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Le 15 janvier 1965, Pierre Ngendandumwe est tué

05/05/2013 Commentaires fermés sur Le 15 janvier 1965, Pierre Ngendandumwe est tué

Pierre Ngendandumwe voit le jour à Ngozi en 1930. Vers les années 50, le jeune Ngendandumwe part à Kinshasa à l’Université de Lovanium où il décroche un diplôme de licence en Sciences Administratives et Politiques, devenant ainsi l’un des premiers universitaires burundais …

<doc6679|right>A Kinshasa, il fait la connaissance de Thérèse en 1958 qui y suit des études d’infirmière. La jeune demoiselle est issue d’une famille respectable: c’est la fille du grand chef Coya, très connu dans le nord. En 1961, les jeunes gens se marient.
Les temps sont durs, le Burundi est en pleine effervescence, c’est la lutte pour l’indépendance. Pierre Ngendandumwe est un grand ami de Louis Rwagasore, le jeune prince, leader de l’Uprona, le parti indépendantiste. Thérèse Ngendandumwe se souvient des deux hommes : « Pierre et Louis étaient des hommes intègres, très travailleurs, tous les deux peu bavards. Rwagasore fumait beaucoup. »

Pierre Ngendandumwe travaille alors dans l’administration coloniale comme adjoint à l’Administrateur Territorial tout en luttant clandestinement au sein du parti du prince comme l’un de ses lieutenants les plus fidèles.
Il est nommé ministre des Finances lors du premier gouvernement d’union nationale de 1961. En juin 1963, il devient premier ministre, jusqu’à sa révocation par le Roi Mwambutsa IV en avril 1964, qui lui reprochait notamment d’avoir établi des relations diplomatique avec la Chine communiste. Début janvier 1965, il lui est demandé de former un nouveau gouvernement.

|Retrouvez [le témoignage exceptionnel de Thérèse Ngendandumwe sur les circonstances de la mort de son époux->http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=V6aO__qh8YM]|

Après mille hésitations, Pierre Ngendandumwe accepte de former le nouveau gouvernement, le 7 janvier 1965. Il forme enfin un gouvernement de 13 membres dont 7 tutsi et 6 hutu. Le Roi Mwambutsa IV se réserve les secrétariats d’Etat à l’armée et à la gendarmerie à la tête desquels se trouvent déjà respectivement Michel Micombero et Pascal Magenge.

Le 15 janvier 1965, Thérèse, l’épouse du premier ministre Pierre Ngendandumwe est une jeune maman heureuse. Trois jours plus tôt, elle a donné naissance une petite fille. La quatrième. Dans la chambre 7 de la clinique Prince Louis Rwagasore, quelques amis entourent la maman. Le champagne coule.

Le premier ministre a eu une dure journée. Il avait été rappelé par le roi pour constituer un gouvernement dont l’équipe avait été rendue publique vers midi. L’assassinat du leader de l’Uprona en 1961 avait engendré une instabilité politique.
Dans la soirée, le premier ministre est venu voir son épouse et le bébé. Vers 21 heures, il rentre. Il est fatigué. « A cette époque, il n’y avait aucun protocole, mon mari conduisait lui même sa voiture, sans garde du corps, même le roi conduisait lui-même son véhicule », se souvient Thérèse Ngendandumwe.

Soudain, dans la nuit, de sa chambre, Thérèse Ngendandumwe entend des coups de feu. « Cinq, ou six », l’épouse de l’ancien premier ministre ne se souvient plus. Tout ce qu’elle raconte, avec détails, c’est sa réaction : « J’ai crié : « Mbega uyo si Pierre barashe ! (N’est-ce pas Pierre sur lequel on vient de tirer !) ».

La jeune maman, en pyjama, mue par une terrible prémonition, s’est lancée dans le corridor. Elle a rencontré une Sœur blanche, responsable de la maternité qui l’a arrêtée. « Retournez dans votre chambre madame, n’allez pas voir, c’est horrible.» Elle a su que Pierre Ngendandumwe venait d’être assassiné sur le perron de la Clinique Prince Louis.

Cette terrible soirée, Thérèse Ngendandumwe fait une rencontre qui restera gravée dans sa mémoire. « Dans la débandade, j’ai rencontré Monsieur X (malgré notre insistance, elle ne donnera pas le nom), il avait passé la soirée avec nous dans la chambre. Il était sorti quelques minutes avant mon mari. Quand je l’ai vu, je lui ai demandé ce qui se passait, il m’a répondu, indifférent, avec un petit sourire en coin : « Apparemment c’est le premier ministre qui vient de se faire descendre. Je n’oublierai jamais.» Le destin venait de basculer pour la jeune dame et pour le Burundi.

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