A l’occasion de la journée de l’Europe, célébrée le 9 mai, M. Stéphane De Loecker, a passé en revue plusieurs questions intéressant l’UE et le Burundi.
Reprenant les paroles fortes de Jean Paul II aux Polonais à la veille de la chute du Mur de Berlin, « n’ayez pas peur! « , l’ambassadeur De Loecker, a indiqué qu’au Burundi, « la peur est encore trop présente dans les esprits » a même peur de dire au gouvernement qu’elle s’inquiète de la hausse des prix. » Pour l’ambassadeur de l’Union européenne, il faut se libérer de la peur. « Le gouvernement doit pouvoir gouverner sans peur du débat, avec justice et équité, la société civile doit pouvoir s’exprimer sans crainte, dans le respect de la loi et de la déontologie, les leaders en exil doivent pouvoir rentrer pour participer activement à la vie politique du pays » , a martelé M. De Loecker aux invités réunis dans les jardins de l’hôtel Ubuntu. Rappelant la longue amitié qui lie l’Union européenne et notre pays, l’Ambassadeur De Loecker a exprimé une grave préoccupation des pays européens sur des relents d’ethnisme que l’on « sent poindre de manière diffuse dans certains dossiers. » L’ambassadeur mis en garde les Burundais : « Nous souhaitons aujourd’hui vous mettre en garde solennellement contre tout nouvel accès d’ethnisme qui n’apporte que malheur et désolation. »
M. De Loecker a passé en revue quelques défis auxquels le Burundi est confronté. Nourrir une population qui augmente de « manière incontrôlée », une faible productivité pour réussir l’intégration économique dans l’espace régional, et particulièrement dans l’East African Community. L’ambassadeur de l’Union Européenne a estimé que le Burundi, en tant que petit pays enclavé, doit voir l’intégration comme une véritable opportunité. M. De Loecker a exhorté les Burundais à lutter efficacement contre la corruption. Avec la crise économique, les Etats membres de l’UE doivent se résoudre à d’importantes coupes budgétaires. Avec fermeté, il a déclaré : « Nos opinions européennes sont certes prêtes à faire montre de solidarité, mais ne pourraient accepter des détournements de fonds ou des pratiques de corruption qui restent courantes au Burundi. » Par ailleurs, l’Union Européenne insiste pour que « le processus de la justice transitionnelle progresse conformément aux standards internationaux en la matière et ne résulte pas en l’impunité des personnes ayant commis des crimes imprescriptibles dans un passé plus lointain. » L’Ambassadeur De Loecker a exprimé sa joie de voir l’Union européenne dans son ensemble, malgré la crise, maintenir ses prévisions d’aides au Burundi. Dans son discours, le représentant du gouvernement, le ministre Jean Jacques Nyenimigabo a également souligné les bonnes relations qui lient le Burundi et l’UE. Il a rassuré l’UE sur l’engagement du gouvernement à relever tous les grands défis auxquels le Burundi fait face. La fête s’est déroulée en présence de plusieurs hautes personnalités, telle l’Ombusman , des ministres, sénateurs et députés, des diplomates étrangers, des représentants des ONG, société civile et médias,etc.
Verbatim
M. Stéphane De Loecker, Ambassadeur de l’Union européenne au Burundi
– Sur l’état de l’union « Cette dernière année a vu la crise financière s’amplifier, avec des dettes souveraines des Etats soumises à de fortes pressions, un recul important de l’activité économique, et même, des incertitudes à l’égard de l’avenir de l’Euro, pourtant une des réalisations les plus marquantes de l’Union européenne. »
– Sur le populisme dans l’UE « Cette année a aussi vu s’amplifier les tendances extrémistes en Europe, qu’il s’agisse de diverses formes de populisme exacerbé, rejetant la responsabilité de la crise sur le libéralisme et la mondialisation pour les uns, ou de nationalismes virulents, rejetant cette responsabilité sur l’étranger » au sens large, pour les autres. »
– Respect du droit à la vie (…) la femme et les enfants doivent pouvoir rentrer à la maison le soir sans la peur d’être battus par un homme ivre ou, pire encore, sauvagement assassinée, comme cette jeune fille albinos de 15 ans affreusement mutilée et sauvagement assassinée en commune Kabezi
– Ernest Manirumva C’est un cas « emblématique » pour l’Union européenne. Nous attachons la plus haute importance à ce qu’un jugement équitable intervienne rapidement et les véritables coupables et commanditaires soient identifés et condamnés.
