, il a tout le temps de s’occuper de ce qui le passionne : l’agriculture.
Pour le sociologue Paul Nkunzimana, lorsque des gens vivent dans le célibat, il s’agit d’un problème sexuel et du choix de l’objet sexuel. « En réalité, c’est un état où le sujet, dans sa vie primitive, n’a pas été à même de surmonter les conflits vécus dans sa famille, de dépasser les frustrations et de pouvoir s’identifier aux parents de même sexe», explique-t-il. Il affirme que c’est une pathologie, une attitude de rationalisation qui dissimule les problèmes vécus en cherchant à mettre en avant une pseudo autonomie : « L’être humain est dépendant. Il a à combler ses besoins d’ordre affectif. C’est une excuse à l’explication de leur problème, une conduite défensive. »
Des situations qui arrivent à toutes les catégories de la population
Paul Nkunzimana assure que ce sont des situations marginales, qu’il ne s’agit pas d’un phénomène de société : « Ceci traduit la crise de l’institution de famille à partir de celle du mariage. La société contemporaine met un accent particulier sur la famille pour la perpétuation de l’espèce et de la société elle-même. » Et d’ajouter : « Une crise incarnée à travers le phénomène des unions libres ou le système de compagnonnage. Du reste, il souligne que ce sont des phénomènes qui frappent aussi bien des populations aisées que celles confrontées à des contraintes économiques. Et de mettre en garde contre les conséquences néfastes pour les enfants issus de ce type de couple puisqu’il n y a pas de contrat légal.