Lundi 25 novembre 2024

Société

Laissez-les prier, Dieu reconnaîtra les siens

Avec plus de 300 confessions religieuses légalement reconnues, c’est à se demander si c’est pour assouvir la soif spirituelle des Burundais. Et quid de cette dîme, souvent source de discorde et de cette laïcité consacrée par la Constitution burundaise? Autant de questions …

De gauche à droite : Mme Annick Ndayisaba, Diane Nininahazwe(Journaliste) Mgr Baregensabe et Al Hadj Nkunduwiga ©Iwacu
De gauche à droite : Mme Annick Ndayisaba, Diane Nininahazwe(Journaliste) Mgr Baregensabe et Al Hadj Nkunduwiga ©Iwacu

Trois invités pour y répondre : Mme Annick Ndayisaba, fidèle de l’église protestante ’’Guérison des Ames’’, Al Hadj Harouna Nkunduwiga, de la Communauté Islamique du Burundi et Mgr Gabriel Baregensabe, fervent catholique.
D’entrée de jeu, ce prélat tient à préciser que le Burundi n’a que deux principales religions: l’Islam, subdivisé en deux branches essentielles et le Christianisme englobant le catholicisme et le protestantisme avec toutes ses ramifications.
Celle dont on parle le moins, explique-t-il, c’est la religion de nos ancêtres avec le culte appelé ’’Ukubandwa’’. Ses adeptes existent encore, ils ne font pas de vagues parce qu’ils ne demandent pas l’agrément.
« Les confessions religieuses agréées dépassent les trois cents, avec des enquêtes, on en trouverait d’autres.» D’après lui, ce foisonnement serait lié à la crise qui a secoué notre pays.

« Chacun essaie de chercher où son cœur serait apaisé et où trouver des réponses aux tracas de la vie quotidienne. Les voies sont multiples. Je ne sais pas si bon nombre y vont pour mieux connaître Dieu ou s’ils ont d’autres visées », se demande Mgr Baregensabe.
Une inquiétude partagée par El Hadj Harouna Nkunduwiga, représentant de la COMIBU (Communauté Islamique du Burundi) non reconnu par le ministère de l’Intérieur : « L’Eternel nous a envoyé différents prophètes dont Mahomet est le dernier, pour nous annoncer sa Parole. Mais avec plus de trois cents confessions religieuses agréées comme solution aux problèmes spirituels des Burundais, il y a lieu de se poser des questions. »

Ce n’est pas l’avis de Mme Annick Ndayisaba, adepte de l’église ’’Guérison des Ames’’, ancienne catholique pratiquante : « Il y avait une ferveur que je n’avais pas encore atteint à l’église Saint Sauveur de Nyakabiga.» Sa famille se méfiera d’elle, mais « ils ont fini par me comprendre. »

Les toutes premières églises ont été incendiées en signe de résistance ©dr
Les toutes premières églises ont été incendiées en signe de résistance ©dr

Cujus regio, ejus religio

Selon Mgr Baregensabe, le respect des Droits de l’homme est très important et surtout en matière religieuse. « Par le passé, certaines lois du pays n’étaient pas favorables à cette liberté de culte. Il n’était pas facile de créer ces ’’associations’’ qui foisonnent aujourd’hui.»

D’après lui, l’Eglise catholique a signé il y a environ 50 ans un traité donnant la latitude à tout le monde, catholique ou protestant de choisir sa religion. « Tant que Dieu est le seul guide, il faut laisser la liberté à tout le monde.» Pour El Hadj Harouna Nkunduwiga, une fois le Message reçu, toute personne est libre d’adhérer ou pas. « Il n’y a pas de contrainte. »
Genèse
Au Burundi, note Mgr Gabriel Baregensabe, ce qui plaît au chef doit également l’être pour ses sujets. Quand les Ganwa se sont convertis, souligne-t-il, les administrés ont suivi, les récalcitrants ont été discriminés.
« Et c’est le cas pour les musulmans », ironise Nkunduwiga. Quand les Pères Blancs sont arrivés à Rumonge, explique-t-il, ils n’étaient pas les bienvenus, ils critiquaient l’Islam. « La tutelle ne voulait surtout pas entendre parler de musulmans. Ils n’ont pas eu la vie facile dans ce pays ».
Et c’est presque pareil aujourd’hui, « à voir comment le ministère de l’Intérieur s’immisce dans nos affaires, cette liberté religieuse est dans les textes et non en pratique.»

