Les déchets ménagers, les eaux usées provenant des industries et usines de la ville de Bujumbura, la capitale burundaise, finissent dans le lac Tanganyika. Un phénomène porteur de graves conséquences pour les riverains et la biodiversité.
« De hautes autorités du pays ont visité cet endroit à maintes reprises, des images ont été prises. Nous avons crié au secours, mais rien n’a changé jusqu’aujourd’hui. Des déchets de toutes sortes continuent à se déverser dans le lac», se lamente une femme rencontrée à « Kumase » (« dépotoir »), à proximité d’un caniveau conduisant des eaux usées vers le lac Tanganyika. C’est dans la zone Ngagara, commune Ntahangwa, au nord de Bujumbura.
Le cas de Kumase est illustratif en ce qui est de la pollution. Un conduit achemine des eaux usées fétides, de couleur noirâtre, vers ce lac.
Sans moyens financiers pour déménager, certains riverains s’y sont accoutumés. Des femmes, des enfants, des hommes y déambulent, des gargotes sont installées à moins de deux mètres de ce canal nauséabond.
On y trouve également des vendeuses d’avocats, d’oranges, de frites de patates douces… Des mouches attirées par les défécations humaines, des tas d’immondices y grouillent.
Les occupants de cet endroit sont dépassés et désespérés : « Que voulez-vous qu’on fasse ? Nous sommes déjà habitués à cette odeur suffocante au risque de nos vies », lâche une vendeuse d’avocats en train de laver son bébé au ventre ballonné. Cette mère de cinq enfants dit que la situation est intenable. « Nous n’avons pas d’autre choix. Nous sommes obligés de supporter. »
Isidore Kabura, un homme croisé sur place, déplore la lenteur des pouvoirs publics pour mettre fin à cette situation. « Les machines de pompage des eaux usées industrielles vers la station d’épuration de Buterere sont hors d’usage, depuis plusieurs années. Toutes les trois ne fonctionnent plus ». Le site de ces machines se situe près de l’ex-Ecole nationale de police (ENAPO), au nord de la capitale.
Pire encore, poursuit-il, même la station d’épuration de Buterere ne fonctionne pas convenablement. « Or, c’est celle-là qui devait traiter tous les déchets ménagers, toutes les eaux usées industrielles avant d’être canalisées vers le lac ».
La question est connue des pouvoirs publics. L’étape est à la recherche des moyens pour se procurer ces machines de pompage dont le coût avoisine 400 millions de BIF (228.871 dollars américains), selon Célestin Ndayizeye, ministre de l’Environnement.
Outre cette pollution chimique, Jean-Marie Nibirantije, directeur exécutif de l’Autorité du Lac Tanganyika, note que ce lac est victime de la pollution physique.
L’intensification des activités agricoles dans les montagnes surplombant Bujumbura accentue cette pollution. En cas de fortes pluies, explique-t-il, d’importantes quantités de sol, de sédiments, de produits phytosanitaires (insecticides) … finissent dans le lac.
Les riverains en font les frais
« Comment voulez-vous qu’il continue à nous donner des poissons, de l’eau propre alors que nous ne faisons que lui offrir des déchets ? », se demande Albert Mbonerane, ancien ministre burundais de l’Environnement. Il regrette de voir ce « trésor transformé en poubelle malgré son importance ».
Nommé en 2017, ‘’lac le plus menacé de l’année’’ par le Global Nature Fund (GNF), ce dernier signale qu’il fournit plus de 90% de l’eau utilisée dans la ville de Bujumbura.
Selon l’Institut des statistiques et d’études économiques du Burundi (Isteebu), cette ville comptait 1.192.544 habitants en 2015.
Désiré Nsengiyumva, Directeur Eau à la Regideso, (l’entreprise publique fournissant l’eau et l’électricité) révèle que le captage d’eau se fait désormais à 3.5 km au lieu de 800m de la rive et à 25 m de profondeur. Du coup, il observe que cela entraîne un coût additionnel substantiel. Et si la situation ne s’améliore pas, alerte-t-il, le Burundi sera obligé d’entrer dans les eaux congolaises.
M. Mbonerane ajoute qu’à cause de la pollution, la production du poisson diminue sensiblement. « Les poissons migrent vers les zones non polluées ». Selon la direction du département des eaux, pêche et aquaculture, la production est passée de 20 mille tonnes en 2002 à 10 mille tonnes en 2012.
Les effets de cette pollution s’avèrent mortels. Dr Charles Niyonkuru, environnementaliste, signale que dans les zones polluées, on y pêche surtout deux espèces de poissons : le tilapia (couleur argentée) et le clarias gariepinus ou poisson-chat (couleur noire). «Ils font partie des espèces tolérantes et résistantes qui se nourrissent des produits très polluants comme les métaux lourds (le plomb, le chrome, etc) en provenance des usines, des stations-services, des ménages des quartiers proches du lac Tanganyika».
Par le phénomène de bioaccumulation, ces poissons encaissent ces polluants, vecteurs de certaines maladies, notamment le cancer, les déformations chez les enfants, la stérilité chez les femmes, etc. Dr Niyonkuru précise que c’est par la chaîne alimentaire que de tels produits finissent dans le corps humain. «Les effets ne sont visibles qu’après un certain temps ». D’après lui, il faut attendre 10 à 15 ans pour constater les premiers symptômes du cancer.
