Mercredi 06 novembre 2024

Editorial

Lapsus linguae …

27/01/2017 8
Léandre Sikuyavuga
Léandre Sikuyavuga

Lundi 23 janvier, 568 détenus sont libérés et parmi eux des prisonniers politiques. Ils font partie des 2.500 prisonniers ayant bénéficié de la grâce présidentielle.

Après la libération, de vives réactions fusent de partout : les uns saluent la grâce, « un bon signe, un geste d’ouverture des autorités, un pas dans la réconciliation nationale ». D’autres, tel le Cnared, dénoncent « une manœuvre de faire les yeux doux aux bailleurs de fonds afin qu’ils ouvrent les robinets ». Il y en a même qui estiment qu’avec le budget d’austérité, l’Etat burundais n’est plus capable de nourrir tous les prisonniers. Bref, la mesure est différemment appréciée. Sauf bien sûr pour ceux qui bénéficient de cette sortie, car la liberté est l’aspiration de tout détenu. Il fallait d’ailleurs voir l’ambiance festive qui régnait à Mpimba.

Tout est bien qui finit bien. Pas tout à fait. Dans le reportage, la journaliste citant la ministre de la Justice dit que « même des coupables des crimes imprescriptibles ont été libérés». Hmm…Effervescence dans la rédaction. Tout le monde saute sur la journaliste qui aurait mal interprété les propos de madame la ministre. Sauf qu’après avoir écouté et réécouté le son, la ministre a affectivement prononcé cette phrase.

Des juristes sont appelés à la rescousse.

L’article 170 du Code pénal stipule que «La grâce n’éteint pas les peines prononcées contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre». L’article 150 stipule que «L’action publique relative aux crimes de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre est imprescriptible».L’article 155 stipule que «Les peines prononcées contre les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre sont imprescriptibles».

Mais, à notre connaissance, aucun Burundais n’a jamais été condamné pour un de ces trois crimes. Comment pourrait-on alors grâcier quelqu’un condamné à un tel crime ?

Non, une juriste, qui plus est ministre de la Justice ne peut pas commettre une telle erreur. C’est peut-être un lapsus linguae ou l’émotion suscitée par cette libération…

Forum des lecteurs d'Iwacu

8 réactions
  1. Jean Bigirimana.

    Elle savait ce qu’elle disait soyez en sur. La question est le message qu’elle voulait vehiculer et vers qui.

  2. Ntazizana

    A trop être amatrice de son chef, elle devient aveugle .

  3. burukani

    Salut Léandre.
    dans les derniers écrits de ton éditorial tu évoques qu’à ta connaissance , pas de condamnés pour les crimes de ma trilogie au Burundi. Moi je pense que si: rappelles toi de l’affaire Gatumba avec le dossier Nzarabu, ils ont été condamnés pour crime contre l’humanité! Tu peux vérifier au parquet/au tribunal.

    Burka

  4. Jereve

    Il faut comprendre qu’il s’agit de crimes imprescriptibles «virtuels», ceux qu’on peut facilement coller sur toute personne ou adversaire qu’on vise à éliminer politiquement ou physiquement.

  5. Rwasa Etienne

    Un lapsus????????? Hum…… Plutot une lecture erronée, car elle avait entre ses mains un texte ecrit qu’elle lisait . Tout était préparé. Parlons plutot de cynisme et de provocation entaché d’une autre qualité/défaut que je ne citerai pas ici. On le sentait dans son accent par ailleurs.

  6. MUGISHA

    Bonjour. Je ne connais pas la formation de notre ministre de la justice. Mais comme son poste est politique, elle devrait s’entourer de bons conseillers juridiques qui lui préparent ses déclarations en termes appropriés. Elle n’est pas la seule, vu la formation et le CV du nouveau venu, la pagaille n’est pas fini dans la gestion urbaine. Nous jugerons par les actes : https://bujumburanewsblog.wordpress.com/2017/01/27/qui-est-le-nouveau-ministre-en-charge-de-lenvironnement/

  7. Yves

    « C’est peut-être un lapsus linguae ou l’émotion suscitée par cette libération… » Aucun des deux. C’est plus simplement l’expression de la médiocrité et de l’incompétence ordinaire de l’équipe gouvernementale en place.

  8. SIEMPRE HAGURUKA

    Cher Léandre c’est toujours avec beaucoup de plaisir que je lis votre éditorial. vous avez la plume de Rabelais. Continuez à nous abreuver de vos nouvelles.
    Sinon les mots de la ministre de justice sont remplis de cynisme qui caractérise le pouvoir en place.

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