Ce n’est pas le cas pour l’église ’’Guérison des Ames’’. Mme Annick Ndayisaba s’explique : « Pour nous, la liberté de culte est une réalité. Et c’est de même pour d’autres églises comme l’Eglise Vivante. Si ce ne sont pas les adeptes de ces confessions religieuses qui se querellent, l’Etat les reconnaît, personne ne les dérange.»

La dîme, une manne pour le pasteur

D’après cette fidèle de l’église ’’Guérison des Ames’’, la dîme est prescription biblique. « C’est pour aider les pasteurs dans leur vie quotidienne. Ils ne doivent pas avoir d’autres occupations à part prêcher..»
Et El Hadj Harouna Nkunduwiga de tiquer. « Chez les musulmans, l’impôt appelé ’’zakat’’ n’est pas destiné à faire vivre les imams, c’est essentiellement pour les démunis. » Selon lui l’existence des nombreuses associations s’explique par la recherche des avantages terrestres.
Ce qu’on appelle ’’imperezwa’’ (offrande), explique Mgr Baregensabe, c’est peu d’argent, au vu de toutes les missions de l’Eglise : « Une autre partie de la dîme va aux prêtres mais il faut de la transparence dans sa gestion.»

La laïcité en procès

D’après El Hadj Harouna Nkunduwiga, la Constitution burundaise garantit la laïcité de l’Etat. « Mais des fois, l’Etat penche d’un côté.» Pour Mgr Baregensabe, le dirigeant doit être impartial, il ne doit pas privilégier sa religion. « Certains actes posés par nos dirigeants ne sont pas laïques. » Mais Mme Annick Ndayisaba de l’église ’’Guérison des Ames’’, trouve que le pays est plutôt sur une bonne lancée.

Et El Hadj Harouna Nkunduwiga de protester. Selon lui, des signes d’intolérance persistent: « La polygamie autorisée par l’Islam est interdite au Burundi. Le législateur avait un côté penchant.» Ce n’est pas tout, il n’y a que deux fêtes musulmanes officiellement reconnues, explique-t-il, mais la tendance est d’oublier les 52 dimanches et d’autres fêtes religieuses chrétiennes fériées.
Pour Mgr Baregensabe, chaque pays a besoin de lois non discriminatoires. Ce prélat plaide pour la consolidation de synergies interconfessionnelles : « Il y a beaucoup de choses que l’on peut faire ensemble. Cela enrichit aussi spirituellement. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Mais c’est trop honteux pour les églises Protestantes qui se prennent en berger au lieu de Precher la bonne nouvelle. Qui ferme les yeux lorsqu’il passe la 9ème Avenue de Bwiza, où il y a deux Eglises, la nouvelle Eglise appellée ADONAI CHURCH, vient d’etre implanté sur la porte de l’autre MIGRAD qui y operait ses services depuis des années. ADONAI CHURCH semble etre une Eglise dont les propriétires sont des vrais orgeuilleux appuyés du plus haut rang;(autorité) et font le tapage sonore, la journée et la nuit. La population voisine, ne sais à quel saint se vouer puisque le bruit instrumental de 5h30 du matin, ne permet plus aux paisibles citoyens de dormir. Est ce cela vraiment la bonne voie?

  2. Ntakamurenga

    Juste pour s’enrichir, les responsables des religions ont pu s’enrichir. Nous les prolétaires nous mourrons dans la pauvreté. Mu Burundi dufise imigwi ine: Abatunzi (ari bo badupfukamye mu nda: bagizwe n’abanyapolitike, bene amadini n’abadandaza bakuru), abakene, abinazi na ba tahonikora (ari bo bita ba ntahinitousha). Ntibatwize Imana kuko na ba sogokuru barasenga kandi bari bazi ko ibaho. Ni batwize uko bayisenga ariko batarinze kutwambura.

  3. tom2tom

    c’est deja bien quu’un tel echange ait lieu. Il faut dire qque la liberté s’arrache, elle n’est pas servie sur une assiette.
    je pense que le pouvoir en place se doit d’etre neutre dans les affaires de foi. par ailleurs, je trouve que le dimanche n’est pas une fete des seuls chretiens mais de tout le monde ou ce n’est pas une fete en soi. mm dans les pays musulmans, les dimanches sont des jrs de repos.

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