Emprisonné depuis le 27 juillet courant, Me Isidore Rufyikiri a comparu pour la première fois ce mardi 02 août devant le Procureur Général près la Cour d’Appel de Bujumbura. Décision : retour à Mpimba.
Dans leurs toges noires, les membres du Barreau du Burundi sont rassemblés au Parquet général près la Cour d’Appel de Bujumbura dès 9h. Ils brandissent des papiers sur lesquels est écrit : «Libérez le bâtonnier Isidore Rufyikiri.»
Une heure plus tard, ce dernier arrive au Parquet Général près la Cour d’Appel de Bujumbura. Il est escorté par 5 policiers et le directeur de la prison centrale de Mpimba dans une jeep plaque jaune. Me Rufyikiri est ensuite conduit dans le bureau du procureur pour une audition. Seuls ses avocats et son épouse sont autorisés à le suivre.
Alors que tout le monde pense qu’il s’agit de l’instruction du dossier relatif à l’incrimination du 27 juillet qui continue, c’est la surprise à la sortie de l’audience, qui a duré une bonne heure. Me Sylvestre Banzubaze, un des avocats du prévenu, révèle à la presse que « l’interrogatoire a porté sur les propos que Me Rufyikiri aurait tenus le 27 juillet au Parquet près la Cour d’appel de Bujumbura, quant il a dit qu’on avait affaire à une foule de lâches.»
Retour à Mpimba
Pour Me Banzubaze, il s’agit d’«un interrogatoire additionnel, parce que le ministère public veut, en réalité, faire le lien entre la première incrimination et les mêmes propos.» Mais au niveau technique, stipule-t-il, «la foule de gens n’est pas identifiée et donc il n’y a pas matière à appliquer une disposition légale quelconque.»
Et à demander à M. Léopold Kabura, Procureur Général près la Cour d’Appel de Bujumbura, de «vaincre sa colère et son irritation apparentes et de libérer sans plus attendre le bâtonnier Isidore Rufyikiri.» Une requête restée sans réponse.
La défense a ensuite demandé au Procureur Général de revenir sur la première incrimination, relative aux articles 378 et 381 du code pénal, mais ce dernier a dit que ce n’était pas à l’ordre du jour. «On n’a pas été plus loin, et il a été demandé au bâtonnier Rufyikiri de rejoindre la prison», se désole Me Banzubaze.
Celui-ci pense par ailleurs qu’on peut nourrir un certain espoir si on voit ce qui s’est passé avec Me Suzanne Bukuru : « Mais le mutisme qui a caractérisé le Procureur Général près la Cour d’Appel par rapport à notre requête de mise en liberté a de quoi nous inquiéter.»
Signalons que cette comparution a vu le soutien du président de l’Association des Barreaux de la Communauté Est-Africaine, le tanzanien Tito Byenkya. «Me Isidore Rufyikiri devrait être libéré tant que les investigations continuent», estime-t-il.
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Articles du code pénal évoqués
Article 378
Constituent des actes d’outrage les paroles, gestes ou menaces, les écrits de toute sorte ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission et, de caractère injurieux ou diffamatoire, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie.
Article 381 :
Lorsque l’outrage est adressé au chef de l’Etat, à un parlementaire, un membre du gouvernement, un magistrat, un fonctionnaire ou agent de l’autorité publique ou de la force publique dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions, l’auteur est puni de six mois à deux ans de servitude pénale et d’une amende de cinquante mille francs à cent mille francs ou d’une de ces peines seulement.
Lorsque l’outrage a lieu lors d’une séance ou d’une réunion publique ou au cours d’une audience d’une Cour ou d’un Tribunal, les peines sont de six mois à trois ans et d’une amende de cinquante mille francs à deux cent mille francs ou d’une de ces peines seulement.