Le secrétaire général du Cndd-Fdd soutient qu’aucun Burundais ne doit vendre sa propriété à un étranger. Le professeur Emery Niyukuri affirme que le code foncier du Burundi ne reconnaît pas exclusivement le droit à la propriété aux nationaux.
Selon Evariste Ndayishimiye, secrétaire général du parti Cndd-Fdd, certains Burundais prennent leurs propriétés foncières comme leur propre « république ». Inadmissible car les propriétés tout comme les minerais sont une richesse commune à tous les Burundais. « Que personne ne dise que sa propriété lui appartient seul et qu’il peut la vendre à n’importe qui.». Ces propos ont été ténus le 20 mai à Rugombo dans la province de Cibitoke. Ce jour, il avait accompagné le ministre de l’agriculture, l’Elevage et l’environnement Déo Guide Rurema pour l’acquisition d’une propriété de 1504 ha située sur la colline Gabiro-Ruvyagira. Ce dernier a été rétrocédé par la cour spéciale terre et autres biens à l’Etat du Burundi au profit de la société Rugofarm. M. Ndayishimiye a tenu à mettre en garde toute personne qui vend sa propriété à un étranger : « Ceux qui le font cèdent une partie de la souveraineté à un pays étranger. Si nous continuons dans ce sens, nous deviendrons leurs esclaves.» En outre, il prône la récupération de toutes les propriétés de l’Etat inexploitées aux mains de particuliers.
Emery Nukuri, professeur en droit foncier à l’Université du Burundi, fait savoir que la première Constitution du Burundi reconnaissait le droit de propriété foncière à tous les Burundais. Contrairement aux années d’avant l’indépendance où toutes les terres appartenaient au roi. Il rappelle que les Burundais n’étaient que de simples usagers. Ils pouvaient y cultiver, y faire paître le bétail tout en sachant que la terre appartenait au souverain. En contrepartie, les sujets lui payaient des redevances.
Ainsi, après le départ du colonisateur, l’Etat a acquis ses propres domaines : les terres domaniales. Cela transparaît même aujourd’hui dans le code foncier en vigueur adopté en 2011. Désormais, le patrimoine foncier national comprend les terres relevant du domaine public de l’Etat et des autres personnes publiques, celles du domaine privé de l’Etat et d’autres personnes publiques, ainsi que celles appartenant aux personnes privées physiques et morales.
Le code foncier reconnaît la propriété aux étrangers
Pour la première catégorie, M. Niyukuri précise qu’elles ont une particularité. Elles sont inaliénables. Ce sont des terres qui sont affectés à l’usage public. Elles ne peuvent être vendues. En outre, ajoute-t-il, elles ne sont pas non plus prescriptibles. Quant à la seconde, l’Etat peut les vendre, les céder, les viabiliser sous forme de parcelle. Et si l’Etat ne prend pas garde, la population qui y passe plus de 30 ans, peut y prescrire des droits. « Pour la troisième catégorie, si une chose t’appartient, c’est normal que tu puisses en user », souligne cet homme de droit.
A propos du droit à la propriété des étrangers, le professeur Niyukuri rappelle que le code foncier du Burundi ne reconnaît pas exclusivement le droit à la propriété aux Burundais. « Sous réserve de réciprocité, les étrangers jouissent des mêmes droits et protection que les nationaux. A supposer que le Kenya reconnaît aux Burundais la propriété. Le Burundi est obligé de faire de même en vertu de ce principe. »
Selon ce juriste, les étrangers peuvent avoir des cessions et des concessions des terres domaniales. L’Etat peut donner des propriétés aux étrangers pour l’usage industriel, commercial et culturel. L’Etat peut les faire louer mais la pleine propriété est réservée aux Burundais.
Cependant, partout dans le monde, l’Etat se réserve le droit d’user de la propriété d’une personne privée pour l’intérêt général de la collectivité. Dans ce cas, on renvoie à la loi pour protéger le propriétaire. Elle prévoit que les propriétaires peuvent être expropriés pour cause d’utilité publique au profit de l’Etat ou d’une personne publique. Jamais au détriment d’une personne privée. Sinon, précise Emery Niyukuri, c’est une violation de la loi.
Avec l’ancien code foncier de 1986, soutient-il, l’Etat pouvait s’ingérer dans la propriété privée. Il prévoyait la réquisition d’une terre rurale non mise en valeur pendant 5 années consécutives. Et ce après un préavis de 6 mois à l’avance. Dans l’Etat actuel du code foncier, seuls les marais non exploités peuvent être réquisitionnés pour non mise en valeur.