– Exécutions extra-judiciaires « Nous constatons avec satisfaction que ces crimes odieux sont beaucoup moins nombreux aujourd’hui, et qu’un dialogue fructueux a été restauré entre l’Union européenne et le Burundi pour discuter de ces questions délicates, parmi lesquelles figure le rôle de la Société Civile, et en particulier des défenseurs des droits de l’homme, dans une société démocratique »
– Sur la démocratie « Nous continuons d’encourager toute initiative visant à recréer une réelle vie politique avec pouvoir en place et opposition, dans le cadre d’une vie parlementaire active. A ce sujet, qu’il nous soit permis de répéter avec force que nous refusons tout recours à la violence, d’où qu’elle vienne}
– Sur les leaders en exil « Nous encourageons les leaders politiques en exil à rentrer au pays afin d’y exercer une activité politique pacifique dans la perspective des élections de 2015. »
– Sur les élections de 2015 L’Union européenne, avec les Nations-Unies et la CENI envisagent d’organiser un séminaire de réflexion visant à tirer les leçons des scrutins de 2010, afin de préparer au mieux les échéances électorales de 2015.
– Sur la CVR « Nous souhaitons vivement que la Commission vérité et réconciliation soit mise en place et fonctionnelle avant la fin de cette année, comme promis par Son Excellence le Président de la République. »
Quid de la coopération de l’UE avec le gouvernement burundais Elle se fait sur la base du Cadre stratégique de Croissance et de Lutte contre la Pauvreté 2e génération. 4 axes prioritaires pour les années à venir. – le renforcement de l’Etat de Droit et la consolidation de la Bonne Gouvernance. L’ action de l’UE au Burundi est basée sur la Stratégie nationale de Bonne gouvernance et de la Lutte contre la corruption. – la transformation de l’Economie Burundaise pour une Croissance Soutenue et Créatrice d’Emplois avec pour priorités l’agriculture et la sécurité alimentaire, l’énergie et le développement du secteur privé, – l’amélioration des Services de Base, en particulier l’éducation et la santé, – la gestion rationnelle de l’Espace, de l’Environnement et des ressources naturelles pour un Développement véritablement durable.
Quelques chiffres L’Union maintient ses prévisions d’aides au Burundi pour toute la période 2008-2013 pour laquelle l’enveloppe globale s’élève à plus de 260 M EUR soit plus de 450 milliards de Fbu. Si l’on ajoute les versements effectués par les Etats membres, on peut estimer à plus du double de ce montant le soutien apporté par l’Union européenne dans sa globalité, car il ne faut pas oublier non plus que les Etats membres sont d’importants contributeurs à la Banque Mondiale et aux agences des Nations-Unies qui sont aussi des acteurs de premier plan ici au Burundi. Pour la sécurité alimentaire: le Burundi bénéficiera en 2012 d’une enveloppe supplémentaire de 18 mio. d’Euros pour contribuer à réduire de moitié le nombre des personnes vivant dans l’extrême pauvreté et des personnes qui souffrent de la faim à l’horizon 2015. Le FIDA a été désigné comme étant le partenaire privilégié pour mettre en œuvre ce projet. Le Burundi bénéficiera par ailleurs d’une enveloppe de 8 M€ à travers le Programme Sécurité Alimentaire et Nutrition au Burundi (PRO-SA-NUT), dont les actions viseront à lutter contre la malnutrition, un problème alarmant dans certaines provinces du pays et qui s’aggrave de jour en jour. Afin de pouvoir financer les actions identifiées dans le CSLP2, les partenaires du Burundi auront une occasion à présenter leurs engagements lors d’une conférence de partenaires que le gouvernement souhaite organiser en automne de cette année.