Des environnementalistes appellent au respect de la loi. M. Mbonerane déplore que de bons textes restent cachés dans les tiroirs. Il cite le code de l’eau qui institue une zone tampon de 150 m sur le lac Tanganyika. « Malheureusement, des constructions, des installations humaines, des usines… s’observent même à moins d’un mètre du lac ». Jean-Marie Nibirantije abonde dans le même sens en appelant les autorités à faire appliquer scrupuleusement la loi et à jouer convenablement leur rôle en ce qui est de la protection du lac. Aux industriels, il les appelle à traiter leurs eaux usées avant de les déverser dans le lac.
Faute de ressources …
La protection de l’environnement demande des investissements – en agent et en main-d’oeuvre – que ne peuvent fournir que des collectivités « riches ». Le pays s’est dangereusement appauvri, et le caniveau crie la misère.
Fallait-il vraiment faire passer les intérêts d’un clan et d’une personne avant ceux du pays, ou pousser l’aveuglement jusqu’à confondre les deux ?
Comment a-t-on pu s’imaginer que la communauté internationale allait ignorer des manipulation anticonstitutionnelles dans un pays enclin aux violences ethniques ou autres ? Ces erreurs de jugement attestent-elles de la capacité des gouvernants actuels de gouvernemer sagement ?
On accuse la communauté internationale – mais elle agit en vertu des principes de démocratie en vigueur, principes qu’elle s’efforce de respecter et de faire respecter – avec plus ou moins de bonheur selon les cas et les conflits.
Ce n’est pas parce que le sort fait aux Afro-Américains aux USA est injuste que les principes du droit des personnes sont viciés, ou que la situation au Burundi est au-dessus de toute critique.
Alors, continuer à croire aux boniments du CNDD-FDD, ou penser à un avenir différent ? Burundais, votre sort est entre vos mains.
Bravo Iwacu pour cette alerte! Malheureusement, il n y aura pas de suite.
Tous ces problèmes c´est le Rwanda et l´UE, turagowe kabisa !
ingorane ziduhanze ni nyinshi basha, amahera ntayo abazungu nabo baratuyobeye, none dukore gute ?
C’est, entre autres « merveilles », ce genre de performance que le Burundi compte partager avec l’EAC.
Une reunion dirigee par Pierre en personne serait en cours pour faire le bilan de l’adhesion du Bdi a EAC.
Je connais le coupable dans cette affaire de pollution : ce sont les opposants au 3 eme mandat du guide suprême Son excellence nkurunziza Pierre , les partis d’opposition kagame et les anciens colonisateurs . A cela Il faut y ajouter les Mexicains.
@Ramazani
Ne t’y soustrais pas toi-même. N’as tu pas participé à cette pollution? Lorsque tu te baladais à Saga?
Ce n’est pas en ne protégeant pas dame nature que l’on sauvera le pays, bien au contraire, il faut préserver les ressources… De plus, si l’on veut se tourner vers le tourisme (ressources qui peut être très profitables à l’ensemble du pays) il FAUT ABSOLUMENT PRESERVER NOTRE ENVIRONNEMENT !
Ivyo nibinyoma bikwiragizwa nabansi b’Uburundi.
« …Des officiels se disent également inquiets. Désiré Nsengiyumva, Directeur Eau à la Regideso, révèle que suite à la pollution, le captage d’eau se fait désormais à 3.5 km au lieu de 2km. Avec un coût additionnel substantiel. Si la situation ne s’améliore pas, alerte-t-il, le Burundi sera obligé d’entrer dans les eaux congolaises. « Ce qui exigera une expertise internationale pour installer nos tuyaux. » Il fait savoir qu’aujourd’hui la Régideso capte 90 mille m3 par jour. »
Vous comprenez pourquoi nous sommes sous-équipés ? Nous sommes incapables d’anticiper, de prévoir. Tout en connaissant les conséquences ultérieures, nous laissons les situations pourrir comme si les solutions viendraient toutes seules. Pourquoi ? Paresse intellectuelle ? Manque de leadership ? Les responsables des services incompétents ?…
Tout semble se détériorer rapidement dans notre pays. Triste quand même triste et très malheureux pour le lac Tanganyika, une richesse naturelle inestimable pour le Burundi, le pays le plus pauvre du monde… ! Nous devrions préserver et protéger jalousement ce lac mais malheureusement, la préservation de l’équilibre écologique d’un pays de même que son développement socio-économique ne sont pas possibles sans une bonne vision et un bon leadership. Ces deux éléments, moteur essentiel du développement nous manquent cruellement depuis quelques années déjà. Bientôt, si la destruction de la faune et de la flore continue au rythme que nous connaissons sans que des mesures énergiques et fortes soient prises, ce pays sera purement et simplement un désert sans forêt ni oiseaux ni le peu d’animaux sauvages qui nous restent encore. Mr A.MBONERANE se bat certes, mais comme on dit dans notre belle langue « Igiti kimwe ntikigira ikibira » i.e. un arbre ne fait pas seul la forêt.. !
@RUGAMBA RUTAGANZWA
« Ces deux éléments, moteur essentiel du développement nous manquent cruellement depuis quelques années déjà. »
Depuis quelques années seulement? Je vois ce que vous voulez dire…
Moi je dirais plutôt que c’est depuis l’indépendance (55 ans). Sinon nous n’en serions pas encore là!