Le parti Cndd-Fdd a initié une semaine dédiée au combattant. Pour certains, c’est une source de tensions car le parti de l’Aigle n’est pas le seul à avoir combattu pour la «démocratie». Rencontre avec Jean Bosco Ndayikengurukiye, ancien chef rebelle de la première heure du Cndd-Fdd.
Est-ce nécessaire d’organiser une semaine des combattants dans le contexte actuel ?
La semaine dédiée aux combattants a été initiée par le parti Cndd-fdd depuis 2005. Tout le monde a compris que c’est une simple propagande pour maintenir le moral de ses démobilisés, base même des Imbonerakure. Mais comme parti au pouvoir, cette initiative sectaire et inutile n’honore pas cette formation politique.
Comment?
Primo, il s’est avéré que le Cndd-fdd veut en faire un évènement national au point que les membres du gouvernement y participent en violation de la loi.
Secundo, une commémoration supposée restituer la vérité historique sur les sacrifices consentis par les combattants de la démocratie est systématiquement transformée en une journée d’autoglorification des plus hautes autorités du parti et de l’Etat. Un bon nombre de ces dernières non seulement n’ont jamais touché une arme, mais aussi ne savent même pas par qui, où et comment la lutte a commencé. Elles ne sont ni plus ni moins que les acteurs et metteurs en scène de leur propre destinée lors de la semaine du combattant.
A vous entendre, ils ne sont pas les seuls combattants ?
Outre les ex-Fdd répartis actuellement en trois groupes (ceux de Nkurunziza, de Ndayikengurukiye et de Nyangoma), il y a d’autres anciens combattants, comme les Fnl qui ont pendant longtemps constitué le deuxième mouvement important et rival aux Fdd.
En outre, dans une guerre civile qui s’est soldée par un accord de cessez-le- feu, il n’y a eu ni vainqueur ni vaincu. Humilier les ex-Fab de cette manière n’est pas responsable pour les autorités du Burundi. La semaine du combattant est à plusieurs égards une source de tensions.
Cette commémoration est-elle inopportune?
Une telle journée, si elle doit avoir lieu, doit être décidée par le Sénat et préciser de quels combattants il s’agit. Tous ceux qui ont combattu, tant du côté des ex-Fab que des mouvements armés, ne mériteraient pas le même statut. La Commission Vérité et Réconciliation n’a pas encore terminé son travail pour savoir si tout le monde est blanc. On doit reconnaître aussi le statut de grands combattants à tous ceux qui ont combattu les colons allemands et Rumaliza etc…Même à titre posthume.
Que faut-il faire alors?
En attendant cette décision, les anciens combattants pourraient créer leurs propres associations, selon leur origine, ou des coopératives d’épargne et de crédit appuyées par l’Etat pour défendre leurs droits. En tout état de cause, le parti au pouvoir n’est pas honoré par cette attitude ségrégationniste et source de tensions.
Propos recueillis par Fabrice Manirakiza